Justin Horchler, étudiant à Sciences Po Bordeaux sur euradio éclaire l’auditeur sur la place du Vieux continent sur la scène internationale.
Les navires commerciaux en mer Rouge font l'objet d'attaques des rebelles houthistes au Yémen, soutenus par l’Iran. Que se passe-t-il dans cette région ?
Depuis quelques mois, les rebelles houthistes qui bénéficient du soutien de l'Iran attaquent fréquemment des navires en mer Rouge. Ils justifient leurs attaques en accusant certains navires d'être liés à Israël. C'est selon eux une réponse au comportement d'Israël en Palestine. Plus de 10% du commerce mondial transite par la mer Rouge et le golf d'Aden, mais désormais non sans risques. Donc en raison de ces attaques, de nombreux armateurs ont décidé de faire prendre à leurs navires des routes alternatives, comme passer par l'Afrique du Sud. C'est donc un grand détour !
Quelles sont les réactions internationales ?
Ces attaques perturbent le commerce maritime, donc certains États n'apprécient pas les agissements houthis. Par exemple, l'Inde se plaint de voir le coût d'exportation vers certains marchés croître. Certains avancent le chiffre de 400% d'augmentation des coûts d'expédition ! En outre, l'Egypte subit la baisse de la fréquentation du canal de Suez, donc le canal qui connecte la mer Rouge à la mer Méditerranée, et aurait perdu beaucoup d'argent qu'elle engendre grâce aux droits de passage. Et surtout, on a Israël, les États-Unis et le Royaume-Uni dont les navires sont les principaux visés par ces attaques. Ces États souhaitent mieux se protéger et ont attaqué en réponse à plusieurs reprises des positions houthis.
Et comment réagit l'Union européenne à ces attaques ?
L'Union européenne ne souhaite pas rester passive face aux attaques contre les navires dans la région. Les 27 ont été plus longs à réagir que d'autres États comme les États-Unis ou le Royaume-Uni, mais se sont néanmoins mis d'accord ce lundi sur une opération de sécurité maritime. L'intervention a une durée pour l'instant d'un an et un budget de huit millions d'euros. Tous les pays n'y participeront cependant pas. L'Espagne par exemple s'abstient de participer à la mission baptisée Aspides.
Et pourquoi ce nom "Aspides" ?
Aspides signifie bouclier en grec ancien. Donc l'objectif de la mission est clair: protéger. On retrouve cette idée dans le nom de la mission américaine par exemple qui a été nommée "Prosperity Guardian".
Comme l'Union européenne justifie son intervention ?
C'est indéniable que cette intervention est motivée par des intérêts économiques. En effet, les échanges maritimes passant par la mer rouge sont importants à l'économie du vieux continent. Nombreuses de nos importations et exportations vers l'Asie passent par cette mer. C'est pour cela que selon les mots de Ursula von der Leyen, “l’Europe garantira la liberté de navigation dans la mer Rouge, en travaillant aux côtés de nos partenaires internationaux”. Il y a aussi des motivations de sécurité car des attaques répétées mettent en danger la paix dans la région. Le Yémen est déjà un État en pleine guerre civile rappelons le, et les belligérants sont soutenus par différents États aux relations particulièrement conflictuelles.
La mission européenne permettra-t-elle de limiter le nombre d'attaques contre des navires ?
C'est peu probable. Cela fait plusieurs semaines que les États-Unis ou le Royaume-Uni bombardent les forces houthis sans pour autant avoir réussi à faire cesser les attaques. C'est même plutôt l'inverse qui se passe. Le groupe Houthi a décidé de répliquer en attaquant plus de navires. Mais la mission européenne ne prévoit pas d'attaquer les Houthis. L'objectif est défensif, et les interventions ne visent qu'à protéger les navires marchands et les forces européennes. Une frégate sera par exemple présente et prête à tout moment à arrêter des missiles venus du Yémen.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.