Chaque semaine, Lyudmyla Tautiyeva nous propose un aperçu de ce qu'il se passe aux frontières de l'Union européenne, traitant de sujets divers tels que la gouvernance, l’entreprenariat, ou encore l'innovation.
Alors que l’Union européenne vit une rupture avec les États-Unis concernant la sécurité en Europe à la suite de la conférence de Munich, celle-ci doit également se mettre d’accord sur un possible élargissement avec l’intégration de l’Ukraine.
En effet, à l’ouverture des négociations avec l’Ukraine sur le premier cluster de sa feuille de route pour une adhésion à l’Union européenne, la Hongrie bloque le processus. C’est la vice-première ministre ukrainienne chargée de l’intégration européenne et ministre de la justice qui a confirmé ce blocage il y a quelques jours, alors que la Pologne, qui préside dans le Conseil de l’Union européenne pour les six premiers mois de 2025, souhaitait initier l’ouverture d’au moins deux clusters sur six dans les négociations avec l’Ukraine : ceux des fondamentaux et des relations extérieures.
Pourquoi l’ouverture des négociations sur le cluster des fondamentaux est-elle si importante ?
L’ouverture des négociations sur le cluster des fondamentaux marquerait le début des négociations sur l’intégration de l’Ukraine à l’Union européenne car ce cluster couvre l’État de droit et des valeurs sur lesquelles repose l’UE. C’est le premier cluster a être ouvert, et le dernier à être fermé. C’est lui qui rythme le reste des négociations.
Pour rappel, l’Ukraine doit montrer à travers 35 chapitres soumis à la négociation, représentant différents secteurs économiques, sociaux et politiques, ainsi que la conformité de sa législation avec celle de l’UE. Les 35 chapitres sont regroupés en six clusters, dont le premier est le cluster des principes fondamentaux.
Pourquoi et comment la Hongrie bloque-t-elle le début des négociations ?
La Pologne, qui préside le Conseil de l’Union européenne a présenté une lettre à l’Ukraine avec des conditions concernant l’ouverture des négociations pour le cluster des fondamentaux. Celle-ci contient notamment la préparation de feuilles de route dans le domaine de la réforme de l’État de droit et de l’administration publique. Ces conditions font partie de la procédure standard de l’Union européenne pour l’intégration de n’importe quel pays.
Avant de présenter cette lettre à l’Ukraine, le Conseil de l’Union européenne doit se prononcer à l’unanimité, et c’est là que la délégation hongroise s’oppose. La Hongrie de mande en effet le rajout d’une autre condition dans cette lettre : une feuille de route sur la protection des minorités. En effet, la Hongrie possède une importante minorité dans la région ukrainienne de la Transcarpathie, et utilise ses différends avec l’Ukraine à ce sujet comme un prétexte pour bloquer les négociations.
Ce blocage de la Hongrie intervient le jour où la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a déclaré lors de la conférence de Munich que l’Union européenne devait accélérer le processus d’adhésion de l’Ukraine.
Ce n’est pas la première fois que la Hongrie bloque une décision concernant l’Ukraine dans l’UE.
Effectivement, l’année dernière, la Hongrie a déjà bloqué l’aide de 50 milliards à l’Ukraine dans le cadre de Ukraine Facility. Ceux-ci ont pu être débloqués en échange de 10 milliards des fonds européens pour la Hongrie, argent qui avait été gelé par la Commission européenne à cause des entraves du pays contre l’État de droit.
On peut également se rappeler du blocage par le Président hongrois, Viktor Orban, concernant l’octroi du statut de pays candidat à l’Ukraine. Viktor Orban est cependant sorti lors du vote pour prendre un café avec le chancelier allemand Olaf Scholz.
Le président hongrois est par ailleurs connu pour ses relations avec le président russeVladimir Poutine, et surtout pour sa capacité à faire pression sur l’Union européenne afin de servir ses propres intérêts et ceux de la Russie, qui ne veut pas de l’Ukraine dans l’UE.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.