Comme tous les lundis, les Jeunes européens de Strasbourg reviennent sur un des sujets qui ont fait la Une de la presse européenne. Ce lundi 21 mars 2022, Johanna Schwartz nous parle du dernier rapport du GIEC.
Bonjour Johanna.
Bonjour Wyloën. Puisqu’on parle de sujets qui ont fait la Une des journaux ces derniers temps, mon esprit de contradiction n’a pas pu s’empêcher de vouloir faire les choses différemment : écrire une chronique sur un sujet qui n’a PAS fait la Une, mais qui, selon mon humble avis, AURAIT DÛ faire la Une, tant le sujet est grave et urgentissime.
Certains journaux comme Mediapart ou Le Monde ont eu la présence d’esprit d’en parler le jour de sa parution, le 28 février dernier. Je vous parle du nouveau rapport du GIEC, ce Groupe Intergouvernemental des Experts sur l'évolution du Climat qui rassemble 270 scientifiques de 67 pays du monde. Niveau crédibilité, je pense qu’on est bon.
Au vu des récentes actualités - je pense évidemment au bombardement des villes ukrainiennes par la Russie - il faut dire que le rapport du GIEC a été inondé sous les infos, tel Dunkerque d’ici 2100 si on continue à ignorer les sonnettes d’alarmes que nous envoient les scientifiques.
Cependant, beaucoup de journalistes et de figures politiques, dont le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, ont déclaré que ce rapport décrit la situation climatique planétaire comme plus critique que jamais.
Ce rapport du GIEC s’inscrit dans le 2e volet des rapports sur le climat fait par cette communauté d’expert(e)s. Le premier volet, sorti en 2014, abordait le sujet sous l’angle de la compréhension physique du changement climatique et les politiques avaient réagi en organisant la fameuse COP21, en 2015, à Paris.
Et cette fois, le nouveau rapport insiste davantage sur les inégalités engendrées par le dérèglement climatique.
Effectivement, ce nouveau rapport tente d’éveiller les esprits pour passer à l’action et mettre en œuvre tous les moyens politiques possibles pour amortir le choc climatique que nous allons subir dans les prochaines décennies.
Les experts le disent eux-mêmes, les risques climatiques exacerbent les inégalités : “(...) les causes profondes de la vulnérabilité de certaines populations sont en partie liées aux contextes politiques, économiques et sociaux, à la fois présents mais aussi hérités”.
Ce rapport est particulier puisqu’il parle de la nécessité d’une justice climatique qui va de paire avec une plus grande justice sociale puisque, cela va sans dire, nous ne sommes pas tous égaux face aux risques du dérèglement climatique actuel.
Quand je dis “pas tous égaux”, je tiens à rappeler quelques proportions : il a été prouvé que 10 % de la population était responsable de 50 % des émissions de GES mondiales. Ces 10 % sont donc les principaux acteurs possibles pour sauver ce qu’il reste à sauver de notre biodiversité et de notre planète de manière générale.
Un autre chiffre a retenu mon attention dans ce rapport : 3,3 à 3,6 millions de personnes vivent actuellement dans un contexte très vulnérable au réchauffement climatique. Rien que ça.
Les experts du groupe appellent donc à une action politique urgente, seul moyen d’activer le levier de la “résilience climatique”. Moyens restés jusque-là insuffisants, notamment suite aux accords de Glasgow en 2021 lors de la COP 26. Un doublement des budgets pour lutter contre le réchauffement climatique avait été exigé, mais cela n’a pas été respecté par les États.
Et les conséquences de cette inaction sont multiples.
Tout à fait. On a déjà pu observer le déclin de la biodiversité, aussi bien terrestre que marine, mais on a aussi vu les maladies liées à l’alimentation ou à l’eau augmenter. La fréquence et l'intensité des sécheresse, des inondations et des canicules a également augmenté, tout comme les famines et le manque d’eau.
Autre conséquence, cette fois sur le plan de la santé mentale. On observe une montée de l’anxiété et du stress liés à des traumatismes, par exemple suite à la perte de logement due à des catastrophes naturelles.
Enfin, conséquence économique, le dérèglement climatique a un impact sur le pouvoir d’achat : on est forcément moins productif quand on travaille sous 50 degrés. Moins de rendement donc moins d’argent pour les foyers alors que les prix, eux, continuent d’augmenter.
Face à ce constat, les experts du GIEC nous avertissent : “sans action, il y aura 216 millions de réfugiés climatiques en 2050”.
Oui, alors déjà que c’est la panique quand on a plus de 2 millions de réfugiés qui arrivent d'Ukraine, imaginez ce problème, multiplié par 100. Ça ne fait pas rêver, hein ?
Mais rassurez-vous, dans la 2e partie du rapport, il est expliqué qu’il nous reste encore une petite chance pour limiter la casse et endiguer les catastrophes à venir. D’ailleurs, en parlant de digue, le GIEC dans ce rapport a précisé que la construction de digues était une des fausses bonnes idées à entreprendre pour éviter les catastrophes naturelles. Cela ne fait que retarder le problème de la montée des eaux et mettre encore plus en danger les populations qui vivent dans les zones côtières à risque, comme Dunkerque ou Calais.
Le journal web officiel de l’ONU, News UN, résume cela en une phrase : “le GIEC insiste sur l’urgence d’une action climatique axée sur l’équité et la justice. Un financement adéquat, le transfert de technologies, l’engagement politique et le partenariat permettent une adaptation au changement climatique et une réduction des émissions plus efficaces.”
Il ne manque donc plus que tout cela soit mis en place par les acteurs qui en ont le pouvoir.
Oui. Et au risque de paraître alarmiste, je conclurai ma chronique par les mots de Hans-Otto Pörtner, un des experts du GIEC : « Les preuves scientifiques sont sans équivoque : le changement climatique constitue une menace pour le bien-être humain et la santé de la planète. Tout nouveau retard dans l’action mondiale concertée fera passer à côté d’une fenêtre brève et qui se referme rapidement pour assurer un avenir vivable ».
Alors, Mesdames et Messieurs les politiques, vous savez ce qu’il vous reste à faire.
Cordialement.