Aujourd’hui en Europe

Aujourd'hui en Europe - 8 octobre 2025

Emmanuel Macron doit maintenant choisir : démissionner, dissoudre ou cohabiter (Philippe Magoni /AP) Aujourd'hui en Europe - 8 octobre 2025
Emmanuel Macron doit maintenant choisir : démissionner, dissoudre ou cohabiter (Philippe Magoni /AP)

Aujourd'hui en Europe est un journal consacré aux actualités européennes du jour, réalisé par la rédaction d'Euradio à Bruxelles. Avec Thomas Kox, Baptiste Maisonnave, Paul Thorineau et Ulrich Huygevelde.

Au programme : 

  • En France, un Président sans Premier ministre inquiète l’Europe
  • L’Europe veut participer à l’organe international de transition pour Gaza
  • L’acier, une ressource que l’Europe veut protéger à tout prix

On commence ce journal à Paris, où la récente démission du Premier ministre Sébastien Lecornu a attisé la crise politique, dont les répercussions se ressentent dans toute l’Europe. 

Oui, la situation politique que connaît la deuxième économie de l’UE ne peut pas ne pas avoir de répercussions hors des frontières. Le Premier ministre démissionnaire avait jusqu’à mercredi pour mener “d’ultimes négociations” à la demande du Président Emmanuel Macron, qui se retrouve maintenant face à trois options : démissionner, dissoudre l’assemblée, à nouveau, ou nommer un nouveau Premier ministre issu d’un nouveau groupe politique, ce qui reviendrait à une cohabitation. 

Cette première option, la démission - bien qu’improbable - est souhaitée par une bonne partie du spectre politique français. A l’extrême gauche, le coordinateur de la France Insoumise Emmanuel Bompard a clairement demandé le départ d’Emmanuel Macron, je cite, “que ce soit par une démission ou une destitution”. 

Même le parti Horizons d'Édouard Philippe, pourtant macroniste de la première heure, a également demandé au Président d’organiser une élection présidentielle anticipée.

Marine Le Pen n’a pas appelé à sa démission, mais elle a précisé que ce serait une “sage” décision. 

Quelle que soit l’issue, la crise politique alimente déjà l’incertitude des marchés, à l’échelle européenne. 

Oui, car il reste la question non résolue du vote du budget de l’Etat en France. En théorie, il devait être présenté au conseil des ministres mardi, et déposé à l’Assemblée nationale “au plus tard le 13 octobre”. Il doit donc être finalisé et voté avant le 31 décembre, comme le prévoit la Constitution qui donne 70 jours au Parlement pour en débattre. 

Cet agenda est maintenant bousculé par le départ de Sébastien Lecornu - une situation qui implique généralement une croissance légèrement plus faible et des déficits budgétaires plus élevés. 

En cas de dégradation de la situation, la Banque centrale européenne garde cependant en main des cartes pour soutenir l’économie française et européenne, notamment via l’Instrument de protection de la transmission. Un outil qui lui permet d’acheter des obligations de pays confrontés, “à des tensions injustifiées sur le marché”. La France ne remplit pas encore tous les critères, mais semble s’en rapprocher.

Et chaque jour d’incertitude politique augmente l’incertitude économique et les acteurs du monde de l’entreprise appellent à un déblocage de la situation politique.

Oui, mais ce n’est pas gagné. La France est dirigée depuis un mois par un gouvernement démissionnaire, et vit depuis seize mois une intense crise politique. Selon l’Observatoire Français des Conjonctures économiques, cette crise amorcée en juin 2024 coûtera à la France 0,5% point de croissance d’ici la fin 2025.

On continue ce journal en se penchant sur le nouveau projet de la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas : intégrer l’Europe à l’organe international de transition pour Gaza. 

Oui, souvenez-vous, dans le plan de paix proposé par Donald Trump, un des vingt points consiste à établir un organe de pouvoir international, baptisé “Comité de la paix”. Il prendrait la place du Hamas. Le plan a été soumis au Hamas, au Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, mais il n’implique pas les Européens. 

En ce début de semaine, et lors d’une visite au Koweït, la cheffe de la diplomatie européenne a demandé à ce que la situation évolue. “Nous estimons que l’Europe a un rôle important et que nous devrions également faire partie de” ce Comité de la paix.

Où en est l’Europe dans le soutien à la Palestine et l’actuelle négociation de paix à Gaza ? 

L’UE est déjà le principal bailleur de fonds de l’aide humanitaire aux Palestiniens, que ce soit par la distribution directe de ressources ou par les projets de développements menés sur place. Elle doit maintenant dépasser ce rôle de “payeur” souligne la cheffe de la diplomatie européenne, et devenir un “acteur”.

L’UE revendique un rôle politique accru à la hauteur de son implication financière. Rappelons que selon le texte, discuté depuis lundi par Israël et le Hamas en Egypte par voie indirecte, l’administration de la bande de Gaza devrait être confiée à des “technocrates” indépendants, chargés d’assurer la gestion des services publics et des municipalités pour la population. 

Benyamin Netanyahou ne cache pas ses réticences à voir l’UE s’impliquer dans le processus.

Oui dans une interview accordée au média Euronews, le Premier ministre israélien ne s’est pas gardé de fustiger l’Europe, qui a, selon lui, “fondamentalement cédé au terrorisme palestinien et aux minorités islamistes radicales”. Par rapport au plan proposé par Donald Trump, il considère l’Europe comme “hors jeu” et faisant preuve d’une “immense faiblesse”.

Les dernières interventions européennes ont grandement tendu les relations avec Israël : que ce soit la reconnaissance de la Palestine lors de l’Assemblée générale de l'ONU, ou le soutien, plus ou moins proche, de la flottille humanitaire en direction de Gaza. 

On termine ce journal en s’intéressant à un autre sujet d’importance pour l’Union européenne : l’acier. La Commission a dévoilé mardi des mesures sans précédent pour protéger son marché dans le domaine face à la Chine, extrêmement compétitive. 

Oui, et parmi les mesures les plus marquantes, on retrouve l’objectif de réduire “de moitié” les quotas d’acier pouvant être importés dans l’UE chaque année sans payer de droits de douane. Le vice-président exécutif pour la prospérité et la stratégie industrielle de la Commission, Stéphane Séjourné, entend ainsi doubler les taxes sur les importations dépassant ce quota. Rien n’est cependant encore fait pour l’instant et la proposition doit encore être validée par les 27 et le Parlement européen.

L’Union européenne suit une dynamique amorcée par le Canada et les Etats Unis, qui ont eux aussi mis en place des droits de douane très importants dans le domaine. Des négociations sont d’ailleurs en cours avec Washington pour exempter le métal européen des droits de douane américain.

Un plan protectionniste et un projet d'alliance pour lutter contre la menace de la Chine.

Oui, car, pour reprendre les mots de Stéphane Séjourné, “l’industrie sidérurgique européenne était au bord de l’effondrement”. Entre une transition écologique coûteuse, une baisse de la demande et des prix chinois particulièrement compétitifs, c’est la survie du secteur qui est en jeu. En Europe, en 2024, 18 000 emplois du secteur de l’acier ont été supprimés au sein de l’Union. 

Ces mesures protectionnistes, si elles permettent de sauver le secteur, ont bien sûr un prix. Stéphane Séjourné chiffre ce “prix de la souveraineté” à 50 euros en plus par voiture, 1 euro par machine à laver, pour une hausse de 3% en moyenne.

Un journal de Baptiste Maisonnave, Ulrich Huygevelde et Paul Thorineau.