Aux portes de l'UE

Les Géorgiens contestent les résultats des élections municipales dans une protestation massive à Tbilissi

Photo de Amiran Dateshidze sur Pexels Les Géorgiens contestent les résultats des élections municipales dans une protestation massive à Tbilissi
Photo de Amiran Dateshidze sur Pexels

Chaque semaine, Lyudmyla Tautiyeva nous propose un aperçu de ce qu'il se passe aux frontières de l'Union européenne, traitant de sujets divers tels que la gouvernance, l’entreprenariat, ou encore l'innovation.

Le samedi 4 octobre, les Géorgiens ont voté pour élire leurs maires et leurs conseillers municipaux. Mais pourquoi, le même jour, des milliers de personnes sont-elles descendues dans les rues de Tbilissi ? S’agissait-il seulement d’accompagner le scrutin ou bien d’exprimer une colère plus profonde contre le pouvoir en place ? Quels doutes, quelles inquiétudes ont poussé autant de citoyens à manifester en plein jour d’élection ?

Les élections municipales dont vous parlez se sont déroulées le 4 octobre et ont été remportées par le parti gouvernemental – le Rêve géorgien. Or, ce parti est accusé de dérive autoritaire pro-russe depuis 2024 lorsqu'elle a remporté les élections législatives dans un climat de pression russe via les campagnes de désinformation et les ingérences dénoncées par l’opposition. La victoire de ce parti qui a pris le versant pro-russe a couté aux Géorgiens leur place dans l’UE alors que le nouveau gouvernement géorgien a décidé de geler des négociations sur l'adhésion de la Géorgie à l'UE pour quatre ans. En 2024, les Géorgiens sont déjà sortis dans les rues à Tbilissi pour contester les résultats des élections et les décisions du nouveau gouvernement pro-russe sans que cela aboutisse à un changement. Plus encore, une vague de persécution des opposants politiques, militants et journalistes a été déclenchée.

Ce samedi 4 octobre, les Géorgiens ont de nouveau pris les rues de Tbilissi dans la manifestation organisée par les partis d’opposition pour contester les résultats des élections locales où le parti Rêve géorgien a remporté la majorité. Il faut souligner que les partis d’opposition - la « Coalition pour le changement » et le « Mouvement national unique » - ont boycotté ce scrutin municipal. Les rues de Tbilissi ont été inondées de manifestants avec des drapeaux de la Géorgie, de l'Union européenne, et de l'Ukraine, ainsi que des pancartes avec des slogans antigouvernementaux et des photos de prisonniers politiques arrêtés après les manifestations de l’année dernière.

Quelle a été la réponse du gouvernement géorgien face à cette mobilisation massive ? A-t-il choisi l’apaisement en appelant au dialogue, ou bien a-t-il adopté une attitude plus ferme pour tenter de contenir la contestation ?

D’abord, il faut savoir que les manifestants ont commencé par une marche de protestation vers le Parlement géorgien samedi après-midi. Autour de 18h les manifestants ont continué la marche vers le palais présidentiel. Il faut souligner que le président actuel de la Géorgie, Mikheïl Kavelashvili, a été élu le 14 décembre 2024 par le collège électoral à la majorité du parti Rêve géorgien et que sa légitimité est contestée par l’opposition.

À l’arrivée au palais présidentiel, une partie des manifestants ont tenté de pénétrer dans le palais alors protégé par les forces de l’ordre spéciales. La police a utilisé du gaz lacrymogène et des canons à eau pour repousser les manifestants du palais. Cinq militants ont été arrêtés. Après l’incident, une partie des manifestants s'est mise à ériger les barricades sur la place devant le palais présidentiel.

Le Premier ministre géorgien Irakli Kobakhidze a déclaré que les manifestants qui ont tenté de pénétrer dans le palais présidentiel voulaient faire un coup d’état, et a annoncé une nouvelle vague de répressions politiques et a accusé l'UE d'ingérence dans la politique géorgienne.

Quelle est la position de l’Union européenne face à la situation en Géorgie ?

L’UE dans la déclaration du haut représentant Kaja Kallas et du commissaire chargé de l'élargissement Marta Kos a souligné que les élections locales se sont tenues dans le climat de répression massive de la dissidence par le pouvoir en place. Il a également condamné les attaques personnelles contre l'ambassadeur de l’UE en Géorgie et a appelé au respect des droits des citoyens de se réunir et s’exprimer. Depuis les élections législatives d’octobre 2024 suivies par la décision du gouvernement Géorgien de rapporter les négociations sur l’adhésion de la Géorgie à l’UE, le froid s’est installé entre Tbilissi et Bruxelles. Plus tôt en 2024, Bruxelles a gelé le processus d’adhésion de la Géorgie à l’UE suite à l’adoption de la loi dit sur « les agents étrangers » à forte inspiration russe et visant à contrôler la société civile géorgienne.

La population géorgienne, elle, continue sa résistance au pouvoir pro-russe en place et réaffirme sa volonté de rejoindre la communauté des nations européennes. Soutenu par l’opposition, elle réclame de nouvelles élections législatives pour changer le cours autoritaire que le pays a emprunté.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.