La série « L’Europe et le Monde », par Justin Horchler, étudiant à Sciences Po Bordeaux sur euradio cherche donc à éclairer l’auditeur sur certains aspects de la place du Vieux continent sur la scène internationale.
Quelles ont été les annonces ces derniers jours quant à l'adhésion de nouveaux États dans l'Union européenne ?
Charles Michel, le Président du Conseil européen, a annoncé l'ouverture de négociations d'adhésion avec l'Ukraine et la Moldavie. Quant à la Géorgie, elle obtient le statut de candidat. C'est donc une bonne nouvelle pour ces États. Cependant, la Bosnie-Herzégovine est la grande perdante. Elle doit attendre encore un peu avant d'espérer rejoindre l'Union européenne car "le degré nécessaire de conformité aux critères d'adhésion" n'est pas encore atteint selon les 27.
Donc quel est le futur des Balkans au sein de l'Union européenne ?
La veille de ce Conseil européen s'est tenu un sommet entre l'Union européenne et les Balkans occidentaux. L'Union a conclu que le processus d'adhésion des Balkans doit être accéléré mais à condition que de nouvelles réformes soient mises en œuvre. Afin de favoriser cette intégration, la Commission a proposé un plan de croissance de plusieurs milliards d'euros. Le but est d'approfondir l'intégration économique des Balkans avec l'Union, tout en motivant ces États à se réformer.
Quelles ont été les réactions suite à cette annonce ?
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a salué une "victoire pour l'Ukraine" et "toute l'Europe". Les députés des parlements moldave et géorgien ont quant à eux brandi des drapeaux de l'Union et joué l'hymne à la joie à l'ouverture de leurs sessions parlementaires. Des milliers de personnes ont célébré dans les rues cette annonce.
La bonne nouvelle n'était pourtant pas garantie ?
En effet. Le Conseil européen a suivi les recommandations de la Commission. Mais sur les 27 États, l'un menaçait le consensus. C'est la Hongrie de Viktor Orban. Le Premier ministre hongrois considère l'adhésion de l'Ukraine comme "une mauvaise décision" car le pays ne serait pas prêt selon lui. Et on s'attendait à ce que ce Conseil se termine par un échec à cause d'Orban. Peu avant la réunion, il répétait à la presse que l'Ukraine ne remplit pas les conditions pour devenir membre de l'Union européenne. Orban a finalement décidé de s'abstenir, ne bloquant donc pas la décision.
Comment peut-on expliquer l'absence de véto de la Hongrie ? Probablement par le déblocage de 10 milliards d'euros d'aide. La Hongrie devait bénéficier de 3 fois plus d'aides mais elles ont été gelées en raison de violations de l'État de droit. Et comme par hasard, 10 milliards d'euros ont été débloqués la veille, ce qui peut certainement expliquer la décision hongroise.
Mais sur d'autres sujets, la Hongrie n'a pas accepté de nouveau compromis.
Oui, la candidature de l'Ukraine, de la Moldavie et de la Géorgie n'était pas le seul point à l'ordre du jour. Il y avait aussi la révision du budget pour financer de nouvelles dépenses. Par exemple, la lutte contre la migration clandestine ou le soutien à l'Ukraine. Malgré un consensus des 26 autres États, Orban a bloqué la décision qui est donc reportée de quelques mois.
Quel signal envoie la Hongrie en bloquant ces initiatives communes ?
C'est un message de désunion. Il est indéniable que d'avoir ne serait-ce qu'un État opposant des décisions communes n'envoie pas un message d'unité. Le blocage hongrois met aussi en évidence les difficultés du fonctionnement actuel de l'Union. Un seul État membre peut bloquer tous les autres sur des décisions particulièrement importantes. Et cette décision du Conseil n'est qu'une parmi tant d'autres qui concernent le processus d'adhésion de ces nouveaux États. Si la Hongrie s'oppose à la candidature même de l'Ukraine, qu'en sera-t-il au moment de prendre une décision sur l'adhésion ? C'est pour cela que de nombreux responsables politiques ou certaines organisations de la société civile appellent à une réforme du fonctionnement de l'Union. Par exemple Emmanuel Macron défend « des réponses institutionnelles et procédurales ». D'autres préfèrent nommer une réforme des traités.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.