Aujourd'hui en Europe est un format quotidien regroupant les actualités européennes du jour, réalisé par la rédaction euradio à Bruxelles.
Au programme :
- Décryptage de l'enquête Cyprus Confidential
- Prévisions économiques de l'UE de l'automne 2023
- Rapport du gouvernement allemand sur la politique agricole
Bonjour Joris, ouvrons ce journal en décryptant Cyprus Confidential, la dernière enquête de grande ampleur du consortium international des journalistes d’investigations.
Au total ce sont 270 journalistes de 69 médias provenant de 55 pays différents qui se sont mobilisés pour mettre au jour l’étendue des avoirs russes sur l’île de Chypre. L’enquête s’appuie sur l’analyse de 3,6 millions de documents, couvrant une période allant du milieu des années 1990 à avril 2022, soit quelques mois après le début de la guerre en Ukraine.
Et que nous révèle cette enquête ?
Le rôle de Chypre comme paradis fiscal était déjà bien connu. On savait aussi que les oligarques russes profitaient de la quasi absence de surveillance fiscale de l’île. En revanche, selon cette enquête Chypre “joue un rôle encore plus important par rapport à ce qui était généralement connu”. Elle montre ainsi comment Chypre est devenue le “coffre fort” des grandes fortunes russes. Et notamment des grandes fortunes touchées par les sanctions européennes à la suite de l’invasion de la Crimée en 2014 et même de la guerre de 2022.
Et l’agence comptable internationale PWC Chypre est l’une des principales entités pointées par l’enquête.
Oui le célèbre cabinet est notamment accusé d’avoir mobilisé l’intégralité des plus de 1100 employés de son bureau à Chypre pour aider l’oligarque Alexei Mordashov à transférer 1,4 milliards d’euros hors de Russie, peu de temps après que l’oligarque ne rejoigne la liste des personnes sous sanctions européennes.
L’enquête met également en lumière le rôle de Chypre dans la dissimulation de fonds détenus par Roman Abramovitch, Alexander Abramov ou encore Alexander Frolov. Au total ce serait plus de 800 compagnies et trusts qui auraient œuvré à dissimuler des actifs russes sur Chypre.
Et quelle a été la réaction de Chypre suite à ces révélations ?
Très rapidement après la publication de l’enquête ce mardi, Nicosie a déclaré enquêter sur ces violations. Selon les auteurs, le gouvernement leur aurait déclaré “s’engager sans équivoque à lutter contre la corruption et les financements illicites”. Le président Nikos Christodoulides, en poste depuis le mois de mars 2023 aura néanmoins fort à faire pour rattraper des années de collusion plus ou moins affichée de l’État chypriote avec les fortunes russes.
On pense notamment au cas du précédent président Nicos Anastasiades. En lien avec des proches de Vladimir Poutine, il avait également été au centre de nombreux scandales lors de ses 10 années au pouvoir. Son nom était notamment apparu dans les Panama Papers en 2021.
Continuons ce tour de l’actualité en revenant sur les prévisions économiques de la commission européenne de l’automne 2023 annoncées ce mercredi.
Oui, et pour la première fois, les prévisions prennent en considération les pays candidats à l’adhésion. En l'occurrence, l’Ukraine, la Moldavie et la Bosnie-Herzégovine. La Commission souligne d’ailleurs, je cite, “la résilience remarquable” de l’économie ukrainienne, dont le PIB a augmenté de plus de 4% en 2023, après une chute de 29,1% du PIB en 2022 par rapport à l'année précédente suite à l’invasion russe. Une croissance imputée à d’excellentes récoltes et aux mesures de relance mises en place par Kiev.
En revanche, à l’échelle plus globale, le rapport saisonnier réalisé par le commissaire à l’économie Paolo Gentiloni est relativement pessimiste. La croissance du PIB devrait être de 0,6% dans la zone UE, ce qui est inférieur de 0,2 points par rapport aux prévisions de l’été. Les prévisions pour l’année 2024 sont également légèrement plus pessimistes que celles annoncées jusqu’alors.
Pessimisme autour de la croissance mais optimisme quant au niveau d’inflation qui devrait encore ralentir dans les prochains mois.
Oui, l’inflation aurait atteint 2,9% en octobre dans l’ensemble des 27 ce qui est son niveau le plus bas depuis juillet 2021. Pour rappel, la hausse des prix avait dépassé les 10% il y a un an, le ralentissement est donc significatif. La Commission souligne d’ailleurs dans son rapport que ces chiffres ne sont pas liés qu’à la baisse des prix de l’énergie. Les autres grandes catégories de consommations comme l’électronique ou l’alimentaire ont également vu la hausse de leurs prix ralentir.
En revanche, la Commission craint que de nouveaux aléas économiques ne surviennent dans les prochaines années et faussent les prévisions.
Et notamment le conflit à Gaza, qui s’il n’a pour le moment pas eu de conséquences économiques vraiment notables en Europe, pourrait contribuer, à terme, à perturber les approvisionnements énergétiques en provenance du moyen orient.
Autre source d’inquiétude, le réchauffement climatique qui présente de forts risques pour plusieurs pans de l’économie européenne. On pense par exemple aux incendies qui menacent le tourisme méditéranéen, ou encore les sécheresses à répétition qui perturbent et vont continuer à perturber les récoltes dans les années à venir.
Concluons ce journal en Allemagne, ou un rapport du gouvernement allemand fait état de la situation catastrophique des exploitations agricoles.
Oui, tous les 4 ans le gouvernement présente un rapport sur sa politique agricole au Bundestag. Celui de cette année dresse un bilan particulièrement sombre puisqu’entre 2010 et 2020, 36000 exploitations auraient fait faillite, à raison de 10 par jour. Cela correspond à environ 12% de pertes ainsi que la disparition d’un emploi sur 7 dans le secteur en seulement une décennie.
Le secrétaire général de l’Association des agriculteurs allemands déplorait, dans une interview à Euractiv, le “manque de perspectives économiques”, ainsi que” le manque de fiabilité politique pour les investissements futurs”.
Et qu’est ce qui explique cette mutation de l’agriculture allemande ?
Le ministre de l’Agriculture allemand, Cem Ozdemir, déplore la politique des précédents gouvernements qui ont condamné les petites exploitations. Il pointe également les conditions météorologiques qui ont beaucoup nui aux cultures allemandes.
Autre cause de cette profonde mutation du secteur allemand : la crise du secteur porcin. Un secteur en souffrance depuis des années, la faute à la baisse des exportations pendant la crise du Covid-19 ainsi qu’aux pandémies de peste porcine africaines. Et plus globalement, la consommation annuelle de viande de porc en Allemagne a fortement chuté ces dernières années, passant de 55 à 43 kg par personne entre 1999 et 2021.
Un journal réalisé par Ariane Dana et Joris Schamberger.