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Les pronostics pour 2026

Photo de Kanchanara sur Unsplash Les pronostics pour 2026
Photo de Kanchanara sur Unsplash

Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.

Nous accueillons Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’investissement gratuite Cashbee. Nous discutons toutes les semaines de finance. Bonjour Marc.

Nous sommes arrivés à la période de l’année où les experts des banques d’affaires publient leurs anticipations pour l’année à venir. Que prévoient les analystes pour la bourse en 2026 ?

Oui, après une nouvelle année où les indices boursiers finissent l’année dans le vert, le message dominant pour 2026 semble être “ce sera encore une année positive, mais moins spectaculaire ». Les grandes banques et maisons d’analyse voient en moyenne les grands indices mondiaux progresser en 2026, avec une hausse de l’ordre de 8 à 12% pour les actions américaines, et des performances positives mais un peu plus modestes en Europe et au Japon. L’idée, c’est que la dynamique portée en 2025 par l’intelligence artificielle, le recul progressif de l’inflation et la perspective de baisses de taux pourrait continuer de soutenir les marchés, même si le rythme devrait ralentir.​

Qu’est-ce qui alimente cet optimisme ? On parle beaucoup de l’IA et des baisses de taux, mais concrètement, qu’est-ce qui pousse les analystes à viser encore des plus hauts ?

Il y a trois grands piliers. D’abord, la croissance des bénéfices : plusieurs banques et gérants anticipent une progression solide des profits des entreprises, notamment dans la tech, l’industrialisation de l’IA mais aussi certains secteurs cycliques. Ensuite, ils croient au scénario de « soft landing », c’est-à-dire sur une économie mondiale qui ralentit mais ne tombe pas en récession, avec des banques centrales qui peuvent desserrer un peu l’étau monétaire sans perdre le contrôle de l’inflation. Enfin, la diffusion de l’IA : après le “tout pour quelques méga-cap comme Nvidia”, de plus en plus de recherches prévoient un élargissement de l’application de l’IA pour générer des gains de productivité dans les secteurs de l’infrastructure, l’industrie et les valeurs liées à la transition énergétique.​

On a parfois l’impression que ce scénario « tout va bien, mais un peu moins vite » ressemble à celui de l’an dernier… Les analystes n’ont-ils pas tendance à être systématiquement trop optimistes ?

Historiquement, oui, les prévisions de fin d’année sont souvent teintées d’optimisme. Les stratèges actions préfèrent rarement annoncer une année de baisse dès le départ. Les études sur le long terme montrent que les objectifs de cours agrégés sous-estiment la probabilité réelle de corrections ou de marchés plats, parce qu’ils partent d’un scénario «moyen» où tout se passe raisonnablement bien. D’ailleurs, une récente enquête auprès des stratégistes actions, montre que plus de la moitié d’entre eux jugent tout de même probable une correction significative à court ou moyen terme.​

Justement, parlons des nuages. Quels sont les principaux risques qui pourraient faire mentir ce scénario haussier ?

Le premier risque, c’est la valorisation. Après plusieurs années de hausse, en particulier aux États-Unis, les multiples de certaines grandes valeurs technologiques se rapprochent de niveaux qui rappellent, sans les copier exactement, l’ambiance de la bulle internet. Si le récit autour de l’IA est remis en question – parce que les gains de productivité tardent ou que la monétisation déçoit – une correction sur ces leaders pourrait entraîner tout le marché.​

Deuxième risque : la politique monétaire et l’inflation. Une partie de l’optimisme s’appuie sur l’hypothèse de plusieurs baisses de taux supplémentaires d’ici fin 2026. Si l’inflation se révèle plus tenace que prévue, les marchés pourraient être déçus par un rythme de baisse de taux plus lent, voire par une pause prolongée.​

Troisième bloc de risques : géopolitique et commerce mondial. Les analyses macro récentes insistent sur le fait que les tensions commerciales, les guerres, la fragmentation des chaînes de valeur et les élections majeures peuvent créer des chocs sur les marges des entreprises et sur la confiance des investisseurs. Le consensus intègre une partie de ces risques, mais par définition, les vrais « accidents » ne sont jamais dans les scénarios centraux.​

Si l’on se place du point de vue d’un investisseur particulier qui écoute ces prévisions, que doit-il en retenir pour 2026 ?

D’abord, que le consensus penche plutôt pour des marchés en hausse, mais avec des rendements plus modestes et plus volatils que ces dernières années. Autrement dit, il ne faut pas compter sur une répétition automatique des performances de 2024–2025. Ensuite, que les scénarios « trop beaux » reposent sur plusieurs conditions simultanées : désinflation maîtrisée, croissance correcte, pas de choc géopolitique majeur, IA qui livre sur ses promesses sans casser la confiance.​

Enfin – et c’est peut-être le plus important – ces prévisions sont un input, pas un GPS : un investisseur prudent devrait continuer à diversifier, éviter les concentrations excessives sur quelques thèmes « à la mode », et garder une marge de sécurité dans son allocation. Comme toujours, le risque ne vient pas seulement de ce que le consensus voit… mais de ce qu’il ne voit pas. 

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.