Retrouvez chaque semaine la semainière de Quentin Dickinson sur euradio. L'occasion de découvrir la diplomatie et l'actualité européenne sous un nouvel angle.
Alors, Quentin Dickinson, avez-vous passé une bonne semaine ?...
Moi, oui, merci ; l’Europe, jugez-en ; car vous l’aurez appris par ailleurs, en Autriche, le parti d’extrême-droite et pro-russe FPÖ est arrivé premier en nombre de sièges lors des législatives dimanche dernier, mais sans atteindre la majorité absolue. Normalement, le Président de la République charge alors le chef du parti gagnant de tenter de former un gouvernement. Mais voilà : personne ne veut travailler avec M. Herbert KICKL, même si le parti de la droite classique, l’ÖVP, membre du PPE au niveau européen et actuellement au pouvoir, serait – peut-être – ouvert à une coalition avec le FPÖ, mais sans M. KICKL. L’intéressé paraît cependant peu enclin de s’effacer pour la bonne cause.
Pour barrer la route à l’extrême-droite, l’ÖVP du Chancelier Karl NEHAMMER pourrait tenter de monter une coalition avec les sociaux-démocrates et/ou avec le petit parti qui monte, le libéral-centriste NEOS.
Toute ressemblance avec, par exemple, la situation politique en France serait purement fortuite - sauf si on considère que partout en Europe, les mêmes causes politiques produisent les mêmes résultats électoraux.
Mais, pour l’heure, l’Autriche n’a pas rejoint le Camp de la Honte des Hongrois et des Slovaques.
En revanche, en Bulgarie, c’est toujours le chaos…
…et c’est bien le moins qu’on puisse dire. Imaginez l’hémicycle du Parlement à SOFIA en proie à des empoignades violentes entre députés, et une bataille rangée pour savoir qui prendrait possession de la tribune, pendant que quelques élus pro-russes s’affairaient à détruire les micros du président et à en arracher les câbles.
Mais pourquoi tant de haine ?...
Tout simplement pour empêcher le Parlement d’adopter la loi entérinant la législation européenne de reconstruction post-Covid. Celle-ci, notamment, obligerait deux mines de charbon, fortement déficitaires, à fermer. Or, c’était la dernière session parlementaire avant les élections législatives, prévues le 27 octobre.
L’attitude des partis populistes et d’extrême-droite a pour effet d’empêcher la Bulgarie d’empocher la tranche de 266 millions d’Euros que la Commission européenne lui destine.
SOFIA a jusqu’au 20 octobre pour transmettre le dossier complet à BRUXELLES – à l’heure qu’il est, seule la tenue d’une session parlementaire extraordinaire permettrait de tenir cette échéance.
Au Parlement européen, c’est tout-de-même plus calme qu’à SOFIA…
Pour l’heure, oui, mais cela peut être un calme trompeur. Les eurodéputés doivent en effet auditionner les vingt-six candidats-commissaires européens, leur présidente, Ursula von der LEYEN, poussant à la roue pour que cela se fasse dans les plus brefs délais – et les élus de tout bord détestent se faire forcer la main. Ce sera tranché cette semaine, mais quelque chose me dit que les auditions se tiendront, non ce mois-ci, mais du 4 au 12 novembre. De ce fait, la Commission von der LEYEN II ne pourrait entrer en fonctions que le 1er décembre, au mieux.
Enfin, Quentin Dickinson, je crois que vous vouliez marquer deux faits relativement discrets, mais historiquement significatifs…
Le premier événement se passe au Pays de Galles, où le grand complexe sidérurgique de PORT-TALBOT ferme ses portes, ouvertes en 1901. Dans cinq ans, et au prix de la perte d’au moins la moitié des quatre mille emplois, le site renaîtra sous forme d’une usine de recyclage d’acier – finis les hauts-fourneaux (et la pollution atmosphérique).
Pendant ce temps, à 300 kilomètres de là, dans le Nottinghamshire (et moins dramatiquement pour l’emploi local), la centrale de génération électrique de RATCLIFFE-sur-la-SOAR ferme, elle aussi, ses portes. Et voici qui fait du Royaume-Uni le premier pays d’Europe à fermer sa toute dernière centrale fonctionnant au charbon. A préciser : c’est à LONDRES, en 1882, que Thomas EDISON avait inauguré la première centrale du genre au monde. La boucle technologique est bouclée.
D’un dernier mot, ce Royaume-Uni-là, innovateur, n’est pas vraiment celui de l’ancien Premier ministre britannique Boris JOHNSON. Dans quelques jours, vous pourrez lire ses mémoires, où l’on découvre que, selon notre homme, « Emmanuel MACRON a voulu [le] punir du Brexit en encourageant les migrants à s’entasser dans des embarcations de fortune pour rejoindre l’Angleterre ».
Personnellement, je me félicite tous les jours que ce Boris-là ne soit plus journaliste.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.