Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.
De quoi allons-nous parler aujourd’hui ?
Je vous propose de parler du prix du gaz naturel, qui vient de tomber sous la barre des 30 euros par Megawatt heure. C’est le prix auquel cette ressource énergétique s’échangeait en juin 2021.
C’est-à-dire que nous avons retrouvé les prix avant que la Russie ne commence à réduire son approvisionnement de l’Europe.
Exactement. Et c’est remarquable, car suite aux mesures restrictives de la Russie, le prix du gaz avait plus que décuplé pour dépasser 340 euros par Mégawatt heure l’été dernier. Cette chute des prix souligne comment l’Europe a largement su s'accommoder de la militarisation de son approvisionnement en gaz naturel.
Expliquez-nous comment nous y sommes parvenus
Plusieurs facteurs ont contribué à ce rééquilibrage sur les prix.
Premièrement, nous avons diminué notre consommation énergétique, suite à la tension sur les prix. Selon l’Agence Internationale de l’Énergie, l’Union Européenne a réduit sa consommation de gaz naturel de 55 milliards de mètres cubes en 2022. Ce qui représente une baisse de 13%. Ce qui est le résultat d’un hiver plutôt doux, mais aussi d’une réelle réduction des besoins énergétiques dans certaines industries, combinée avec une production croissante d’énergies renouvelables, notamment solaires et éoliennes.
Deuxièmement, il faut aussi noter que l’Asie, avec qui l’Europe est en compétition pour le gaz naturel, a également réduit sa dépendance à cette ressource. Ce qui se traduit par une moindre concurrence, stimulant la baisse des prix.
Très bien, mais avec les approvisionnements de la Russie toujours en très forte baisse par rapport aux volumes historiques, l’Europe a dû puiser dans ses réserves de gaz. Ne doit-on pas craindre une nouvelle hausse des prix cet automne ?
Il est trop tôt pour le dire. Car les décideur·ses politiques sont prévoyant·es. Les gouvernements ont déployé beaucoup d'efforts pour reconstituer les réserves, fortement entamées l’hiver dernier. L’organisme Gas Infrastructure Europe estime qu’elles sont à nouveau remplies à 65%, ce qui nous laisse espérer qu’elles seront au niveau maximal avant le début de l’hiver. Car être déjà au deux tiers au mois de mai est très largement au-dessus du niveau moyen historique.
Qu’est-ce qui pourrait influer sur l’évolution du cours du gaz ?
Là aussi, plusieurs facteurs. Premièrement, la Russie, qui historiquement fournissait 40% des approvisionnements en gaz naturel à l’Europe, en représente toujours un peu moins de 10% aujourd’hui. Il s’agit de volumes de gaz qui nous parviennent via les gazoducs qui passent par l’Ukraine et la Turquie. La Russie pourrait donc réduire encore plus ses approvisionnements.
Deuxièmement, la demande concurrentielle pourrait augmenter, notamment de la part de la Chine, dont l’économie rebondit fortement depuis leur déconfinement.
Enfin, il faut garder un œil sur la météo. Plus l’hiver sera rude, plus les besoins en gaz naturel seront élevés.
Le mot de la fin ?
L’Agence Internationale de l’Énergie souligne la très grande variabilité possible du prix du gaz, selon l'évolution des différents facteurs dont nous venons de parler. Mais les mesures fortes et la grande réactivité des pouvoirs publics, pour réduire nos besoins énergétiques et en diversifier les sources sont telles qu'il est très peu probable de voir les prix du gaz s’envoler aux sommets atteints l’été dernier. Ce qui est une bonne nouvelle, car la maîtrise du prix du gaz contribue directement à la maîtrise, et la réduction de l’inflation.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.