La semainière de Quentin Dickinson

La semainière de Quentin Dickinson

© European Union 2024 - Source : EP - Philippe BUISSIN La semainière de Quentin Dickinson
© European Union 2024 - Source : EP - Philippe BUISSIN

Retrouvez chaque semaine la semainière de Quentin Dickinson sur euradio. L'occasion de découvrir la diplomatie et l'actualité européenne sous un nouvel angle.

Alors, Quentin Dickinson, avez-vous passé une bonne semaine ?...

Je me suis surtout penché sur la trajectoire personnelle de plusieurs acteurs de la scène politique en Europe.

Vous voulez commencer par qui ?...

…par (presque) le moins connu du lot : le Premier ministre néerlandais désigné, Dick SCHOOF. Après d’interminables négociations au sein de l’improbable coalition qui s’étend du centre-droit libéral aux national-populistes (en intégrant au passage le parti agraire), le célèbre tribun peroxydé et islamophobe Geert WILDERS aura finalement renoncé au poste de chef de gouvernement pour lui-même, alors que les présidents des autres partis de ladite coalition ont parallèlement choisi de ne pas siéger eux-mêmes au gouvernement. C’est dire si celui-ci sera formé de seconds couteaux sous la surveillance étroite de sourcilleuses belles-mères.

Et c’est là que M. WILDERS a sorti, à l’étonnement général, le nom de Dick SCHOOF.

Et si vous nous dressiez le portrait de l’intéressé ?...

Si vous insistez. M. SCHOOF (dont le nom se traduit en français par gerbe) est un haut-fonctionnaire du Ministère de l’Intérieur, âgé de soixante-sept ans, et qui a dirigé le service de répression de l’immigration clandestine avant d’être promu Directeur national du Renseignement. Signes particuliers : cet homme au visage sévèrement ascétique est un redoutable marathonien, qui – plus étonnamment – a milité précédemment au Parti travailliste.

Et votre projecteur s’est porté ensuite sur qui ?...

Sur Ursula von der LEYEN, qui joue ces jours-ci son maintien dans les fonctions de Présidente de la Commission européenne. Elle doit pour cela séduire deux publics bien distincts : d’abord, le Conseil européen, composé des vingt-sept chefs d’État et de gouvernement ; ensuite, une majorité simple des futurs 720 députés européens, donc, faites le calcul, cela fait au minimum 351 voix à trouver.

Si les trois groupes parlementaires modérés et pro-européens qui normalement devraient la soutenir le font effectivement, pas de problème, on devrait être (selon les sondages) aux alentours des 390 voix. Mais voilà : c’était déjà sur ce raisonnement qu’elle avait misé il y a cinq ans, et, pour finir, elle aura été élue à une minuscule majorité de neuf voix. Cette fois-ci, assez clivante, elle aura bien été désignée candidate de son parti paneuropéen, le PPE, mais avec près de 20 % des délégués qui ont voté contre elle, dont les Français de LR. Au Parlement européen, le groupe centriste-libéral RENEW se méfie du rapprochement de Mme von der LEYEN avec Giorgia MELONI ; et les Verts lui reprochent de vouloir diluer le Pacte vert européen pour se concilier les bonnes grâces supposées du monde rural. Donc, pour Ursula, c’est loin d’être gagné.

Un pronostic, Quentin Dickinson ?...

La situation étant encore plus complexe que d’habitude, la sagesse dicterait de reporter à la rentrée de septembre le choix du Numéro Un de la Commission européenne – après tout, le mandat de Mme von der LEYEN n’expire qu’à la fin de l’année.

D’ici-là, le mercato se sera un peu décanté autour des autres postes de premier plan, à la tête des institutions de l’Union européenne, Emmanuel MACRON et Olav SCHOLZ auront clarifié leurs positions respectives (ou commune) et on ne sera plus en période électorale.

Justement, quels sont les candidatures à ces postes-là ?...

Aucune (évidemment !) n’est, à l’heure qu’il est, officiellement déclarée ; mais l’ancien patron de la Banque centrale européenne et ancien chef du gouvernement italien Mario DRAGHI serait intéressé par la présidence du Conseil européen, tout comme l’est l’ancien Premier ministre portugais António COSTA. Le Ministre polonais des Affaires étrangères Radosław SIKORSKI se verrait bien chef de la diplomatie de l’UE, et l’actuelle Présidente du Parlement européen, Roberta METSOLA, se succéderait bien à elle-même. Mais – vous vous en doutez – cette liste n’est absolument ni définitive, ni limitative.

Et une dernière personnalité de la semaine, Quentin Dickinson ?...

Elle sera encore moins connue que Dick SCHOOF : il s’agit de Halla TÓMASDÓTTIR, élue Présidente de la République islandaise devant deux autres femmes, dont l’ancienne Première ministre Katrín JAKOBSDÓTTIR. Cette dynamique femme d’affaires remporte la présidentielle à sa seconde tentative ; jusqu’ici, une seule femme aura occupé ce poste. Mme TÓMASDÓTTIR succédera à l’actuel Président, Guðni JÓHANNESSON, le 1er août prochain.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron