La chronique des consommateurs européens avec Elphège Tignel (Centre Européen des Consommateurs France).
Elphège, vous revenez aujourd’hui sur deux textes votés récemment au Parlement européen et qui s’attaquent aux géants du numérique.
Plus de 20 ans après la directive sur le commerce électronique, l’Europe passe la vitesse supérieure pour réguler Internet. Deux textes viennent d’être adoptés au Parlement européen. Et selon les dires du commissaire européen au marché intérieur, Thierry Breton, ils ont pour objectif de « reprendre le contrôle sur les géants du Web ».
Ces textes, DMA et DSA, entendent réguler respectivement les marchés et les services numériques. Ils s’attaquent donc aux grandes sociétés du numérique, les Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft bien sûr mais aussi aux plateformes de partage de vidéos et de musique comme YouTube ou Spotify, aux grands sites de réservation touristique comme Airbnb, aux « App Store » et autres réseaux sociaux ou marketplaces.
On fait le point aujourd’hui sur ce que ces textes pourraient concrètement changer dans le marché numérique européen dans les années à venir.
Tout d’abord Elphège, qu’est-ce que ces textes veulent imposer ou interdire aux GAFAM et autres grandes sociétés du numérique ?
Ces textes européens veulent encadrer les activités des géants du numérique pour permettre notamment l’émergence de nouveaux acteurs sur le marché.
Ils souhaitent aussi responsabiliser les hébergeurs et autres réseaux sociaux sur ce qu’ils diffusent.
Le DSA et DMA proposent donc d’imposer de nouvelles obligations et interdictions aux grandes sociétés du numérique.
À titre d’exemple, elles ne pourront plus favoriser l’accès à leurs propres produits et services ou exploiter les données des entreprises qui les utilisent pour les concurrencer. Elles ne pourront plus empêcher les utilisateurs de désinstaller des logiciels ou des applications préinstallées sur un ordinateur, un téléphone ou une tablette. Elles devront également rendre public leurs algorithmes qui influencent le comportement des consommateurs. Et enfin, pour lutter contre la vente de produits illicites et dangereux, elles devront mieux tracer les vendeurs en ligne, et empêcher les entreprises frauduleuses d’utiliser leurs services.
Les sociétés qui ne rempliraient pas ces nouvelles obligations risqueraient gros ! Les amendes pourront aller jusqu’à 10 % de leur chiffre d’affaires mondial.
Et concrètement, quels impacts ces textes vont-ils avoir sur nous, consommateurs ?
Nous allons pouvoir mieux contrôler ce que nous voyons en ligne : éviter les contenus personnalisés dans notre fil d’actu, les vidéos suggérées ou les publicités ciblées par exemple. Nous disposerons également d’informations claires sur la manière dont nos données pourraient être monétisées.
Nous pourrons aussi signaler facilement les contenus, les biens ou les services illicites. Et une fois ce signalement effectué, les plateformes devront alors être réactives. Pour ne pas voir leur responsabilité engagée, elles devront rapidement retirer les contenus homophobes, racistes, pornographiques , ou désactiver l’accès aux produits illégaux ou à risques.
Et enfin Elphège, quelles sont les prochaines étapes avant l’application de ces textes ?
Après le vote au Parlement en décembre de la législation sur les marchés numériques et l’adoption le 20 janvier de celle sur les services numériques, c’est à présent au Conseil européen de se prononcer. Une fois les discussions terminées, les députés européens devront voter sur l'accord final, et ensuite la législation devra être appliquée dans les pays de l’UE.
La France, qui assure la présidence du Conseil de l'UE jusqu’au 30 juin, souhaiterait boucler le dossier avant la fin de son mandat. Mission… compliquée pour une Europe pourtant pressée de s’attaquer aux géants du numérique et de (je cite) « rendre illégal en ligne, ce qui est illégal hors ligne ».
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