L'éco de Marc Tempelman

Les banques et leurs intérêts

Les banques et leurs intérêts

Chaque semaine, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.

De quoi allons-nous parler aujourd’hui ?

Depuis le début de l’année, nous avons régulièrement échangé sur l’inflation et la remontée des taux que la Banque Centrale Européenne a déclenché afin de l’endiguer. Cette hausse des taux a eu des effets immédiats sur les emprunts immobiliers et les crédits à la consommation, dont les tarifs ont augmenté. Mais cette remontée générale des taux d’intérêts n’a pas que des effets négatifs.

Bonne nouvelle pour nos auditeur·rices, quels sont les effets bénéfiques de la remontée des taux ?

La hausse des taux impacte le coût de financement des banques. Elles qui pouvaient emprunter à des taux nuls ou très proches de zéro sur les marchés financiers, doivent à nouveau payer des coupons de plusieurs pourcents sur les obligations qu’elles émettent. Mais les banques se financent également en attirant des dépôts. Vos dépôts. Et cette ressource est donc redevenue intéressante pour elles d’un point de vue économique.

Vous dites que les banques se financent de deux manières. En collectant nos dépôts et en se finançant sur les marchés financiers. Comme le coût de la seconde option s’est envolé, elles sont prêtes à faire de plus grands efforts pour attirer nos liquidités ?

Exactement. La situation a évolué de telle sorte qu’il est devenu intéressant pour elles d’augmenter les intérêts qu’elles versent sur les livrets d’épargne. Car les dépôts, des particulier·es comme des entreprises d’ailleurs sont à nouveau une ressource attractive.

De quel type d’ajustement à la hausse s’agit-il ?

Alors, nous n’en sommes qu’au début et - dans l’ensemble - on ne peut parler que d’un frémissement. Selon la Banque de France, la rémunération des dépôts des ménages s’est accrue de 0,77% en juillet, pour atteindre les 1,12% en août. Mais cette hausse est largement attribuable à la montée du taux du Livret A, dont le taux a été porté à 2% depuis le 1er août. Sur les livrets d’épargne “ordinaires”, le taux d’intérêt moyen est passé de 0,09% à ... 0,17%. Pas de quoi sauter au plafond, je vous l’accorde.

Oui, surtout que l’inflation dépasse les 6%. Mais alors pourquoi vous estimez que cette évolution, positive certes, mais encore très modeste, mérite une chronique ?

Parce que dans le cas présent, l’arbre cache un peu la forêt. Derrière cette faible hausse du taux moyen se cachent d’importants écarts. Les grandes enseignes bancaires - BNPParibas, les Caisses d’Épargne, la Société Générale, le Crédit Agricole n’ont pas vraiment ajusté leurs offres sur leurs livrets d’épargne destinés aux particulier·es. La rémunération dépasse à peine 0%. Et c’est normal. Ces grands réseaux bancaires bénéficient d’une grande notoriété. Ensemble, ils collectent la très grande majorité des dépôts des Français·es. Et l’inertie dans le domaine bancaire reste encore très grande.

Je sens un “mais” ?

Oui, parce que les banques spécialisées, moins connues du grand public car ne disposant pas d’agences à tous les coins de rue, ont plus augmenté les taux d’intérêts qu’elles versent de façon bien plus significative. Certaines versent dorénavant 3% pendant plusieurs mois, suivi d’un taux qui se rapproche des 1%.

Qu’est-ce qui explique cet écart important par rapport à ce que versent les grandes banques traditionnelles ?

La raison principale est que ces banques n’ont pas le même modèle, ni la même organisation. Les banques spécialisées, comme My Money Bank ou RCI Banque, sont focalisées sur une ligne d’activité principale, typiquement le crédit. Pour faire leur métier, elles n’ont pas besoin d’un réseau d’agences bancaires. Mais sans agences physiques, elles se coupent d’un canal naturel de collecte de dépôts. Et d’un moyen de se faire connaître. Pour surmonter ce manque de notoriété et arriver à attirer les dépôts dont elles ont besoin, elles n’ont pas vraiment d’autre choix que de payer des taux d’intérêts plus attractifs que les grandes banques.

La hausse des taux a donc creusé l’écart entre les différentes types de banque, en matière de rémunération de livrets ?

C’est exactement ça. Il est à nouveau intéressant de faire son marché, afin de faire travailler l’épargne liquide au meilleur taux possible.

Chronique réalisée par Laurence Aubron.