L’Europe est composée de différents acteurs (États, entreprises privées, organisations internationales…) qui jouent un rôle majeur dans les relations internationales. La série « L’Europe et le Monde » sur euradio cherche à éclairer l’auditeur sur certains aspects de la place du Vieux continent sur la scène internationale.
Cette chronique a été initiée et proposée par Justin Horchler, étudiant à Sciences Po Bordeaux, en 2023-2024 et est désormais animée par Ani Chakmishian.
Aujourd’hui, nous allons parler de la défense de l’Union européenne face aux nouvelles tensions internationales. L’OTAN reste-t-elle aujourd’hui la seule garantie de la sécurité européenne ?
En grande partie, oui. L’OTAN est l’organisation reconnue par tous les pays européens comme l’acteur principal pour assurer leur défense. L’invasion de l’Ukraine par la Russie a renforcé cette conviction. Mais attention, cela ne signifie pas que l’UE ne joue pas un rôle dans sa propre défense.
Justement, quel rôle joue l’Union européenne dans la défense ?
L’UE agit sur d’autres fronts : lutte contre le terrorisme, cyberattaques, stabilisation des frontières et interventions extérieures, notamment en Afrique et au Moyen-Orient. Mais pour la protection militaire directe du continent, c’est toujours l’OTAN qui prime, tant que les États-Unis restent engagés.
Et avec Donald Trump de retour à la Maison-Blanche, cet engagement est-il remis en question ?
Tout à fait. Le président américain a toujours été très critique envers l’OTAN. Il considère que les Européens doivent payer davantage pour leur propre sécurité. Il pourrait décider de réduire, voire de retirer l’engagement militaire américain en Europe, ce qui inquiète beaucoup les dirigeants européens.
D’ailleurs il menace de prendre le contrôle de la Groenland. Pourquoi cette île est-elle si importante ?
Le Groenland est un territoire semi-autonome du Royaume du Danemark. Il est stratégique à plusieurs niveaux. D’abord, sa position géographique entre l’Europe et l’Amérique du Nord en fait un point de passage crucial. Ensuite, il regorge de ressources naturelles comme le gaz et le pétrole, et notamment du nickel et du cobalt nécessaire pour la fabrication des batteries. Avec la fonte des glaces dans l’Atlantique Nord, la navigation marine devient possible et les ressources sont enfin exploitable. Ces raisons expliquent la soudaine attractivité de l’ile.
Et comment réagit l’Europe face à ces menaces ?
Contrairement au Danemark, l’ile ne fait pas partie de l'UE. L’UE a fermement réagi en affirmant son soutien total au Danemark membre. La Commission européenne et plusieurs dirigeants européens, comme Olaf Scholz et Emmanuel Macron, ont rappelé que les frontières ne peuvent être modifiées par la force.
Le Danemark prend-il des mesures concrètes ?
Oui. Il vient d’annoncer un investissement militaire de près de 2 milliards d’euros. Le but est évidemment de renforcer sa présence dans l’Arctique et l’Atlantique Nord.
Y a-t-il un risque d’intervention militaire américaine ?
Rien n’est exclu, même si cela semble improbable à ce stade. Donald Trump ne cache pas son intérêt pour le Groenland, il dit vouloir l’acheter et même l’obtenir par voie militaire. D’ailleurs, le ministre français des Affaires étrangères n’a pas exclu un déploiement de troupes européennes si la sécurité du territoire est menacée. S’il y a intervention militaire, on se retrouverait avec un affrontement de deux pays eux-mêmes membres de l’OTAN. Ça pourrait signer le début d’une décomposition de l’alliance.
L’Europe est-elle prête à faire face à ces défis ?
Elle y travaille. Les États membres renforcent leur coopération militaire. C’est l’absence d’une véritable armée européenne complique la tâche. Ce qui est certain, c’est que les tensions actuelles poussent l’Europe à accélérer sa réflexion sur son autonomie stratégique.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.
