Tous les mercredis, retrouvez Tarinda Bak sur euradio pour sa chronique intitulée "L'européenne de demain", dans laquelle il sera question des combats menés par les femmes en Europe et partout dans le monde.
Alors que nous offre l’Union européenne cette semaine ?
Des sanctions, et pas des moindres. Je ne sais pas si vous vous rappelez la première fois que vous m’avez interviewée.
Il me semble qu’il s’agissait de Mahsa Amini ? N’est-ce pas ?
Exactement. Après ce terrible évènement qui avait remué le monde entier, y compris nos eurodéputés, l’Union européenne a émise des sanctions à l’encontre de l’Iran. La première, puisque s’en suivra de nombreuses autres, date d’octobre 2022.
Pour quels motifs ? Pour défendre Mahsa Amini ?
Oui, mais pas que.. L’Union européenne a sanctionné 11 personnes, et quatre entités iraniennes, dont naturellement la police des mœurs, pour leurs implications dans la mort de Mahsa Amini. Mais pas seulement, puisque la cause était également la réponse violente des forces de l’ordre et des responsables locaux aux manifestations, qui ont fait rappelons-le, environ 300 morts.
De quelles natures sont les sanctions ? Économiques ?
Parfaitement. Le communiqué de presse de l’UE établit que « Les mesures imposées consistent en une interdiction de séjour et un gel des avoirs. En outre, il est interdit aux citoyens et aux entreprises de l'UE de mettre des fonds à la disposition des individus et des entités figurant sur la liste. Le régime des sanctions relatives aux droits de l'homme en Iran comprend également une interdiction d'exporter vers ce pays des équipements susceptibles d'être utilisés à des fins de répression interne et des équipements de surveillance des télécommunications ».
Donc ce n’est pas seulement la mort de Mahsa Amini, mais « l'usage généralisé et disproportionné de la force » contre les manifestants qui est sanctionné ?
Tout à fait. Les États membres ont rappelé à travers ces sanctions que le peuple iranien a parfaitement le droit de manifester pacifiquement. Et ils demandent que l’Iran « mette immédiatement fin à la répression violente contre les manifestants pacifiques, qu'il libère les personnes détenues et qu'il garantisse la libre circulation de l'information, y compris l'accès à Internet ». Sans oublier le souhait d’une enquête au sujet de la mort de Mahsa Amini.
L’Iran a-t-il été sanctionné de nouveau depuis ?
Oh que oui. La mort de Mahsa Amini ne représente que le premier grief. Trois jours après, en octobre 2022, l’UE a sanctionné par la suite l’Iran pour son utilisation de drone dans l’agression russe. Trois personnes et une entité iranienne a donc été ajouté à la liste de sanctions « au motif qu'elles compromettent ou menacent l'intégrité territoriale, la souveraineté et l'indépendance de l'Ukraine ». Là encore, on retrouve le gel des avoirs, l’interdiction aux citoyens et aux entreprises de l’UE de mettre des fonds à leurs dispositions. Et on ajoute une interdiction aux personnes physiques de voyager sur le territoire de l’UE ou encore de transiter par celui-ci.
La suite des sanctions, concernent-elles le non-respect des droits de l’homme ou s’agit-il de raisons militaires ?
Alors, s’en suivra effectivement deux sanctions, le 14 novembre et le 12 décembre 2022, concernant les violations des droits de l’homme en Iran. Toutefois, ce même 12 décembre, l’Union européenne adoptera des mesures restrictives supplémentaires, liées à l’utilisation de drones iraniens dans la guerre en Ukraine. La liste s’allonge puisque quatre personnes et entités sont ajoutés.
Pour résumer, l’Union européenne mêle à la fois sanctions pour le non-respect des droits de l’homme et tout autre sujet qui les nécessitent, c’est bien ça ?
Parfaitement. Toutefois, les trois dernières sanctions ne concernaient que le non-respect des droits de l’homme. C’est ainsi que des représentants du gouvernement et du parlement iranien, d'importantes personnalités politiques et médiatique, ainsi que des membres de haut rang des forces de sécurité iraniennes, y compris le Corps des gardiens de la révolution islamique de l'Iran, furent sanctionnés.
Il me semble qu’il y avait également le ministre iranien de la culture et de l'orientation islamique, ainsi que le ministre de l’Éducation ?
Oui, ces ministres furent visés par les sanctions, ainsi que le commandant adjoint et le porte-parole du Corps des gardiens de la révolution islamique, des députés au Parlement iranien soutenant la répression violente. Mais également des membres de la police, du pouvoir judiciaire dans différentes régions du pays et des gardiens et directeurs de prison.
À quand remonte la dernière sanction de l’Union européenne ?
Elle est très récente, car elle date du 20 mars 2023. Elle permet de voir que les personnes visées par les sanctions ou les entités sont de plus en plus importantes, et précises. Pour illustrer ce propos, on peut prendre l’exemple des membres conservateurs du clergé, qui ont porté atteinte à la liberté des filles et des femmes, qui ont répandu la haine, ou encore le porte-parole des Quartiers généraux pour l'imposition du bien et l'interdiction du mal. D’ailleurs, il serait pertinent de constater que l’Union européenne sanctionne en particulier les personnes responsables de la torture des détenues, dont les magistrats qui ont prononcé « des condamnations à mort à l'issue de procès inéquitables ».
Un mot pour la fin ?
Au total, les mesures restrictives de l’Union européenne concernent 204 personnes et 34 entités iraniennes.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.