Quoi de neuf en Europe ?

Quoi de neuf en Europe ? - Lucie Cassard

© European Union 2024 - Source : EP Quoi de neuf en Europe ? - Lucie Cassard
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« Quoi de neuf en Europe ? », c’est le nom que porte la chronique hebdomadaire réalisée par l’association Perspective Europe. Les étudiants du master Affaires Européennes de Sciences Po Bordeaux se sont donnés pour mission de décoder pour vous, chers auditeurs, l’actualité de l’Union européenne. Alors quels ont été les moments forts de la semaine qui vient de s’écouler ? On en discute tout de suite avec Lucie Cassard.

Alors Lucie, dites-moi : quoi de neuf en Europe ?

Aujourd’hui direction la Pologne, car samedi dernier, le premier ministre Donald Tusk, a déclaré lors d’un rassemblement de son mouvement, Coalition civique, vouloir suspendre temporairement le droit d’asile dans son pays. Cette mesure ferait partie du “nouveau pacte migratoire polonais” que le premier ministre présente aujourd’hui à l’occasion d’une réunion gouvernementale. Il s’agit d’un durcissement annoncé de la politique polonaise en matière d’immigration, pourtant déjà très stricte, qui intervient dans le contexte du nouveau pacte migratoire européen voté en avril dernier par le Parlement, auquel Donald Tusk s’oppose.

Mais alors qu’est-ce que Donald Tusk reproche à ce nouveau pacte migratoire européen ?

Le premier ministre polonais lui reproche de ne pas lutter efficacement contre la migration illégale, ce qui selon lui, porte atteinte à la sécurité des Polonais. Depuis 2021, la Pologne connaît des pressions migratoires importantes à sa frontière avec la Biélorussie. Donald Tusk dénonce une “guerre hybride” orchestrée par ce pays, avec le soutien de la Russie, pour déstabiliser l’Union Européenne. La Biélorussie accueille en effet des migrants venus du Moyen Orient et d’Afrique, et la Pologne accuse son voisin de les faire venir en délivrant des visas pour les mener ensuite directement à la frontière polonaise afin d’exercer de déstabiliser l’Union Européenne. Donald Tusk, ainsi que son homologue tchèque, réclame donc une politique européenne plus stricte sur l’immigration et une meilleure protection des frontières extérieures de l’UE, tout en demandant à Bruxelles de valider la suspension du droit d’asile, dont il considère que la Biélorussie profite pour exercer ses pressions sur l’Union Européenne.

Et est-ce que la Pologne pourrait vraiment instaurer cette suspension du droit d’asile ?

Justement cela semble être compliqué car le droit international impose aux États de garantir le droit d’asile. En exigeant l’aval de Bruxelles sur cette suspension, Donald Tusk souhaite en fait éviter des recours en justice face à sa mesure, selon le Daily Telegraph. Mais cela pourrait donc provoquer un conflit avec Bruxelles.

Pourtant Donald Tusk est un pro-européen de centre droit, qui a été élu face au PiS, le parti d’extrême-droite polonais, alors sortant dans le pays. Comment expliquer de telles mesures de sa part ?

Cela peut s’expliquer en partie par la demande forte des Polonais pour une politique migratoire plus stricte. Le journal espagnol El Pais souligne que, depuis son arrivée au pouvoir en 2023, Donald Tusk a poursuivi l’approche du gouvernement précédent. Il a notamment annoncé en mai dernier un investissement de 2,3 milliards d'euros pour renforcer sa frontière avec la Biélorussie. Les mesures proposées par ce dernier seraient même plus à droite que celles du PiS et celles-ci sont largement soutenues par l’opinion publique, même si cela a beaucoup déçu les militants polonais qui espéraient une rupture avec les politiques nationalistes du parti d’extrême droite.

Et la Pologne n’est pas le seul pays européen à revoir sa politique migratoire ?

Non, de nombreux pays européens souhaitent en effet resserrer la vis sur l’immigration illégale. C’est le cas de la France, de l’Italie, de l’Autriche, de la Suède, ou encore plus récemment du Danemark. Les dirigeants européens se rencontrent d’ailleurs cette semaine à Bruxelles et nul doute que ce sujet occupera une grande partie des discussions. En attendant, on s'interroge sur l’avenir de ce nouveau pacte migratoire européen qui doit normalement entrer en application en juin 2026.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.