L’Europe est composée de différents acteurs (États, entreprises privées, organisations internationales…) qui jouent un rôle majeur dans les relations internationales. La série « L’Europe et le Monde » sur euradio cherche à éclairer l’auditeur sur certains aspects de la place du Vieux continent sur la scène internationale.
Cette chronique a été initiée et proposée par Justin Horchler, étudiant à Sciences Po Bordeaux, en 2023-2024 et est désormais animée par Ani Chakmishian.
Aujourd'hui, on va parler de la Moldavie et de l'influence
russe. Le 20 octobre prochain, il y aura des élections présidentielles
et un référendum. Peux-tu nous expliquer les enjeux ?
Oui, bien sûr. La Moldavie, un petit pays entre l'Ukraine et la Roumanie, se retrouve une fois de plus au cœur d'une lutte d’influence entre la Russie et l'Union européenne. Les élections présidentielles de ce dimanche 20 octobre et le référendum sur la neutralité du pays posent des questions cruciales. La Moldavie devra choisir entre se rapprocher davantage de l'UE ou rester dans une position de neutralité, comme le souhaite Moscou. Ces élections sont marquées par des tentatives de déstabilisation de la Russie, qui ne veut pas perdre son influence sur ce pays stratégique.
Justement, tu parles de déstabilisation russe. Comment ça se traduit dans la campagne électorale ?
La Russie mène une campagne de déstabilisation en Moldavie à travers plusieurs moyens. D’abord, il y a la désinformation. Des médias pro-russes diffusent des fakes news pour discréditer la présidente pro-européenne, Maia Sandu, et semer la méfiance envers l'UE. Ensuite, la Russie finance des partis et des mouvements d'opposition, favorables à un maintien de la neutralité, voire à un rapprochement avec Moscou. Enfin, il y a des cyberattaques et des tentatives de manipulation de l'opinion publique via les réseaux sociaux, comme on l'a vu dans d’autres pays.
Et du côté de l'Union européenne, comment réagit-on à ces tentatives de déstabilisation ?
L'Union européenne est très attentive à la situation. « La Moldavie fait face à des tentatives massives et directes de la part de la Russie visant à la déstabiliser », a mis en garde le chef de la diplomatie européenne Josep Borrel
Bruxelles soutient clairement Maia Sandu et son gouvernement pro-européen. Il y a aussi des programmes d’assistance pour protéger la Moldavie des cyberattaques et renforcer la résilience démocratique. L’UE envoie aussi des observateurs pour surveiller la transparence des élections. En parallèle, certains pays de l’UE, comme la Roumanie et les pays baltes, poussent pour une réponse encore plus forte aux tentatives d’ingérence russe. Mais l'UE reste prudente, car elle sait que toute provocation pourrait exacerber les tensions avec la Russie.
Quels sont les enjeux pour l’Union européenne dans cette situation ?
L’enjeu principal, c'est la stabilité de la région. La guerre en Ukraine a déjà bouleversé l’Europe de l’Est, et l'UE veut éviter un autre conflit aux portes de l’Europe. En soutenant la Moldavie, l’UE espère renforcer un pays démocratique qui pourrait un jour rejoindre l’UE. Ensuite, il y a un enjeu stratégique. Si la Moldavie s'éloigne de la Russie, ça affaiblirait l'influence de Moscou dans la région. Mais la Russie utilise tous les leviers possibles, notamment la dépendance énergétique de la Moldavie au gaz russe, pour maintenir la pression.
Donc, ce référendum et ces élections sont vraiment décisifs pour l’avenir de la Moldavie et ses relations avec l’Europe...
Exactement. Le scrutin du 20 octobre 2024 pourrait être un tournant. Si Maia Sandu et les forces pro-européennes l’emportent, cela ouvrirait la voie à un rapprochement plus étroit avec l'UE, voire une candidature officielle. A voir si la Russie compte intensifier ses actions pour empêcher ce scénario. C'est donc un moment très délicat, avec des conséquences importantes, non seulement pour la Moldavie, mais pour toute la région.
Une interview réalisée par Laurence Aubron.