Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.
Marc, de quoi allons-nous parler aujourd'hui ?
Je suis ravi de vous retrouver pour une nouvelle saison d’échanges sur l’actualité financière. Et pour bien la commencer, je vous propose de parler du coup du siècle que semble avoir réalisé la banque suisse UBS il y a quelques mois, lorsqu'elle a racheté sa rivale Crédit Suisse en urgence, et à la casse.
Rappelez-les nous les faits, car de mémoire Crédit Suisse était en très mauvaise posture, avant d’être rachetée par son voisin.
Il faut remonter au printemps. Plusieurs banques régionales américaines, dont la Silicon Valley Bank, font faillite. Les investisseurs se méfient de plus en plus du secteur bancaire, et notamment de celles qui paraissent les plus faibles, les plus exposées aux risques, bref, celles qui pourraient être les prochaines à tomber.
Crédit Suisse, pourtant vieille de 167 ans, devient alors une cible. La banque est systématiquement citée dans les gros scandales financiers. Elle perd des milliards lorsque le fonds d’investissement Archegos fait faillite. Ses équipes sont condamnées pour avoir blanchi de l’argent de la mafia bulgare …
Tous les facteurs sont réunis pour que les clients et les actionnaires perdent confiance en la banque. Le cours de bourse chute tout autant que les encours confiés par la clientèle fortunée.
C’est alors que le régulateur suisse est intervenu pour forcer la fusion avec UBS n’est-ce pas ?
Oui, tout s’est fait en un weekend au mois de mars. La banque centrale helvète voit bien la situation se détériorer et craint une crise financière. Le vendredi après-midi, elle convoque le patron d’UBS, qui a littéralement deux heures pour se présenter dans leurs locaux. Et qui arrive avec une feuille A4 sur laquelle sont énumérées les 11 conditions qu’UBS estime nécessaires pour reprendre son voisin en détresse.
Parce que chez UBS, cela faisait des mois qu’une petite équipe d’experts travaillait sur ce scénario !
J’imagine que dans une telle situation de stress, UBS a pu extraire des conditions très favorables pour elle.
Oui absolument. UBS est la seule banque sur les rangs. Elle obtient des garanties en liquidité et de protection contre d’éventuelles futures pertes de la part de l’État Suisse. Pile je gagne, face je ne perds pas.
Le prix est très bas. Crédit Suisse part pour 3,4 milliards de dollars, soit moins du dixième de ce qu’elle valait deux ans plus tôt.
Et on peut donc déjà parler du coup du siècle ?
Probablement. Car pour nous ramener à l’actualité, UBS vient de publier ses résultats pour le second trimestre. Avec du retard, car il était complexe d’intégrer comptablement le Crédit Suisse. Et à cette occasion, UBS annonce des profits de plus de 29 milliards de dollars pour le seul second trimestre. Un record absolu pour une banque. Pour vous donner le contexte, le record précédent pour des bénéfices trimestriels appartenait à JP Morgan, qui avait gagné 14,3 milliards de dollars au 1er trimestre de 2021.
Ce profit impressionnant est surtout le résultat du gain comptable qu’UBS comptabilise sur son acquisition du Crédit Suisse. Car en excluant l’impact de cette opération, la banque n’enregistre qu’un gain avant impôts d’un peu plus d’un milliard de dollars.
Le mot de la fin ?
Je pense que nous parlerons encore longtemps de cette acquisition, unique par sa taille, sa rapidité et son contexte. L’intégration des équipes, des systèmes informatiques et des activités sera difficile, mais les actionnaires d’UBS peuvent commencer à se frotter les mains. Le cours de bourse d’UBS s’est envolé.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.