L'éco de Marc Tempelman

Les dividendes à la lumière du Covid : l'édito de Marc Tempelman

Les dividendes à la lumière du Covid : l'édito de Marc Tempelman

Nous accueillons Marc Tempelman, un des co-fondateurs de la FinTech Cashbee, qui aide les Européens à épargner plus et mieux, via son application d’épargne simple et sécurisée. Nous discutons toutes les semaines de finance. Bonjour Marc, de quoi allons-nous parler aujourd’hui ?

Bonjour Simon. Le début du printemps est typiquement la période de l’année à laquelle les sociétés cotées en bourse déclarent et versent leurs dividendes. Cette année elles seront bien moins nombreuses à le faire, à cause de la pandémie du COVID 19. Et comme cela va directement affecter les actionnaires, dont les fameux petits porteurs, qui comptent sur ces dividendes pour vivre, je pensais qu’il était intéressant de se pencher sur cette question.

Il est peut-être utile de nous rappeler brièvement ce que sont ces fameuses dividendes.

Bien sûr. Le dividende est la somme versée par une société à ses actionnaires et qui représente typiquement un pourcentage des profits réalisés l’année précédente. Son montant est proposé par le Conseil d’Administration et voté par les actionnaires. Si l’on voit bien que ce montant dépend de la performance de la société et qu’il peut varier d’une année à l’autre, pour certaines grandes entreprises, dont les activités sont très stables et prédictibles, le dividende l’est également. Depuis le début du siècle, Solvay, Unilever et Philips par exemple ont versé chaque année un dividende égal ou supérieur à l’année précédente.

On peut donc s’habituer à ces versements réguliers.

Oui et c’est d’ailleurs ce qui se passe. Bon nombre de gérants ont constitué des fonds uniquement d’entreprises qui se distinguent par la régularité de leurs dividendes, qui incluent des grandes banques comme HSBC ou ING, les constructeurs automobiles comme Volkswagen ou Daimler, ou encore des sociétés du luxe comme Hermès. Ces fonds sont très prisés par certaines catégories d’investisseurs, qui privilégient les revenus réguliers que leur procurent ces dividendes, au potentiel de hausse des cours des actions. On peut penser aux fondations ou les retraités par exemple, qui souhaitent ainsi s’assurer de revenus réguliers et relativement certains…. Avec l’accent sur « relativement ».

En quoi le COVID-19 a changé la donne ?

De plusieurs façons. Tout d’abord, il faut admettre que la performance de la plupart de ces grands groupes en 2019 a été plutôt bonne voire excellente, et ne justifie donc pas de réduire les dividendes versés en 2020 au titre de l’exercice dernier. Cependant, les perspectives futures sont beaucoup moins roses. Et toute équipe dirigeante se doit donc de se poser la question s’il ne vaudrait pas mieux préserver les profits de l’année dernière, afin de pouvoir faire face à un ralentissement potentiellement brutal de l’activité.

A cette réflexion, qui est plutôt d’ordre purement financier, viennent s’ajouter des facteurs externes qui sont plutôt d’ordre politique et moral.

J’imagine que ça ne doit pas être facile de distribuer de l’argent aux actionnaires alors que votre personnel souffre.

Oui, et ça l’est encore moins si votre société bénéficie d’une des diverses formes d’aide financière que les États ont mis en place pour vous aider à faire face à la crise. D’ailleurs les gouvernements ont bien clarifié que toute entreprise souhaitant bénéficier d’une de ces mesures d’aide financière doit interrompre le versement de dividendes à ses actionnaires. 

Nous constatons donc un grand écart sur le sujet des dividendes cette année, avec d’un côté les sociétés qui ont décidé de maintenir leurs dividendes, comme McDonald’s, Allianz ou encore JP Morgan et d’autres qui ont décidé de les réduire, comme Hermès ou la société BIC, afin de faire contribuer leurs actionnaires au coût de l’effort qu’elles font pour aider à la sortie de crise. Enfin, il y a celles qui ont décidé de les éliminer, soit de façon spontanée et par mesure de préservation de capital dans un contexte économique incertain, comme par exemple Airbus, Ford, Boeing ou encore Marks & Spencer, soit sous la pression des pouvoirs publics.

Parce que les autorités sont intervenues pour encourager certaines entreprises à couper leurs dividendes ?

Absolument, et c’est notamment le cas dans le secteur bancaire où la BCE et la Banque Centrale du Royaume-Uni ont exprimé leur souhait très ferme de voir les grandes banques suspendre leurs dividendes. Et cela pour renforcer les niveaux de capital des banques et leur donner tous les moyens pour venir au secours des entreprises qui auraient besoin de prêts pour survivre à la crise. Et cela a eu l’effet escompté, avec la suspension des dividendes par toutes les grandes banques de la place.