L'éco de Marc Tempelman

Meta verse (enfin) des dividendes

@Duncan Rawlinson - Duncan.co / Flickr Meta verse (enfin) des dividendes
@Duncan Rawlinson - Duncan.co / Flickr

Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.

Nous accueillons Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee. Nous discutons toutes les semaines de finance. Bonjour Marc, de quoi allons-nous parler aujourd’hui ?

Je vous propose de discuter de Meta, la société qui chapote Facebook, Instagram et WhatsApp. Ce géant de la tech a profité de l’annonce de ses résultats annuels pour déclarer qu’elle allait verser des dividendes à ses actionnaires pour la première fois de son histoire.

Ah bon. Parce que à date, Meta ne l’avait jamais fait ? Je croyais que la société était pourtant profitable depuis longtemps.

Vous avez raison, Meta est même très profitable. Elle a réalisé 14 milliards de profits en 2023, et dispose de plus de 65 milliards de dollars de cash. L’entreprise dispose depuis des années de quoi verser des dividendes à ses actionnaires.

Mais alors, pourquoi ne pas en distribuer régulièrement ?

C’est un peu une mode dans le secteur de la tech. Les grandes sociétés innovantes ont pendant longtemps soutenu la thèse qu’elles ne distribuaient pas de dividendes à leurs actionnaires afin de pouvoir réinvestir la totalité de leurs gains dans le développement de nouveaux produits et services. La logique est des dirigeants est la suivante : plutôt que distribuer mes profits d’aujourd’hui, laissez moi les réinvestir, afin de produire des profits beaucoup plus gros dans quelques années.

Donc Meta n’est pas la seule à ne pas verser de dividendes ?

Non. Alphabet, le parent de Google et Amazon n’ont jamais distribué de dividendes non plus. Et Microsoft ne le fait que depuis 2003. Et quand Microsoft a pris cette décision, ce fut perçu par le marché comme une indication que les dirigeants de la société ne voyaient plus d’opportunité pour poursuivre la forte croissance de l’entreprise. Une sorte d’aveu de faiblesse.

Quelle a été la réaction du marché à l’annonce faite par Meta ? Est-ce que la décision de verser enfin des dividendes signifie que Mark Zuckerberg est à court d’idées et s’inquiète du futur de Facebook ?

C’est tout le contraire. Le cours de l’action de Meta s’est envolé et a pris 16% le jour de l’annonce. Car dans le cas de Meta, les investisseurs commençaient à s’inquiéter des orientations stratégiques que son dirigeant Mark Zuckerberg voulait prendre. Il avait signalé son désir d’investir les dizaines de milliards de cash de la boite dans le développement du metaverse. La création de ce monde virtuel pour tout le monde est un projet gigantesque que Mark Zuckerberg adore autant que ses actionnaires le redoutent. Ils y voient un puits sans fonds, dans lequel les profits générés par les réseaux sociaux de l’entreprise pourraient disparaître.

La décision d’en distribuer une partie aux actionnaires est donc applaudi comme un acte de gestion rationnel, par lequel les dirigeants soulignent la maturité de la société.

Est-ce que cela signifie va réduire ses investissements en recherche et développement ?

Pas tout à fait. Elle a annoncé vouloir verser 50 cents de dividendes par action trimestriellement. Ce qui représente une somme totale de 1,3 milliard de Dollars. C’est beaucoup, mais rapporté aux profits annuels et à sa trésorerie, cela reste modeste. D’ailleurs, Meta a aussi annoncé qu’elle prévoit des dépenses en capital de 30 à 37 milliards de Dollars en 2024. Entre autres pour financer la recherche et les investissements en Intelligence Artificielle.

Meta effectue aussi des rachats d’actions. Pour un actionnaire, c’est quoi la différence ?

Vous avez raison, le rachat d’action est l’autre méthode pour une entreprise de distribuer une partie de ses profits à ses actionnaires. Entre les deux méthodes, il existe quelques différences sur le plan fiscal. Mais sur le plan psychologique, le versement de dividendes est un signal plus fort. Car les rachats d’actions sont perçus comme une initiative qu’une entreprise peut décider d’arrêter facilement. Alors que les dividendes, une fois que vous avez décidé d’en verser, les actionnaires s’y habituent. Les réduire ou les couper totalement revient à signaler que l’entreprise rencontre de graves problèmes. Quelque chose que les dirigeants en place détestent faire.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.