Chaque semaine, retrouvez Les histoires d'Europe de Quentin Dickinson sur Euradio.
Cette semaine, vos Histoires d’Europe ont un nom, c’est celui de l’un des six pays-membres fondateurs, en 1952, de ce qui est devenu aujourd’hui l’Union européenne…
…et ce pays, c’est le Grand-Duché de Luxembourg. Pourquoi, justement, l’évoquer ces jours-ci ? me direz-vous. D’abord, parce qu’on n’a que peu l’occasion d’en parler et que justement, il vient d’être le théâtre d’un événement rare : l’avènement d’un nouveau Grand-Duc vendredi dernier.
Le Grand-Duc sortant avait méticuleusement préparé sa succession : il y a un an, il nommait Lieutenant-représentant son fils aîné, le Prince Guillaume, et se déchargeait progressivement sur lui de ses fonctions de chef d’État.
Et voici donc Guillaume (Guillaume V, en l’occurrence) Grand-Duc de Luxembourg à 43 ans, et son père, Henri, admis à faire valoir ses droits à une retraite bien méritée. Sachez enfin que le nouveau Souverain est l’époux de la désormais Grande-Duchesse-Consort Stéphanie, issue d’une très vieille famille de la noblesse belge et française ; le couple a deux fils, le Prince Charles, âgé de cinq ans, et le Prince François, deux ans.
C’était en effet l’occasion de parler du Luxembourg – une fois par règne, ce n’est pas excessif – mais il y a sûrement autre chose à raconter sur ce pays, qui paraît être sorti tout droit du Moyen-Âge, Quentin Dickinson ?...
Alors, effectivement, le Luxembourg existe depuis le Xe siècle, aux confins des civilisations germaniques et latines ; d’ailleurs, le nom Luxembourg (qui n’a rien à voir avec une quelconque allusion au luxe) dérive d’un mélange entre le bas-latin lucilin (petite) et le vieil-allemand burhuc (forteresse).
Pour l’anecdote - mais on m’assure que c’est le fait du hasard - l’avènement du nouveau Grand-Duc est tombé le même jour que celui de l’Unité allemande que fêtaient joyeusement les voisins de l’autre côté de la Moselle…
Revenons au défilé des siècles : comment ce petit territoire a-t-il pu survivre de façon autonome jusqu’à nos jours ?...
Essentiellement, jusqu’à la Révolution française, parce que militairement, le jeu n’en valait pas la chandelle, compte tenu des redoutables fortifications de la ville de LUXEMBOURG et du peu d’intérêt que présentait cette contrée peu peuplée et au relief tourmenté.
Promu Comté au XIe siècle, Duché au XVIe, le Luxembourg est annexé comme ses voisins par la France en 1792, et devient le Département des Forêts, dénomination qu’il gardera sous le Premier Empire.
Mais que se passe-t-il à la chute de celui-ci ?...
A la Conférence de VIENNE, en 1815, les alliés rebattent les cartes et retracent les frontières du Benelux actuel. Il est ainsi créé un Royaume-Uni des Pays-Bas, qui comprend la Belgique actuelle, sans régime d’autonomie particulière, ainsi qu’un Grand-Duché de Luxembourg dont le chef d’État est le souverain des Pays-Bas.
Mais les habitants du sud de ce royaume supportent mal la tutelle du gouvernement basé dans les provinces du nord, à La HAYE. En 1830, c’est la révolution belge et le début de la Guerre belgo-hollandaise, qui allait durer trois ans. Pendant ce temps, sans qu’à BRUXELLES on lui demande trop son avis, le Luxembourg s’est trouvé simplement annexé par la Belgique révolutionnaire, et ce, pendant près de dix ans.
Le Luxembourg reprend alors son statut antérieur d’union personnelle avec le monarque néerlandais, non sans avoir perdu définitivement près de la moitié de son territoire au profit de la Belgique, qui en fera sa neuvième province sous la dénomination pas vraiment originale de Province du Luxembourg.
Et l’indépendance totale du Grand-Duché a été acquise à quelle époque ?...
En 1866, déjà, la dislocation de la Confédération germanique, dont le Luxembourg faisait partie, marque le début d’une double tendance que l’on peut encore constater aujourd’hui : vers la souveraineté accomplie, bien sûr, mais aussi vers un statut international affirmé.
Le lien avec les Néerlandais sont définitivement rompus de façon étonnante : le Roi des Pays-Bas, toujours en même temps Grand-Duc de Luxembourg, meurt sans descendant mâle ; sa fille monte sur le trône néerlandais, mais son sexe ne lui permet pas d’accéder aux fonctions correspondantes au Luxembourg, en fonction d’un arrangement entre les différentes branches de la famille de NASSAU.
C’est donc le cousin Adolphe de NASSAU-WEILBOURG qui est désigné Grand-Duc de LUXEMBOURG, premier des désormais sept souverains exclusivement luxembourgeois.
La loi salique ayant été entretemps révoquée, deux de ceux-ci allaient être des femmes : Adélaïde (dont le règne fut marqué par la Grande guerre de 1914-1918) et Charlotte (contrainte à l’exil pendant la Seconde guerre mondiale).
Aujourd’hui, le Luxembourg est devenu un État prospère, multilingue, et un modèle d’intégration réussie des vagues d’immigration successives que son essor économique a attirées.
Mais ceci est une autre histoire, que je vous conterai une autre fois.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.