Jeanne Gohier, vous revenez aujourd’hui sur le succès du film « Don’t look up ! » et sur les déclarations climato-sceptiques de l’entourage d’un candidat à l’élection présidentielle.
J’ai effectivement été frappée par ces propos qui contrastent le succès du film Don’t look up. Ce film qui est à voir, montre les difficultés extrêmes des scientifiques à se faire entendre des populations, des media et des politiques. Et ce même quand la communauté scientifique mondiale est d’accord pour prédire la pire des catastrophes ! Ladite déclaration politique de la semaine, qui met en doute le consensus scientifique sur le réchauffement climatique, alors que ce consensus existe aujourd’hui sur le réchauffement et ses causes humaines, fait un triste écho au film.
Et qu’en déduisez-vous ?
Tout simplement qu’il faut que chacun se forme et s’informe sur ce sujet pour se forger sa propre opinion. C’est pourquoi je souhaite suggérer à tous vos auditeurs quelques pistes très variées, parfois ludiques, pour se former sur le sujet.
C’est vrai que commencer par des rapports d’experts ne serait pas très engageant !
Absolument. La première étape pour aborder le sujet peut être de s’y sensibiliser. On peut penser ici à un jeu, La Fresque du Climat, auquel plusieurs centaines de milliers de personnes en France ont pris part. Avec des cartes, vous reconstituez en équipe la chaîne de causalités du réchauffement climatique C’est amusant et cela vous permet de bien comprendre les mécanismes à l’œuvre. Si vous vous renseignez, je suis sûre que vous trouverez un animateur près de chez vous !
Pour ceux qui n’auraient pas le temps où l’accès à La Fresque du Climat, vous avez d’autres idées ?
Oui, il y a bien sûr beaucoup de vidéos et de films sur le sujet. Regardez par exemple les documentaires de Cyril Dion. Le dernier, Animal, qui est plus sur la biodiversité, reste un excellent outil pour avoir envie de comprendre les évolutions de la planète. Ces films permettent de toucher les problèmes du doigt et d’avoir envie de s’y plonger. Il y a aussi beaucoup de ressources pour approfondir les connaissances sur le réchauffement climatique. La plupart des experts passent du temps à expliquer les choses et qu’on retrouve des entretiens des plus grandes personnalités accessibles à tous sur le net. Je pense par exemple à Jean-Marc Jancovici.
Effectivement Jean-Marc Jancovici est partout, sur les ondes, les réseaux sociaux et dans les librairies avec la bande dessinée « Le monde sans fin ». Pouvez-vous nous dire pour quelle raison il est opportun de le suivre ?
C’est un spécialiste du sujet et un esprit libre : par « libre », j’entends indépendant et compétent. Il s’intéresse au changement climatique depuis plus de 30 ans, et il se bat pour sensibiliser le plus grand nombre de personnes possibles : dirigeants, responsables d’entreprises, citoyens et consommateurs. C’est lui qui a inventé le « bilan carbone », c’est un grand expert de la transition écologique. Il a aussi du courage : c’est le plus célèbre écolo pronucléaire, s’attirant les foudres d’un grand nombre d’écologistes, et avertit que la décroissance va s’imposer à nous, qu’on le veuille ou non, s’attirant les foudres des « pro-business ».
Auriez-vous d’autres noms à conseiller pour ceux à qui le mot « décroissance » donne des boutons ?
On peut penser évidemment à Valérie Masson-Delmotte, une éminente climatologue française, co-présidente du groupe 1 du GIEC, en pointe contre le climato-scepticisme. Elle a d’ailleurs réagi à Don’t look up, soulignant que la réalité dépasse la fiction, ce qui n’est pas pour me rassurer …
Et auriez-vous d’autres media ou journalistes à nous conseiller ?
Il faut que chacun trouve le journaliste ou le spécialiste qui lui parle. J’apprécie par exemple Le Réveilleur, qui réalise de longues vidéos, techniques et détaillées. Il existe aussi des chaines spécialisées comme Time for The Planet : l’entretien du directeur RSE de Bouygues d’il y a quelques mois m’a beaucoup intéressé. Les petites vidéos du Monde sur le climat et la biodiversité sont également très pédagogiques : regardez par exemple celle sur les engrais chimiques.
Vous ne nous aurez pas beaucoup parlé d’entreprises et de finance aujourd’hui.
Oui c’est vrai. Je conclurai donc en disant, à l’instar de Virginie Raisson-Victor, co-fondatrice du Grand Défi des entreprises pour la planète, mon constat qu’un nombre croissant d’entreprises s’intéresse au sujet du réchauffement et de la transition, et qu’il convient de les encourager à s’y engager véritablement et aussi fermement que possible.
Jeanne Gohier au micro de Laurence Aubron
Jeanne Gohier est analyste sur la finance du climat chez Fideas Capital, qui propose aux Européens d’investir « Smart for Climate », c’est-à-dire de prendre en compte les enjeux du réchauffement climatique dans leurs placements.
Tous les éditos "Smart for Climate" de Jeanne Gohier sont à retrouver juste ici