Quoi de neuf en Europe ?

Quoi de neuf en Europe ? - Nils Gamlin

© European Commission - Europa.eu Quoi de neuf en Europe ? - Nils Gamlin
© European Commission - Europa.eu

Chaque semaine sur euradio, Perspective Europe, l'association du master "Affaires européennes" de Sciences Po Bordeaux, revient sur l'actualité bruxelloise et européenne. 

Bonjour Nils, alors dites-moi, quoi de neuf à Bruxelles ?

Bonjour ! Cette semaine, la Commission européenne a présenté sa Boussole de compétitivité, un plan destiné à renforcer l’innovation, la productivité et l’indépendance industrielle de l’UE. Il s’inspire largement du rapport de Mario Draghi, qui cherche à stimuler la croissance européenne en modernisant son économie et en renforçant sa compétitivité face aux États-Unis et à la Chine.

Justement, on parle beaucoup du rapport Draghi. Quelle est la différence entre sa vision et cette Boussole de compétitivité ?

Draghi proposait une stratégie audacieuse avec trois grands axes :

1. Créer un environnement plus favorable aux entreprises, en allégeant la bureaucratie.

2. Développer une politique industrielle ambitieuse, notamment pour les technologies propres et les secteurs stratégiques.

3. Lancer un vaste plan d’investissement public, financé par un endettement commun de l’UE.

Mais la Commission a opté pour une approche plus pragmatique, qui reprend ces ambitions tout en tenant compte des contraintes budgétaires et politiques actuelles.

Moins coûteuse, c’est-à-dire ?

La grande différence, c’est le financement. Draghi plaidait pour un grand plan d’investissement européen, basé sur la dette commune, afin d’accélérer la croissance. Mais cette approche aurait très probablement suscité l’opposition de l’Allemagne, qui reste farouchement opposée à la mutualisation des dettes.

La Commission a donc choisi une alternative : encourager les États membres à investir davantage avec une plus grande flexibilité pour les aides d’État, tout en stimulant les financements privés. 

Et sur le plan industriel, est-ce que cette Boussole va vraiment aider les entreprises européennes ?

Oui, elle met en avant des réformes essentielles pour simplifier la réglementation, améliorer l’accès aux financements et briser les barrières du marché unique. Elle veut aussi soutenir des secteurs stratégiques comme l’automobile et l’énergie verte, tout en s’assurant que ces investissements soient coordonnés à l’échelle européenne.

L’un des défis sera d’éviter une fragmentation du marché intérieur, car certains États auront plus de moyens que d’autres pour soutenir leurs industries. C’est pourquoi la Commission mise sur un nouvel outil, le CCT – Competitiveness Coordination Tool, pour mieux harmoniser ces politiques.

Donc, en résumé, la Commission a revu ses ambitions à la baisse ?

Pas forcément. Certes, la Boussole ne reprend pas l’intégralité des propositions de Draghi, mais elle en conserve l’esprit et les objectifs. Plutôt que de se lancer dans une réforme radicale difficile à faire accepter, la Commission prend très au sérieux les enjeux soulevés par Draghi et s’efforce d’implanter ses recommandations de manière pragmatique.

Avec le CCT, elle veut assurer une meilleure coordination entre les États pour éviter une guerre des subventions. Et en s’attaquant aux lourdeurs administratives et aux obstacles au marché unique, elle pose des bases solides pour une croissance durable en Europe.

Alors, un pas en avant pour la compétitivité européenne ?

Oui! Cette Boussole est un signal fort que l’UE ne veut pas rester spectatrice face aux investissements massifs des États-Unis et de la Chine. Bien sûr, il faudra encore des ajustements, notamment sur les financements, mais elle montre une volonté claire d’agir. En rendant ces réformes plus réalistes et applicables, la Commission augmente leurs chances de succès et renforce le potentiel de croissance européenne.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.