Europe in a soundbite

La diplomatie sous la Révolution Française ou l'histoire d'une réécriture

La diplomatie sous la Révolution Française ou l'histoire d'une réécriture

Le Laboratoire d’Innovation Pédagogique sur l’Europe (LIPE) propose, de manière accessible, des approches transversales de l’histoire européenne du genre, des guerres, de l’art, des circulations et des réseaux, des grandes idéologies et débats politiques.

Le LIPE vous donne rendez-vous pour la chronique "Europe in a soundbite" chaque jeudi à 8h sur euradio.

Qu’est-ce que la révolution change aux relations de la France avec l’étranger ?


Dans un premier temps, rien. Jusqu’à la proclamation de la république, les relations extérieures restent le domaine réservé du roi. On ne change ni le personnel diplomatique ni ses pratiques : les ambassadeurs restent les représentants du monarque et ne reconnaissent pas le transfert de la souveraineté du roi à la nation. À partir de l’été 1792, en revanche, le nouveau pouvoir change de méthodes. Les traditions aristocratiques de négociation, fondées sur les liens dynastiques, le faste et une certaine forme de double langage, sont repoussées au nom des vertus d’efficacité, de simplicité et de franchise dont se prévaut la république. Même si la loi considère que les diplomates ne doivent pas essayer d’exporter la révolution, ils sont chargés par le gouvernement de défendre sa réputation et sa dignité à l’étranger. Ils doivent aussi faire accepter l’idée qu’ils ne représentent plus un monarque mais la nation toute entière.


Pourquoi cette nouvelle attitude ?


À l’étranger, la nouvelle république est attaquée par la propagande contre-révolutionnaire. Les autres royaumes européens refusent de recevoir les envoyés de ce régime qu’ils jugent illégitime et qu’ils préfèrent isoler. Les ambassadeurs français doivent donc accepter les conventions de la diplomatie européenne pour se faire une place. Quelques-uns s’en révèlent incapables et font preuve d’une insolence dangereuse pour le régime. Dans leur majorité, cependant, les envoyés français font de nombreux compromis pour tenter d’être reconnus comme des interlocuteurs valables, tout en essayant de ne pas abandonner les valeurs qui font la particularité de la république.


Ces efforts sont-ils couronnés de succès ?


Jusqu’en 1796, non. C’est seulement quand les armées françaises commencent à accumuler les victoires que les puissances étrangères sont obligées de négocier avec le nouveau régime. L’action diplomatique devient alors un outil de la guerre, car c’est elle qui permet à la France d’exister et d’imposer à ses voisins sa présence à la table des négociations. Les diplomates se rapprochent des généraux. Ils se transforment en informateurs militaires et font accepter les conquêtes. Certains chefs de guerre, comme Bonaparte, en profitent pour confisquer à leur profit les discussions avec l’étranger.


Au-delà des conquêtes, qu’est-ce que cette nouvelle diplomatie a changé en Europe ?

En passant du service du roi à celui la nation, la diplomatie révolutionnaire change en profondeur les relations extérieures. Elles ne consistent plus à faire s’entendre entre eux les princes mais à négocier en fonction des intérêts communs et réciproques des différentes nations. La diplomatie doit donc s’appuyer sur la connaissance et la confrontation des situations politiques, morales et culturelles des différents pays. Elle constitue désormais une science, fondée sur l’histoire et l’économie politique. Le diplomate ne doit plus seulement être un praticien, qui sait négocier, mais surtout un expert, qui connaît cette science.


Cette capsule « Europe in a soundbite» a été conçue par Stéphanie Soubrier à partir de la notice EHNE « La diplomatie sous la Révolution » de Virginie Martin.