Nous accueillons Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee. Nous discutons toutes les semaines de finance. Bonjour Marc, de quoi allons-nous parler aujourd’hui ?
Depuis le début de l’année l’inflation est sur toutes les lèvres. Les consommateurs voient leurs factures augmenter. Et, en période électorale, il semble que tous les hommes et femmes politiques ont une opinion sur comment il faudrait protéger le pouvoir d’achat des Français.
Dans la réalité, l’arme principale pour lutter contre l’inflation est aux mains des banques centrales. Il s’agit des taux directeurs. Et comme le sujet du pouvoir d’achat passionne les foules, je pensais qu’il était bon d’expliquer le lien entre ces taux directeurs et l’inflation.
Alors commençons par le début. C’est quoi un taux directeur ?
De façon simplifiée, les banques commerciales d’un pays collectent les dépôts et l’épargne de ceux qui en ont, pour prêter cet argent aux entreprises ou aux particuliers qui en ont besoin. Sous forme de prêts immobiliers ou prêts à la consommation par exemple.
Quand les banques ont trop de dépôts et que la demande d’emprunt est faible, elles apportent l’excédent à la banque centrale européenne, la BCE. À l’inverse, si les gens épargnent peu et que la demande de prêts est forte, alors les banques empruntent l’argent à la banque centrale.
Les taux auxquels la banque centrale rémunère les dépôts que les banques commerciales lui apportent, ou encore prête à ces banques quand elles manquent de liquidités sont appelés les taux directeurs.
D’accord, donc si j’ai bien compris, la banque centrale, qui dépend de Union Européenne, détermine à quelles conditions les banques commerciales peuvent emprunter chez elle ou venir déposer des surplus de dépôts. C’est bien ça ?
En effet. Et on voit bien comment, par ce biais simple mais très puissant, elle peut influencer l’activité des banques commerciales. Si elle souhaite que ces dernières prêtent beaucoup, par exemple pour stimuler l’économie, elle va baisser ses taux directeurs. Il devient alors peu cher pour les banques d’emprunter. Elles peuvent donc prêter à des taux plus bas à leurs clients.
Très concrètement, c’est parce que la BCE a abaissé ses taux directeurs à des niveaux historiquement bas, que nous avons pu voir des crédits immobiliers à 20 ans à des taux moyens de 1,55%. Avec des possibilités pour certains d’emprunter à 15 ans à moins de 1% !
Mais la BCE a récemment annoncé qu’elle commencerait à augmenter ses taux directeurs n’est-ce pas ? Et donc de rendre les liquidités plus chères pour les banques commerciales.
Oui. Car l’objectif affiché de la BCE est de cibler une inflation de 2% sur le moyen terme. Or, celle-ci, très longtemps en-dessous de 2%, s’est récemment envolée. Au mois de mai, elle s’est établit à plus de 8%.
Pour la réduire, la BCE a donc annoncé qu’elle allait relever les taux directeurs à partir de juillet. Et en anticipation d’une série de hausses à venir, les marchés financiers ont déjà réagi.
Le taux de l’emprunt d’État français à 10 ans est ainsi passé de zéro au début de l’année à plus de 2% récemment.
Qu’est-ce que cela implique pour les niveaux des emprunts immobiliers ?
Ça va piquer. Le gouverneur de la banque de France a déclaré que leurs niveaux vont grimper. Tout en rappelant que les niveaux très bas récents étaient exceptionnels et que des taux d’emprunt immobilier entre 2 et 3% n’ont rien d’extraordinaires.
Enfin, rappelons que la hausse des taux directeurs a aussi des effets bénéfiques. Car si les emprunts deviendront sans doute plus chers, les banques vont aussi vouloir attirer plus de dépôts. Et pour cela elles décideront sans doute un jour d’augmenter le niveau des intérêts versés sur les comptes d’épargne. Les premières viennent d’ailleurs de relever leurs taux. Ainsi PSA Banque et My Money Bank ont toutes deux décidé de relever les intérêts qu’elles versent sur leurs comptes d’épargne. Dans le cas de My Money Bank, jusqu’à 3% pendant 3 mois, suivi de 0,7%.
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Marc Tempelman au micro de Laurence Aubron