Voyage, transport, e-commerce, protection des données personnelles… Les 3/4 des droits des consommateurs qui s’appliquent en France comme dans les autres pays européens sont issus de directives et règlements européens. Dans cette chronique, Elphège Tignel, du Centre Européen des consommateurs France, vous explique sur euradio comment l’Europe protège les consommateurs dans leur vie quotidienne et quels sont vos droits si vous voyagez, déménagez, achetez, payez, étudiez, téléphonez… en Europe.
Elphège, en ce début d’année, vous revenez sur la feuille de route du nouveau Commissaire européen en charge de la protection des consommateurs dévoilée en fin d’année dernière.
Oui. La présidente de la Commission européenne a confié un mandat clair à Michael McGrath. Il doit adapter la protection des consommateurs européens à l’ère numérique. Tout en s’assurant que les lois déjà en place sont effectivement appliquées. Rien que ça ! Un programme ambitieux avec des objectifs forts qui s’articule autour de plusieurs axes.
Commençons par l’un des piliers de ce plan : la création d’un cadre modernisé pour protéger les consommateurs, notamment les plus vulnérables.
Oui. Et les consommateurs les plus vulnérables, ce sont bien sûr les enfants. Ces jeunes consommateurs nés avec un smartphone dans la main téléchargent, jouent en ligne, s’abonnent à des services numériques. Et bien souvent sans en mesurer les risques.
C’est donc pour les protéger, tout comme les millions d’autres consommateurs, que le Commissaire envisage une grande une loi. Une loi sur la loyauté numérique. Son objectif est de lutter contre les pratiques déloyales en ligne. Cela inclut les publicités trompeuses, y compris postées par des influenceurs. Mais aussi les dark patterns. Vous le savez, on en a déjà parlé ensemble, ce sont ces techniques manipulatrices utilisées sur les sites pour inciter à cliquer, acheter ou s’abonner.
Cette loi veut aussi s’attaquer aux produits numériques ou sites marchands conçus pour être addictifs. Des plateformes de vente imaginées et créées pour pousser les consommateurs, souvent les plus jeunes d’ailleurs, à acheter à une heure bien précise pour obtenir une récompense ou des réductions.
Enfin, le Digital Fairness Act, c’est le nom de cette loi, veut mettre fin à l’exploitation abusive des données personnelles à des fins marketing. On peut donc espérer dans quelques temps pouvoir surfer sur internet sans craindre une évolution des prix en fonction de nos recherches en ligne.
Le commissaire veut aussi donner confiance dans le marché européen.
En effet. Et ça commence par protéger les consommateurs européens des produits de mauvaise qualité vendus en ligne.
Pour ça, l'UE va agir sur deux volets. Continuer son travail de modernisation de sa législation sur la sécurité des produits. Et surveiller de près les produits vendus sur les plateformes en ligne qui ne respecteraient pas les normes strictes de sécurité et de qualité.
La révision du règlement général sur la protection des données est également une des priorités du mandat donné au Commissaire McGrat.
Oui. Le règlement général sur la protection des données, c’est ce qu’on appelle communément en Europe le RGDP. Sa mise à jour est prévue pour garantir qu’il reste pertinent face aux innovations technologiques. On pense notamment à l’intelligence artificielle bien sûr ! L’UE veut un cadre clair pour l’utilisation des données dans les systèmes d’IA. Et c’est d’autant plus important qu’elles sont bien souvent exploitées par des entreprises basées hors de l’UE.
Et comment le Commissaire compte-t-il s’y prendre pour réaliser tout ça ?
En révisant les lois existantes de protection des consommateurs !
Il peut s’appuyer une étude menée l’an dernier par la Commission européenne sur l’équité numérique. Les conclusions étaient sans appel. Les règlementations actuelles sont insuffisantes pour garantir une protection complète et équitable des consommateurs en ligne. Et selon cette étude, les pratiques numériques nuisibles coûtent, chaque année, près de 8 milliards d’euros aux consommateurs européens.
Ensuite, la Commission veut renforcer les pouvoirs des autorités de contrôle nationales. Celles qui sont chargées de surveiller l’application des réglementations. Ces autorités doivent pouvoir assurer une protection concrète des consommateurs dans l’UE. Mais également pouvoir sanctionner plus efficacement les professionnels en cas de manquement. Les services de répressions des fraudes dans chaque Etat membre ainsi que les autres autorités de contrôle devront coopérer davantage entre elles. Et aussi faire preuve de transparence en communicant sur leurs actions. Tout cela, sous le contrôle de la Commission européenne elle-même bien entendu.
Une Commission qui s’octroie parallèlement la compétence d’intervenir directement auprès des entreprises en cas d’infractions majeures. Les plateformes de vente en ligne chinoises qui ont envahi le marché européen sont donc prévenues !
Cette feuille de route 2025-2030 du commissaire McGrath n’est pas qu’un programme technique. Elle s’annonce aussi comme un grand pas pour restaurer la confiance des consommateurs dans le marché numérique européen.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.