Quentin Dickinson, avez-vous passé une bonne semaine ?
Oui, si l’on oublie le durcissement sécuritaire et centralisateur de l’économie qu’annonce la réélection, pour un troisième quinquennat, du dirigeant chinois Xi Jinping.
Pour le reste, il y a le sérieux et il y a le vaudeville.
Le sérieux, c’est la décision unilatérale de l’Allemagne de plafonner le prix du gaz payé par les entreprises comme par les ménages (on en déjà parlé ici) qui, de façon croissante, irrite la plupart des autres pays de l’UE, lesquels n’ont pas les moyens de consacrer d’un coup 8 % de leur richesse nationale pour soutenir leurs consommateurs – 8 % du PIB, c’est ce que représentent les 200 milliards que Berlin s’apprête à décaisser. Ici à Bruxelles, on s’inquiète déjà de la distorsion que cette initiative risque d’infliger au marché unique européen.
Le vaudeville – si peu de temps après le spectacle de fastes de fierté, et de dignité qui a entouré la disparition de la reine d’Angleterre – c’est la navrante saga à rebonds des débuts de Liz Truss au 10, Downing Street. Comme le faisait observer avec une ironie cruelle un de ses opposants politiques (pourtant membre de son propre Parti conservateur), « Liz va voir la Reine, le lendemain, la Reine meurt. Liz fait annoncer son budget au Parlement, le lendemain, les investisseurs fuient et la Livre s’effondre ».
Le résultat, c’est le congédiement immédiat du Chancelier de l’Échiquier, une succession de virages à 180 degrés qui réduisent à zéro le programme économique sur lequel Mme Truss avait été élue par les 160.000 membres de son parti, mais que les milieux économiques et financiers – sans compter une nette majorité de l’opinion – tiennent pour pure folie.
Le tout nouveau Chancelier, Jeremy Hunt, rassure les marchés et s’emploie activement à inventer un programme pour l’économie qui n’a plus grand chose à voir avec celui de Mme Truss. Cette nomination d’un homme à l’impeccable carrière ministérielle (dont on murmure déjà à Westminster qu’il est le véritable Premier ministre) permet à Liz Truss de gagner du temps (un peu) et de perdre de l’autorité (beaucoup).
Et qu’avez-vous retenu pour nous, Quentin Dickinson, de ce qui s’annonce cette semaine ?
Elle aura commencé, cette semaine, par le Conseil des vingt-sept ministres des Affaires étrangères de l’UE (le CAÉ, dans le jargon d’ici), dont l’essentiel du menu se compose des relations avec la Chine, de la préparation de la COP-27 en Égypte, à Charm-el-Cheikh, et de la guerre en Ukraine.
Sur ce dernier sujet, j’ai noté la récente et invraisemblable déclaration du Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, lequel a soutenu, devant un auditoire berlinois médusé, que "l’unique espoir pour la paix en Ukraine [s’appelait] Donald Trump".
Et quelques données statistiques européennes sont attendues cette semaine ?
Oui, vous connaîtrez le taux d’inflation dans l’Union européenne mercredi et, deux jours après, la mesure de confiance des consommateurs européens, des chiffres qui ne devraient réjouir personne.
Entre les deux, jeudi, ce sont les chefs d’État et de gouvernement de l’UE qui se réunissent ici au sommet ; sans surprise, on causera énergie et Ukraine, et l’on aura un débat sur la forme que doit désormais prendre la concurrence européenne avec la Chine du renouvelé Xi Jinping.
Ce n’est pas vraiment fréquent dans cette chronique, mais vous tenez exceptionnellement à nous parler de sport ?
Oui, enfin du sport dans sa version judiciaire, tendance qui est devenue très populaire ces derniers temps. Cela se passe cette semaine en Espagne, où, sur le banc d’infamie se retrouvent deux grands clubs de football (Barcelone et Santos) ainsi que le joueur-vedette Neymar Da Silva Santos Júnior, connu jusqu’ici pour avoir giflé un spectateur et pour soutenir la réélection du Président Bolsonaro dans son pays d’origine, le Brésil ; à ces aimables vertus, voilà que la justice espagnole l’inculpe de fraude et de corruption. Le sport, il n’y a que ça de vrai.
Quelques brèves pour conclure, Quentin Dickinson
Dimanche, les Slovènes élisent leur futur Président de la République (c’est le premier tour, le second tombe le 13 novembre). Le sortant, Bohut Pahor, ayant servi pendant deux mandats, ne peut se représenter. L’ancien ministre des Affaires étrangères Anže Logar, de centre-droit, part favori face à six autres candidats, dont la présidente verte de la Croix-Rouge.
Ce mardi, les Azerbaïdjanais fêtent leur Journée nationale de la Restauration de l’Indépendance (c’est le nouveau nom de leur fêtnat’).
Enfin, le même jour, un anniversaire qui nous tient beaucoup à cœur, ici à euradio : du haut de nos quinze années d’existence, nous tenons à saluer nos confrères de la BBC. Ce mardi, donc, la British Broadcasting Corporation a exactement cent ans. Champagne !
Entretien réalisé par Laurence Aubron