Cette semaine dans Fréquence Europe, Olivier Singer consacre sa chronique aux semi-conducteurs.
Le 8 février, la Commission européenne a présenté un plan d’investissement pour les semi-conducteurs, le plus important programme de subvention jamais décidé en Europe pour un seul secteur industriel. Mais Olivier qu’est-ce qu’on appelle des semi-conducteurs ?
Un semi-conducteur est un matériau souvent le silicium qui a pour spécificité d’être plus ou moins conducteur de courant électrique. Les semi-conducteurs prennent la forme de plaques ultrafines de quelques millimètres que l’on empile les unes sur les autres.
Elles sont utilisées pour produire des puces électroniques que l’on va retrouver aussi bien dans son dernier smartphone, dans sa voiture, dans la carte graphique de son ordinateur, dans de nombreux objets connectés, ou encore dans l’avion de de combat européen du futur. Sans ces puces électroniques, il est impossible de faire circuler l’information à l’intérieur de tous ces appareils. Il suffit de démonter son smartphone pour s’en rendre compte.
Donc on peut dire que sans semi-conducteur, on peut mettre une croix sur le numérique et la société de l’information. Ce qui conduit à dire que les semi-conducteurs sont à la société de l’information ce que le carburant est au secteur de l’automobile
Mais pourquoi l’UE lance-t-elle maintenant un grand plan de soutien à cette industrie ?
Depuis le début de la pandémie au printemps 2020, l’Europe, comme d’autres régions du monde, connait d’importants problèmes d’approvisionnement voire des pénuries en puces électroniques. Cela s’explique principalement par le fait que l’Asie concentre les plus grands acteurs du secteur. Actuellement plus de la moitié des semi-conducteurs sont produits à Taïwan. Les Etats-Unis représentent 20% du marché et l’Europe seulement 10%.
Avec le Covid 19, la demande en semi-conducteur a explosé notamment avec l’essor du télétravail et les besoins en matériel informatique, le développement de la 5G, les technologies du Cloud…
Par ailleurs, les chaînes d’approvisionnement ont été totalement perturbées par les confinements et les fermetures des frontières. Les conséquences sont bien concrètes pour de nombreuses entreprises qui ont dû réduire drastiquement leur production comme par exemple la société Nintendo avec sa nouvelle console switch Oled ou l’industrie automobile qui partout dans le monde a dû fermer des lignes de fabrication en raison du manque de semi-conducteurs. C’est encore le cas aujourd’hui pour Renault et Peugeot.
Cette dépendance européenne n’est pas seulement économique, elle est aussi géopolitique. Avec la pénurie, l’UE mais aussi les Etats-Unis se sont rendu compte qu’ils dépendaient trop des seuls fabricants asiatiques et principalement taïwanais. Et que dire si un jour, la Chine devait envahir Taïwan, en l’espace de quelques jours l’approvisionnement de ce matériau serait entre les mains du gouvernement de Pékin.
Olivier en quoi consiste le plan proposé le 8 février par la Commission européenne ?
Ce plan de 42 milliards d’euro d’investissements publics, dénommé « Chips Act » a pour objectif d’augmenter les capacités de production en portant à 20% la part de l’UE dans la production mondiale de puces électroniques. Pour y parvenir et faciliter l’implantation d’usines de ce secteur, la Commission européenne autorisera 30 milliards d’aides publiques des Etats à des industriels du secteur. Ces subventions d’un nouveau genre ne tomberont pas sous le coup du droit de la concurrence de l’UE et ne seront donc pas interdites. Concrètement, ces 30 milliards de subvention devront déboucher sur la construction de 3 à 5 très grandes usines. Mais en contrepartie de ces aides publiques, ces usines devront alimenter en priorité le marché européen de manière à ce que l’Europe ne soit pas confrontée à une nouvelle pénurie de semi-conducteurs
L’autre ambition de ce plan est de soutenir l’innovation et la recherche afin comme le précise Thierry Breton, le Commissaire européen au marché intérieur, que l’UE devienne le leader sur la prochaine génération de puces de moins de 5 nanomètres, voire de moins de deux nanomètres. La puissance technologique d’une entreprise dans le domaine des semi-conducteurs se mesure par cette capacité à produire des circuits les plus petits.
La balle est désormais dans le camp du Parlement européen et des états membres. À eux de soutenir au non cette stratégie en faisant de cette ambition européenne des semi-conducteurs une réalité dans les plus brefs délais.
Fréquence Europe est une chronique européenne réalisée par Radio Judaïca et le Centre Europe Direct de Strasbourg.
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