Le pape François a publié une nouvelle encyclique, appelée « Fratelli Tutti », en français, « Tous frères » ; en Hongrie, Viktor Orbán, le premier ministre hongrois, s’est lui exprimé de manière virulente sur la thématique des droits LGBT, suite à la publication d'un livre pour enfants édité par une association de défense des minorités ; le président américain Donald Trump, a récemment aidé le Kosovo et la Serbie à signer un accord de normalisation des relations économiques entre les deux pays.
Pour cette édition, tournons-nous vers le Vatican. Le pape François a publié une nouvelle encyclique, appelée « Fratelli Tutti », en français, « Tous frères ». François est premier pape issu du continent américain, d’Argentine plus précisément. Il se démarque régulièrement pour ses positions engagées, notamment sur le traitement des réfugiés ou sur l’environnement. Pouvez-vous d’abord nous rappeler ce qu’est une encyclique ?
Une encyclique est un texte traditionnellement destiné aux évêques, qui vont en transmettre le message aux croyants. Elle vise à exposer la position de l’Eglise catholique sur des thèmes précis. Le pape François a l’habitude d’adresser ce type de message même aux non-croyants. C’était déjà le cas pour sa première encyclique, appelée « Laudato Si », en français « Loué sois-tu ». Celle-ci dénonçait la dégradation de l’environnement et la société de consommation, et bien sûr, la place de la religion dans ce désordre.
Dimanche, le Vatican a donc publié ce texte qui traite la mondialisation. Quels sont les enseignements que le Pape François a voulu transmettre ?
Il s’agit du deuxième grand texte publié par le pape depuis son élection par les cardinaux en 2013. Le texte fait 90 pages, et aborde les nombreux écueils de la mondialisation, à savoir, le populisme, les réseaux sociaux, ou encore l’avenir de la planète, ce qu’il appelle notre maison commune. Il rejette également le monopole qu’ont l’économie et la finance sur la mondialisation, et prône une ouverture au monde plus spirituelle, ou en tous cas davantage basée sur des valeurs d’humanité.
Le texte s’intitule donc « Tous frères », car il met l’accent sur la fraternité entre les hommes et femmes et invitent à écarter les intérêts individuels. Tout le texte s’articule sur cette opposition entre intérêts communs et individuels. Dans ce cadre, il critique tant le populisme que le libéralisme débridé, qu’il considère tous deux comme basé sur le mépris des faibles. Il a notamment fustigé la théorie du ruissellement des richesses. Cette théorie qui considère que l’enrichissement des classes supérieures bénéficie aux classes plus pauvres par un effet de cascade. Théorie critiquée par la gauche car elle maintiendrait les classes inférieures dans la pauvreté.
Il a aussi évoqué le traitement des réfugiés n’est-ce pas ? Un sujet sur lequel il a pris des positions fortes.
Il s’est longuement attardé sur le traitement actuel des réfugiés, qu’il considère comme le symbole du manque de fraternité. Il a particulièrement critiqué les chrétiens qui font prévaloir leurs préférences politiques avant la dignité de chaque être humain, peu importe sa religion ou sa couleur de peau. Depuis 2015, plusieurs familles de réfugiés syriens ont été accueillies au Vatican, dont trois de confession musulmane.
Plus récemment, il s’est fait remarquer pour sa prise de position sur l’homosexualité. Il a déclaré à une activiste pour les droits LGBT que, je cite, « l’Eglise aime vos enfants tels qu’ils sont ».
Dirigeons-nous maintenant vers la Hongrie. Viktor Orbán, le premier ministre hongrois, s’est lui exprimé de manière virulente sur la thématique des droits LGBT. En cause, un livre pour enfants publié par une association de défense des minorités.
Tout à fait. Il s’agit d’un manuel publié par une association de défense des droits LGBT qui transforme les contes pour enfants en remplaçant les héros par des membres de minorités que ce soit la communauté homosexuelle, la communauté rom, ou des personnes à mobilité réduite. Par exemple, dans l’une des histoires, le chevalier qui pourfend un dragon, est transgenre. Le but de l’association est de montrer la diversité de la société.
La publication de ce manuel a créé un tollé. Une organisation de société civile a exigé que le livre soit retiré des étalages, et Dora Duro, une femme politique d’extrême-droite a même déchiré une page du livre lors d’une conférence presse. Le premier ministre hongrois, Viktor Orbán a demandé à ce qu’on laisse les enfants hongrois tranquilles. Du fait de cette bronca, le livre est devenu un véritable succès de librairie.
Ces réactions s’inscrivent dans les politiques anti-démocratiques menées par Viktor Orbán depuis 2010. Il dénonce de manière particulièrement violente l’Union européenne et proclame ouvertement son « illibéralisme ».
En effet, et suite au succès électoral de son parti aux législatives hongroises de 2018, il a lancé ce qu’il a appelé une « nouvelle ère culturelle ». Il met l’accent sur des valeurs qu’il dit chrétiennes Depuis lors, le monde de la culture fait l’objet de nombreuses critiques pour être trop à gauche, ou trop libéral, ou pour avoir critiqué le gouvernement.
Concernant la question du genre, les universités hongroises ont vu les différents départements sur le sujet supprimés. En mai dernier, les autorités hongroises avaient déjà retiré la possibilité de se définir légalement comme transgenre.
Pendant ce temps-là, la Belgique vient de faire entrer la première femme transgenre d’Europe dans son nouveau gouvernement sans que cela ne crée de difficulté !
Terminons par le Kosovo, le président américain Donald Trump, a récemment aidé le Kosovo et la Serbie à signer un accord de normalisation des relations économiques entre les deux pays. Je rappelle que le Kosovo a fait sécession de la Serbie en 2008, au grand dam de Belgrade. Même si les relations entre les deux pays se sont améliorées sous l’égide de l’Union européenne, elles restent aujourd’hui limitées. Le soutien de Trump au réchauffement des relations a eu des conséquences inattendues, n’est-ce pas ?
Tout à fait, il s’agit là d’une information difficile à croire. L’envoyé spécial américain, Richard Grenell, a fait une proposition particulière concernant un lac situé à la frontière le Kosovo et la Serbie. Il a émis l’idée que le lac Ujman en kosovar ou Gazivode en Serbe, soit renommé « Lac Trump ». Ce serait à l’origine une plaisanterie mais le premier ministre Kosovar, Avdullah Hoti, s’est déclaré ouvert à l’idée, ce qui n’a pas manqué de surprendre la classe politique kosovare. Néanmoins, aucune procédure ne semble enclenchée.
Cette boutade masque l’importance cruciale de ce lac qui constitue un important enjeu de dispute entre le Kosovo et la Serbie. Pour les deux pays, il s’agit de la source principale d’eau potable pour presque deux millions de Kosovars. Il sert aussi à refroidir les centrales de charbon qui alimentent le Kosovo en électricité.
Victor D'Anethan - Thomas Kox