L’idée défendue par Valérie Pécresse est qu’il faudrait ériger des garde-fous constitutionnels pour conserver la suprématie du droit français sur certaines normes européennes. L’idée est de mettre en place un “mécanisme de sauvegarde des intérêts supérieurs de la France” ou un “bouclier constitutionnel” pour que nos lois constitutionnelles “priment sur la juridiction européenne”. Or, ces garde-fous existent déjà en droit interne.
Dans un avis du 16 mai 2018, le Conseil d’État a par exemple estimé qu’un règlement européen qui imposerait à la France le placement automatique d’un demandeur d’asile dans un pays tiers supposé sûr, sans même un examen au fond de son dossier, serait inconstitutionnel. Le Conseil constitutionnel vient d’identifier pour la première fois dans une décision QPC du 15 octobre 2021 un principe inhérent à l’identité constitutionnelle de la France, celui selon lequel les activités de police ne peuvent pas être confiées à des personnes privées. Le Conseil constitutionnel rappelle ainsi l’obligation du législateur de respecter ce principe, y compris lorsqu’il met en œuvre le droit de l’Union européenne. Cela signifie que la Constitution s’impose déjà au droit de l’Union européenne, mais seulement en ce qu’elle a de plus souverain, à savoir “l’identité constitutionnelle de la France”. Le droit français n’est donc pas dépourvu de moyens pour protéger sa souveraineté nationale. Il restera à savoir ce qu’on met dans cette “identité constitutionnelle”. Or on sait que Valérie Pécresse souhaite y mettre la politique migratoire en modifiant la Constitution. Il faudra attendre de voir, éventuellement, ce qu’en dira le Conseil constitutionnel, mais aussi la Cour de justice de l’Union européenne. Précisons que modifier la Constitution en insérant la politique migratoire dans l’identité constitutionnelle de la France n’est pas en soi contraire au droit de l’Union. C’est l’application qui en sera faite qui pourrait poser problème.
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