Retrouvez chaque semaine la semainière de Quentin Dickinson sur euradio. L'occasion de découvrir la diplomatie et l'actualité européenne sous un nouvel angle.
Alors, Quentin Dickinson, avez-vous passé une bonne semaine ?...
Plutôt, oui, en cette période en tout cas non-dénuée de majesté. Ainsi, mardi dernier, SAR le Grand-Duc de Luxembourg a-t-il confié officiellement une partie de ses responsabilités constitutionnelles à son fils aîné Guillaume, Prince héritier, qui a prêté serment devant la Chambre des Députés. Cette tradition n’est pas récente : c’est la cinquième fois dans l’histoire du pays qu’un souverain luxembourgeois choisit en quelque sorte de déléguer à son héritier la pratique du rôle qui sera un jour le sien. D’ailleurs, Henri, le Grand-Duc actuel, avait connu ce même sort à l’initiative de son père, Jean, qui lui-même avait été lieutenant-représentant (c’est la désignation de la fonction) de sa mère, la Grande-Duchesse Charlotte.
Ce système est assez astucieux, puisqu’il permet d’assurer la continuité de la dynastie dans l’ordre monarchique, tout en évitant les à-coups d’un décès en fonctions et en garantissant une double-commande de transition bien utile. La durée de la lieutenance n’est pas fixée, mais les plus récentes étaient de deux ou trois ans. Finalement, comme tout un chacun, un monarque doit bien avoir droit à la retraite. Dernier détail : au Luxembourg, après l’abdication, on ne conserve pas son titre de Grand-Duc, on redevient prince – contrairement aux voisins belges, qui ont actuellement deux rois, dont évidemment un seul règne effectivement, alors que l’autre est une espèce de monarque honoraire.
Mais l’actualité princière ne s’arrête pas ces jours-ci à cet événement…
Non certes, car en ce début de semaine, la France aura reçu en visite d’État (c’est le niveau le plus élevé des visites officielles) LLMM le Roi et la Reine des Belges, au cours d’un séjour de trois jours à PARIS, à CHANTILLY, et à LILLE. Entre la France et la Belgique, qui partagent une longue histoire ainsi que 620 kilomètres de frontière commune, les objectifs des rencontres sont culturels et académiques autant que diplomatiques et économiques. Pour être complet, signalons que Philippe et Mathilde sont accompagnés du Premier ministre Alexander de CROO, d’un Vice-Premier ministre, et de la Ministre des Affaires étrangères, mais aussi des Ministres-présidents de la Flandre, de la Wallonie, de Bruxelles-Capitale, et de la Communauté française de Belgique.
Pour expliquer les rôles impartis à ces responsables régionaux ou linguistiques dans le millefeuille institutionnel belge, il m’y faudrait consacrer une chronique tout entière ; donc, pour aujourd’hui, restons-en là.
Sur tout autre chose, Quentin Dickinson, le Parlement européen était en réunion plénière à STRASBOURG…
… où l’on attendait le chef du gouvernement hongrois, Viktor ORBÁN, en sa qualité (si l’on peut dire) de représentant du pays exerçant la présidence tournante semestrielle du Conseil des ministres de l’UE (à l’exception des Conseils Affaires étrangères et de l’Euro).
Et comment cela s’est-il passé ?...
Comme il fallait s’y attendre, c’est-à-dire mal, brutalement mal.
Avant toute chose, M. ORBÁN s’est payé un tour de chauffe à l’occasion d’une interminable conférence de presse (deux heures trente, un record ici), histoire de démontrer toute la considération qu’il porte aux journalistes (à l’exception de ceux de son pays, pourrait-on préciser). L’habituelle autosatisfaction était au rendez-vous : « Mon pays est très stable, parce que nous avons un pouvoir fort » a-t-il affirmé, sans oublier d’ajouter « contrairement à la France et à l’Allemagne ».
Viktor ORBÁN s’est aussi exprimé sur les élections présidentielles aux États-Unis…
…surtout pour redire toute la communauté de pensée et de destin qu’il affirme partager avec Donald TRUMP : « Si TRUMP gagne », assure-t-il, « c’est plusieurs bouteilles de champagne que j’ouvrirais ». Mais c’est dans l’hémicycle que Viktor ORBÁN s’est pris de plein fouet les critiques nombreuses à son égard de la part de la Présidente de la Commission européenne, Ursula von der LEYEN.
Quels sont donc les reproches qu’elle a formulés ?...
D’abord son amicale complicité avec Vladimir POUTINE et sa proximité avec XI Jinping, ainsi que sa tournée, notamment à MOSCOU et à PÉKIN, soi-disant pour négocier le retour de la paix en Ukraine, tout en laissant entendre que cette démarche lui avait été demandée par les autres gouvernements de l’UE, ce qui fait encore hurler dans les chancelleries. Autre reproche (parmi bien d’autres) : le caractère corrompu de son entourage, famille et amis, bénéficiaires notamment du détournement de fonds européens.
On notera les prises de parole d’un autre Hongrois, Péter MAGYAR, depuis peu élu au Parlement européen. Cet ancien compagnon de route d’ORBÁN est aujourd’hui son adversaire le plus virulent, et son parti grimpe dangereusement – dangereusement, s’entend, pour le parti FIDESZ de M. ORBÁN.
Un entretien réalisé par Laurent Pététain.