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Entre les plateformes et l’Europe : le courant passe ! - La Chronique des Jeunes Européens

Entre les plateformes et l’Europe : le courant passe ! - La Chronique des Jeunes Européens

Chaque mois, les Jeunes Européens de Strasbourg analysent un élément d'actualité européenne.

Pour cette édition, Kylian Rochetin détaille au micro de Romain L'Hostis de l'état du numérique en Europe. Selon l’Insee, plus de 90% des européens ont accès à internet. Ainsi, le numérique est omniprésent dans tous les aspects de nos vies, mais l’accès au réseau nécessite souvent de fournir des données personnelles. Comment ces données sont-elles utilisées ? Que met en place l'Union européenne pour protéger les utilisateurs du numérique ?

Kylian : En ce qui concerne le numérique, on entend régulièrement le commissaire européen au marché intérieur Thierry Breton s’exprimer concernant les différentes réglementations des plateformes numériques. Par plateformes numériques, il faut entendre ici la très grande majorité des sites web qui fournissent un service, une information ou qui permettent d’effectuer des achats en ligne.

Romain : Mais alors justement, qu’est-ce qu’une donnée personnelle ?  

K. : La CNIL, qui est l’institution chargée d’assurer la protection des données personnelles des consommateurs, définit ces dernières comme toute information relative à une personne physique identifiée ou identifiable. Ainsi, on considère qu’un nom, un prénom, une adresse, une image de la personne, etc. est une donnée personnelle.

R. : Et en quoi ces données sont-elles importantes pour les plateformes, Quelle utilisation est faite de ces données lorsqu'un utilisateur les transmet à un site internet ?

K. : Tout d’abord, il faut savoir qu’il existe différentes façons de collecter les données. D’une part, lorsque un internaute remplit un formulaire demandant de communiquer des informations personnelles, ou encore en acceptant les « cookies » pour accéder à un site internet. D’autre part, lorsque des partenaires commerciaux récupèrent les données auparavant communiquées. La collecte de ces données va permettre aux plateformes numériques de proposer des services personnalisés, notamment à travers des publicités ciblées. Cependant, l’ampleur du phénomène fait que des dérives apparaissent, notamment lorsque ces données sont utilisées ou revendues pour servir des intérêts privés ou politiques.

R. : C’est-à-dire ? Comment ces données peuvent-elles être utilisées à mauvais escient ? 

K. : Et bien, le principal reproche qui est fait aux plateformes numériques est le manque de transparence. Ainsi, des données dites “sensibles” des consommateurs sont prélevées sans que ceux-ci puissent ensuite connaître leur utilisation. Par exemple, en 2018, le New York Times avait révélé que la société britannique Cambridge Analytica avait collecté les données de millions d’utilisateurs de Facebook, sans leur consentement et les avait ensuite réutilisé à des fins privés. 

R. : Alors que fait l’Union européenne pour protéger les consommateurs dans le secteur du numérique ?

K. : Les institutions européennes, telles que le Parlement et la Commission européenne, souhaitent éviter un abus de position de la part de ces entreprises digitales. En 2018, le RGPD (règlement général sur la protection des données), est ainsi entré en vigueur. Ce règlement permet aux internautes de demander à la plateforme collectant les données de communiquer toutes les informations se rapportant à l’usage, la transmission et la conservation des données. 

R. : Ce texte impose donc une plus grande transparence de la part des plateformes. Pour autant, cela n'empêche pas les données de continuer à être échangées et transmises. Les données restent hors du contrôle de leur détenteur initial.

K. : Et bien le RGPD va au-delà, puisque même transmises, ces données restent accessibles à l’utilisateur qui le demande. Il peut ainsi demander la rectification ou l’effacement de ses données, ou refuser que celles-ci soient ensuite échangées. En outre, si aucune demande n’est faite par l’internaute, la plateforme ne peut pas stocker indéfiniment les données collectées, une durée de conservation est prévue selon la situation visée.

R. : Aujourd’hui, quel constat peut-on faire sur ce règlement ? Est-il efficace pour obliger les entreprises du numérique à adopter un usage conforme des données collectées ?

K. : Il semble que ce règlement constitue une contrainte significative pour les plateformes numériques, comme en témoigne une sanction infligée à la société Meta par la Data Protection Commission, le régulateur irlandais. En effet, cette autorité indépendante équivalent de la CNIL, a condamné cette année le groupe américain à une amende de 1,2 milliard d'euros pour non respect du RGPD. Le cas n’est pas le seul : Amazon ou Tik Tok ont aussi été sanctionnées. En attendant de savoir si ces sanctions feront changer le comportement de ces grands groupes, l’Union européenne, de son côté, entreprend de créer un marché unique des données. Ainsi, d'autres règlements tels que le DSA, DMA ou Data governance Act sont entrés en vigueur. La question cruciale est de savoir si ces textes seront suffisants pour protéger les droits des internautes tout en favorisant le développement du marché numérique en Europe. 

Emission réalisée par Kylian Rochetin.

Animation : Romain L'Hostis.