Alexiane Terrochaire--Barbançon est responsable d’un dispositif de mentorat à distance, ou digital, pour l’Afev. Elle vous propose une nouvelle chronique, née de la collaboration entre euradio et l’Afev, l’Association de la Fondation Étudiante pour la Ville. Elle s’intitule “D’un regard à l’autre - la jeunesse et l’Union européenne” et vous avez pu entendre quelques extraits de la voix des engagés, dans la bande-annonce.
Cette chronique est une conclusion à la réflexion sur la place de l’Union européenne à l’école, dans le système éducatif français. Dans la chronique précédente, les engagé·es ont proposé certaines solutions pour mieux informer les jeunes sur l’Union Européenne et leur donner matière à débattre, ou discuter, à l’école. Pourriez-vous nous rappeler ce qu’ils vous ont confié ?
Ils·elles voudraient inclure plus d’écrivain·es européen·nes dans les programmes de français et de littérature, comme des auteur·rices espagnol·es, nordiques, britanniques ; ou encore, apprendre les langues plus tôt, vers 6 ans, plutôt que 11 ans. Enfin, ils·elles voudraient que les programmes scolaires soient modifiés pour ajouter plus d’histoire de l’Union européenne, plus de politiques de l’Union européenne dans les cours d’économie et de sciences sociales.
Sur le papier, ces solutions semblent simples et concrètes, mais le titre de votre chronique sème le doute. Vous semblent-elles réalistes et réalisables ?
Je vais être nuancée : les solutions me semblent réalisables, mais peu réalistes pour une mise en œuvre dans un temps court. Introduire de l’Union européenne dans les programmes scolaires, pour mieux la comprendre, pour ensuite mieux en discuter et stimuler la citoyenneté européenne des jeunes, c’est une décision éminemment politique. De manière schématique, créer une politique publique éducative nécessite beaucoup d’informations, d’évaluations des données, et de concertation au sein des ministères, avec les conseillers, pour ensuite aboutir à une proposition de réforme. Je saute des étapes, j’en ai bien conscience.
Nous voyons bien que les jeunes ne sont pas représenté·es dans ce processus.
Oui, et c’est là où je souhaite en venir. Les jeunes scolarisé·es n’ont pas forcément de poids ou même l’opportunité de discuter avec les conseiller·ères, ou les porteur·euses de la réforme, même si ce sont eux·elles qui expérimentent directement les programmes, et qui sont sur le terrain pour imaginer les solutions de demain. Alors, même si cela peut paraître un peu arrogant, ou à une toute petite échelle, je me dis que mentionner à la radio ces solutions, en échangeant avec vous, est une étape pour les rendre plus réalisables et réalistes, car elles sont au moins mentionnées dans l’espace public.
En outre, vous aviez également mentionné que les engagé·es voudraient que l’UE puisse réunir tous les ministères de l’éducation des 27 États-membres pour avoir un socle de connaissances européennes. D’après vous, est-ce réaliste ou réalisable ?
Je triche : je dirai que c’est souhaitable mais hautement improbable. En effet, c’est souhaitable parce que de cette façon, tous les élèves des systèmes scolaires apprennent l’histoire européenne, ses réformes, ses traités, ses politiques, notamment Erasmus+, de la même manière. Ainsi, il n’y a plus d’inégalités dans l’accès aux connaissances à l’Union européenne, ni d’inégalités territoriales causées par la présence ou l’absence d’institutions européennes ou de maisons de l’Europe à proximité du lieu de vie ou d’études du jeune. Cela représente quand même beaucoup moins d’obstacles à franchir pour se sentir européen·ne, et connecté aux autres pays et aux autres jeunes citoyen·nes.
Je ne sais pas pourquoi, mais je sens un “mais” poindre...
Mais, c’est d’autant improbable, car actuellement, l’Union européenne n’a aucune compétence en matière d’éducation, de création du contenu des programmes scolaires. Ceci est exclusivement la prérogative des états-membres, qui font le choix d’inclure des pans de l’histoire de l’Union, ou ses actualités, dans les cours d’histoire ou d’éducation civique…ou pas. Encore une fois, les contenus scolaires sont très inégaux entre les 27 états-membres, et certains accueillent des institutions, comme le Luxembourg, l’Allemagne, ou la Belgique, ce qui facilite donc la visibilité des institutions européennes, symboliquement.
Maintenant, nous vous connaissons un peu : vous n’allez pas vous arrêter à un tel obstacle ?
Non, effectivement ! J’ai interrogé les bénévoles de l’Afev sur les façons dont nous, citoyen·nes, pourrions apporter plus de visibilité de l’Union européenne à l’école, ou en dehors. Dans la prochaine chronique, nous allons donc aborder le rôle des “ambassadeur·rices” de l’Union européenne, même si ce titre n’existe pas, et où les trouver, pour mieux toucher les jeunes qui ne sont pas directement concernés ou impliqués dans l’Union Européenne.
Alors, ouvrons un nouvel axe de réflexion dans la prochaine chronique, la semaine prochaine !
Entretien réalisé par Laurence Aubron.