Fréquence Europe

Directive sur le crédit aux consommateurs : quel impact sur le découvert bancaire ?

Photo de POURIA sur Unsplash Directive sur le crédit aux consommateurs : quel impact sur le découvert bancaire ?
Photo de POURIA sur Unsplash

Toutes les deux semaines sur euradio, retrouvez « Fréquence Europe », la chronique de Radio Judaïca et l’Europe Direct Strasbourg, présentée par Olivier Singer.

Aujourd’hui, on revient sur un sujet qui fait beaucoup réagir : Olivier, on entend dire que l’Europe aurait décidé d’interdire les découverts bancaires. Qu’en est-il vraiment ?


D’abord est c’est important de le préciser de suite : non, l’Union européenne n’interdit absolument pas les découverts bancaires

Ce que dit la nouvelle directive, adoptée en octobre 2023 par le parlement européen à Strasbourg, c’est simplement que le découvert est un crédit.
Et si c’est un crédit… eh bien il doit respecter les règles du crédit à la consommation :


  • plus de transparence,

  • plus d’informations,

  • et une évaluation de solvabilité de celui qui le sollicite.

Mais pourquoi l’Union européenne a-t-elle adopté une directive sur le crédit à la consommation ?

Parce que les petits crédits, les découverts glissants… mène parfois au surendettement.
La directive veut donc mieux protéger les consommateurs et mettre fin à certaines pratiques dans les services bancaires.

Et dans ce texte, l’Union européenne dit clairement que le découvert n’est pas un « service bancaire », c’est un crédit.
Donc il doit être encadré, surveillé et géré en tant que telle.

Mais alors Olivier, comment devrait s’appliquer ce texte en France ?

En général pour s’appliquer, une directive doit être transposer dans le droit national. La France a transposé cette directive par ordonnance, publiée le 3 septembre 2025. Les nouvelles règles entreront en application le 20 novembre 2026.

Mais attention dans le cas présent, la France n’a pas juste transposé la directive telle quelle, elle est même aller plus loin. 
Et c’est le cas pour le découvert par exemple, l’Europe ne fixait aucun seuil précis pour déterminer quand un découvert devait être analysé comme un crédit.
La France, elle, a choisi un seuil de 200 euros.

Donc au-delà de 200 € de découvert, les banques devront lancer tout le protocole d’examen comme pour une demande de crédit normale : vérification des revenus,
 incidents de paiement passés, taux d’endettement.

Donc c’est bien là que la controverse est née : cette idée que l’Europe serait en train de supprimer les découverts ?

Oui, et c’est là que c’est savoureux.
La directive a été adoptée à une large majorité au Parlement européen, avec le soutien… de presque tous les députés français, tous partis confondus.

Et aujourd’hui, certains expliquent qu’ils ‘découvrent’ les obligations du texte. 
Classique : on soutient à Bruxelles ou à Strasbourg et on s’indigne en France.


Concrètement, Olivier, qu’est-ce que cela devrait changer pour quelqu’un qui a besoin d’un découvert ?

Aujourd’hui, beaucoup de banques reconduisent le découvert sans se poser de questions.

À partir de novembre 2026 :
il ne devrait plus y avoir de de reconduction tacite sans examen,la banque devra formaliser un contrat avec : le taux, la durée, les conditions…

Mais cela ne veut pas dire qu’il faudra redemander son découvert chaque mois ou à chaque fois que l’on est en découvert, mais au moment de la demande initiale (par exemple l’ouverture d’un compte) il faudra passer par une vraie évaluation.

Et ça pourrait dire aussi que certains profils : étudiants, intérimaires, indépendants, pourraient avoir plus de difficultés à obtenir un découvert.

Et ceux qui ont déjà un découvert aujourd’hui ? Ils pourraient perdre leur autorisation ?

Non, les découverts déjà accordés restent en place.

La nouvelle règle s’applique uniquement :


  • aux nouveaux comptes
  • aux nouvelles demandes
  • ou aux autorisations renégociées après novembre 2026.

On a beaucoup parlé des découverts bancaires, mais y a-t-il d’autres éléments dans ce texte ?

Oui, cette directive pourrait entraîner la disparition des frais fixes prélevés par les banques à chaque dépassement de découvert. Lorsqu’un client est dans le rouge, la banque lui prête en réalité de l’argent. Comme pour tout crédit, il paie des intérêts, calculés selon le taux, le montant et la durée du découvert. Mais beaucoup de banques ajoutent des frais fixes, appelés « minimum forfaitaire d’intérêts », facturés chaque trimestre quel que soit le montant du découvert. Cette pratique très critiquée par les associations de consommateurs devrait être réduite grâce à la nouvelle règlementation 


Il devrait également y avoir du changement pour les petits crédits ?

Oui, jusqu’à présent, en dessous de 3 000 euros, il y avait peu de formalité bancaire tous les crédits seront désormais soumis aux mêmes règles afin d’éviter des pratiques trompeuses et des risques de surendettement.

Donc pour résumer : 
Non, le découvert n’est pas supprimé. Oui, les démarches seront plus strictes, mais cela pourrait réduire certains frais. Enfin on ne supprime pas le découvert. On l’encadre.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.