Connaissez-vous, chers auditeurs, la BEI, la Banque européenne d’investissement ? C’est une institution financière de l’Union européenne qui a été créée en 1958. Elle a plusieurs fonctions et se veut être la banque européenne du climat. Grégoire Chauvière Le Drian, le responsable de la BEI en France, nous donne plus de détails dans cette interview signée Euradio Paris.
Euradio : Expliquez-nous concrètement ce qu'est la BEI et pourquoi une telle institution existe.
Grégoire Chauvière Le Drian : La BEI, c'est la banque de l'Union européenne. C'est en quelque sorte notre banque puisque les actionnaires sont les États membres. Aujourd'hui, les 27 États membres définissent les choix d'investissements. C'est un projet financier qui est venu compléter le projet politique si singulier qu'est le projet européen défini par le traité de Rome. Les États fondateurs se sont dit au départ : "on va adosser, à côté de ce cette ambition politique ,une banque." C'est un élément financier qui va permettre de favoriser le financement de ce qu'on appelle la convergence des économies des différents États membres pour qu'on puisse investir sur les infrastructures de réseaux, sur les entreprises importantes pour l'UE qui représentent une dynamique et une priorité pour l'Union européenne. Aujourd'hui, la BEI, c'est la plus grande banque publique au monde. C'est une grosse mutuelle : les pays se mettent ensemble et se disent "on va lever de l'argent, c'est-à-dire, emprunter sur les marchés financiers de l'argent qu'on va se reprêter". Donc, on lève près de 70 milliards d'euros sur les marchés en émettant des émissions obligataires et on prête à des clients qu'on a du mal à appeler client parce que pour nous, ce sont des partenaires, qu'ils soient des collectivités territoriales, des entreprises, mais aussi des banques.
Euradio : Quelles sont les principales missions de la BEI ? On s'imagine que les objectifs de l'Union européenne s'inscrivent dans ces missions.
Grégoire Chauvière Le Drian : Tout à fait. On répond aux priorités qui sont définies par nos États membres et la Commission européenne. Aujourd'hui, on a quatre priorités fondamentales. Il y a le financement des infrastructures : comme favoriser les transports, l'électricité, l'eau etc. Naturellement, on va également financer les PME, notamment de manière intermédiaire par le biais de banques ou de fonds d'investissement qui investissent dans les entreprises en fonds propres. Le troisième axe, c'est l'innovation : garantir la compétitivité des entreprises et donc la compétitivité de l'Union européenne. A ce titre, on investit beaucoup aujourd'hui, notamment en France, dans ce qu'on appelle la Medtech, les biotechs et d'ailleurs la France est le premier bénéficiaire sur ce segment -là des financements de l'UE. Et enfin, dans le quatrième axe, je vais grouper : environnement, lutte contre le changement climatique, transition énergétique. C'est le plus important parce que depuis 4 ans nous avons pris une réforme stratégique importante.
Euradio : Quels sont vos objectifs, vos objectifs chiffrés, notamment pour atteindre cette volonté d'être la Banque européenne du climat ?
Grégoire Chauvière Le Drian : En 2019, nous avions pris trois engagements très forts en cohérence totale avec le Green New Deal. Le premier n'est pas chiffré : c'est l'exclusion de nos investissements des projets mobilisant des énergies fossiles. Aujourd'hui, ça paraît naturel mais en 2019, la BEI était la première banque publique ou privée à prendre une telle décision. Alors si on rentre un peu dans le détail, on va pouvoir faire du biogaz, par exemple et on a un seuil qui correspond au seuil qui est défini par la taxonomie, c'est-à-dire la définition au niveau européen par les experts, de ce qui peut être considéré comme vert ou pas. C'est une mesure très forte qui nous empêche d'aller financer des routes ou une extension d'aéroports dont le seul objet serait l'augmentation du trafic. Le deuxième engagement, c'est un engagement chiffré. L'objectif était de dire, nous sommes dans une transition énergétique, nous avons besoin de financements publics pour accélérer cette transition et le contexte géopolitique depuis le 24 février 2022 nous oblige à aller encore plus vite et encore plus loin dans cette transition énergétique pour s'affranchir d'une dépendance, notamment au gaz russe. Notre ambition est de consacrer plus de la moitié de nos financements à des projets à impact positif sur le climat. Au total, sur l'ensemble de l'Union européenne et une partie à l'extérieur de l'Union européenne, nous allons consacrer et nous consacrons déjà plus de 35 milliards d'euros de financement vers des projets à impact positif sur le climat. Ce qui fait de la BEI la plus grande banque verte au monde. Et enfin je dirais, que le troisième engagement, c'est de dire que au-delà de ces 50% d'engagement en faveur du climat, les autres 50% n'aient pas d'impact négatif. Et, il est à noter que cet engagement de 50%, on s'est engagé à le faire à horizon 2025.
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Entretien réalisé par Lou Surrans