Eurominute d'Euan Walker

Annulation du défilé du « Régiment immortel » - Élections en Turquie

Natalia Kolesnikova - AFP Annulation du défilé du « Régiment immortel » - Élections en Turquie
Natalia Kolesnikova - AFP

Euan Walker est chargé de missions internationales à Mines Paris – PSL et assistant de recherche et d’enseignement à l’ESSEC. Diplômé en histoire et en sciences politiques de Durham University et de la Ruprecht-Karls Universität Heidelberg, il poursuit actuellement un master en économie et politique publique à l'ESCP. Ses analyses sont publiées sur la page Europe Info Hebdo.

Cette semaine, Euan Walker et Laurence Aubron discutent de l'annulation du défilé du "Régiment immortel" en Russie et des prochaines élections générales en Turquie.

Pour en revenir à l'actualité européenne de la semaine, la Journée de l'Europe s'est déroulée le 9 mai...

Absolument, alors que l'Union européenne célébrait le 73e anniversaire de la signature du Traité Schuman, la Russie célébrait son "Jour de la Victoire" qui sert à commémorer la défaite du nazisme tout en agissant comme une démonstration de la force militaire du pays. Cependant, un an et trois mois après le début de la guerre en Ukraine, le ton des défilés de cette année était nettement plus morose que d’habitude.

En quoi les célébrations du 9 mai 2023 en Russie sont-elles différentes des précédentes ?

L'absence du défilé du "Régiment immortel" a été particulièrement remarquée cette année - à l'occasion de ces défilés de la victoire, les Russes sont généralement invités à défiler avec les portraits de leurs proches tombés pendant la Seconde Guerre mondiale. Plusieurs analystes comprennent implicitement que ce rituel particulier a été évité par crainte que les civils russes ne portent aussi les portraits de membres de leur famille tués dans la guerre contre l'Ukraine signalant ainsi un affaiblissement symbolique de la force russe. En effet, cette lutte pour le pouvoir symbolique dans le conflit actuel est évidente - alors que le Kremlin travaille sans relâche pour maintenir l'image de sa force militaire, Zelenskyi a déclaré cette semaine que l'Ukraine souhaitait changer sa date de commémoration de la Seconde Guerre mondiale au 8 mai, s'alignant ainsi davantage sur ses alliés occidentaux et laissant éventuellement la place pour sa future célébration de la Journée de l’Europe les 9 mai à venir…

Enfin, le premier tour des élections générales turques aura lieu à la fin de cette semaine...

Absolument, le dimanche 14 mai, la Turquie organisera des élections générales qui pourraient s'avérer décisives, Erdogan étant confronté pour la première fois à une menace sérieuse par Kemal Kilicdaroglu et son bloc d'opposition. Si l'on en croit les sondages, le leader social-démocrate du Parti républicain du peuple pourrait évincer Erdogan et marquer une nouvelle ère pour la Turquie.

Comment le discours de campagne en faveur de la réélection d'Erdogan à la présidence et de son parti majoritaire à l'Assemblée répond-il à cette perte de vitesse ?

Eh bien, Laurence, à l'approche de ce premier tour de la présidentielle et des législatives, Erdogan n'a pas hésité à adopter un ton de plus en plus belliqueux à l'égard de l'opposition. Il se présente au-delà comme le seul leader capable de mener la Turquie vers l'autosuffisance, notamment en matière d'énergie. Cependant, ces promesses dissimulent certaines tendances inquiétantes qui ne font qu'accroître les enjeux de cette élection.

En quoi les promesses de suffisance énergétique d'Erdogan sont-elles préoccupantes ?

Les promesses de suffisance énergétique du président turc Erdogan, y compris l'annonce récente de la gratuité du gaz naturel pour les ménages pendant un an, ont fait l’objet d’un avertissement par plusieurs analystes. En effet, ils estiment que ce discours sur l'indépendance énergétique est en fait une couverture pour la dépendance croissante de la Turquie à l'égard de la Russie pour le gaz, ce qui pourrait permettre à Moscou de blanchir et de ré-étiqueter son gaz comme étant turc ainsi facilitant sa vente en Europe. Il serait alors plus difficile pour les acheteur·euses européen·nes de faire la différence entre le gaz russe et les autres fournisseurs, ce qui pourrait placer la Turquie dans le collimateur de l'UE. L'équipe d'Europe Info Hebdo suivra donc cette élection de près et je serai de retour très bientôt pour discuter de ses conséquences une fois les scrutins terminés.

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Entretien réalisé par Laurence Aubron.