Retrouvez chaque semaine la semainière de Quentin Dickinson sur euradio. L'occasion de découvrir la diplomatie et l'actualité européenne sous un nouvel angle.
Alors, Quentin Dickinson , avez-vous passé une bonne semaine ?...
À peu près, étant donné que j’ai studieusement évité de perdre mon temps à prendre connaissance de l’opinion de personnes, hautement auto-qualifiées pour disserter sur des événements sur lesquels elles n’ont aucunement prise. Je vous éviterai donc moi-même cette stérile entreprise.
Alors, parlons de choses plus concrètes.
…à commencer par ?...
…à commencer, par exemple, par les rapports tendus (et de façon croissante) entre la Chine, l’Union européenne, et, plus généralement, le G7, le club des démocraties les plus prospères de la planète.
Dire que le comportement de PÉKIN, ouvertement hostile aux pays occidentaux, est sévèrement jugé par ceux-ci serait encore en-dessous du vrai : dans le communiqué final du Sommet des chefs d’État et de gouvernement du G7, tenu dans les salons d’un luxueux établissement des Pouilles, le nom de la Chine apparaît pas moins de vingt-huit fois – et jamais pour en dire du bien. Jugez du réquisitoire : les cyberattaques ; le piétinement des règles du commerce international ; les incidents délibérés en Mer de Chine ; le soutien à l’effort de guerre de la Russie.
Mais, pendant ce temps à BXL, on s’occupait aussi de la Chine…
…et de belle manière. Échaudés par l’exemple des panneaux solaires chinois, déversés à perte sur le marché européen, la Commission européenne avait mené une enquête approfondie sur les coûts réels de fabrication en Chine des voitures électriques. Sur la base des révélations du rapport d’enquête, la Commission a conclu à la mise en œuvre d’une politique délibérée de subventions publiques à l’industrie automobile chinoise ; du coup, les taxes à l’importation en Europe de ces véhicules seront augmentés de 17,4 % à 38,1 %, selon les constructeurs – or, comme les taxes étaient déjà à 10 % pour tout véhicule électrique chinois, au moins l’un des constructeurs sera frappé de près de 50 %. On est loin des 100 % qu’imposent les États-Unis, mais le geste des Européens révèle une tendance affirmée à la fermeté. En attendant la conclusion, à l’automne, de négociations Europe-Chine, les importateurs européens doivent placer sur un compte bloqué le montant des taxes de l’UE…qu’on leur restituera si lesdites négociations aboutissent favorablement pour les Européens.
Revenons un instant au Sommet du G7 : c’était au tour de l’Italie de le présider, et donc à Giorgia MELONI d’être à la manœuvre, c’est cela ?...
En effet. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que la lune de miel de Mme MELONI avec ses principaux homologues est bel et bien terminée.
Par exemple, sur l’inclusion d’un paragraphe sur le droit de toute femme à l’IVG qu’elle entendait atténuer, elle a sidéré Joe BIDEN et agacé Emmanuel MACRON et Olaf SCHOLZ, ce dernier qui a certainement dû penser qu’on lui faisait là un bien curieux cadeau pour ses soixante-six ans, anniversaire qui tombait pendant la réunion (le même jour d’ailleurs que Donald TRUMP - rien à voir, mais juste pour dire).
De même, les manœuvres de Mme MELONI pour reporter le choix des futurs dirigeants des principales institutions de l’UE au-delà des législatives anticipées en France ont été tout aussi mal reçues.
Enfin, les vidéos de soirées des jeunes de Fratelli d’Italia, le parti de Mme MELONI, en train d’entonner les chants de marche des squadristes, de hurler le nom du Duce, et de pratiquer le salut et les signes de reconnaissance mussoliniens en présence de l’eurodéputé Nicola PROCACCINI, vice-président du parti, ont achevé de ternir l’humeur.
Et ce n’est pas tout, Quentin Dickinson …
Non. La Commission européenne publie chaque année un rapport circonstancié sur l’état de la liberté des médias dans l’UE, et celui sur 2023, à paraître prochainement, est accablant pour l’Italie depuis l’arrivée il y a deux ans de Giorgia MELONI : tentatives répétées d’amener à sa botte l’audiovisuel public, et recours fréquent aux procédures en diffamation abusives, destinées à décourager les journalistes en raison des frais d’avocat occasionnés par ces procédures.
Pas une note un peu positive, cette semaine ?...
Si, quand même : c’est le choix du chef du gouvernement finlandais pour le poste de commissaire européen qui revient à son pays. Ce sera la compétente et souriante eurodéputée de centre-droit, membre du PPE, Henna VIRKKUNEN, pour laquelle il souhaite un portefeuille lié à la défense ou à la concurrence.
On se console comme on peut.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron