Aujourd'hui en Europe est un journal consacré aux actualités européennes du jour, réalisé par la rédaction d'Euradio à Bruxelles. Avec Thomas Kox, Baptiste Maisonnave, Paul Thorineau et Ulrich Huygevelde.
Au programme :
- Hubs de retour, pays “sûrs” et contribution par Etats : l’UE s’accorde sur sa politique migratoire
- Lituanie : les ballons biélorusses paralysent le pays, en état d’alerte
- La Commission ouvre une enquête sur Google (en plus de celle sur Whatsapp) pour utilisation illégale de données des citoyens
On commence ce journal en Italie. Le pays a conclu un accord au début de la semaine, avec les ministres de l’Intérieur de l’UE, lui permettant de mettre en marche deux centres de retour vers l’Albanie.
Oui, ce serait la première application concrète de ce projet de régulation du nombre de demandeurs d’asiles en Europe. Depuis lundi, les migrants irréguliers peuvent être renvoyés en dehors des frontières de l’UE, vers ces fameux “centres de retour”, puis vers des pays tiers dont ils ne sont pas originaires. Un détail : ces pays tiers doivent être considérés comme “sûrs”, et chaque Etat membre doit pouvoir conclure avec eux des accords de réadmission.
Dans le cas de l’Italie donc, en première ligne des routes migratoires vers l’Europe, Rome pourra désormais renvoyer les migrants irréguliers vers l’Albanie, où les attendent deux centres de détention pour, je cite le ministre italien de l’intérieur, Matteo Piantedosi, “la mise en oeuvre de procédures frontalières accélérées”. En d’autres termes, y seront envoyés les migrants adultes de sexe masculin, pour traiter rapidement leurs demandes et organiser leur retour.
Mais derrière ce que le ministre italien qualifie de résultat “très satisfaisant”, c’est surtout un durcissement majeur de la politique migratoire de l’UE que viennent d’approuver les 27.
Oui, à commencer par la mise en place de sanctions renforcées pour les migrants qui refusent de quitter le territoire européen : ils pourraient perdre ou voir réduit certaines de leurs prestations et allocations sociales, leur permis de travail, voire être envoyés en prison. “Un tournant de la réforme européenne de la migration et de l’asile” a déclaré le commissaire européen chargé des migrations, Magnus Brunner.
La gestion des demandeurs d’asile faisait l’objet de nombreux débats à Bruxelles ces derniers mois, notamment en ce qui concerne le rôle de chaque Etat membre : renvoyer, accueillir, financer le déplacement des migrants… mais aussi et surtout sur la légalité et l’efficacité des ces hubs de retour. Les partis de gauche et les associations déplorent des violations de droits humains, voire, dans le cas de Mélissa Camara, eurodéputée française, “un renoncement aux valeurs européennes fondamentales”.
On poursuit ce journal en Lituanie, qui a déclaré hier l’état d’urgence suite aux intrusions répétées de ballons, en provenance de Biélorussie, pour la plupart chargés de cigarettes de contrebande.
Oui, le déclenchement de l’état d’urgence mardi vient planter le clou dans une situation qui dure depuis plusieurs semaines. Des ballons météorologiques, de trois à quatre mètres de haut, flottent jusqu’aux terres lituaniennes. Les conséquences sont nombreuses : fermeture des aéroports, déroutage des avions à une vingtaine de reprises, le tout dans un contexte de tensions militaires et politiques entre les deux pays.
Fin octobre, Vilnius avait déjà décidé de fermer sa frontière avec la Biélorussie. Si le gouvernement est rapidement revenu sur sa décision, mis sous pression par les entreprises de transport nationales, plusieurs camions lituaniens sont toujours retenus par Minsk. En représailles, la Lituanie menace de fermer les chemins de fer qui mènent à l’enclave russe de Kaliningrad.
Et cette problématique de ballons, Baptiste, est considérée comme une attaque “hybride” par la Lituanie.
Oui, la Lituanie, membre de l’UE et de l’OTAN, voit dans ces transports de contrebande une tentative directe d’impacter sa sécurité et son économie. rappelons-le le Belarus est totalement inféodé à Moscou. Lors de la révolution biélorusse de 2020, seule l’intervention de Vladimir Poutine avait permis au dictateur Alexandre Loukachenko de se maintenir au pouvoir alors que des manifestations de masse avaient failli le faire tomber ; et c’est depuis le territoire biélorusse que les troupes de Moscou avaient lancé leur assaut sur Kiev dans les premiers jours de l’invasion en février 2022.
Après l’Ukraine, la Lituanie craint d’être la prochaine cible de Moscou. La semaine dernière, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, faisait elle aussi part de ses craintes : l’incursion de ballons constitue, selon elle, “une attaque hybride complètement inacceptable”. Elle a alors annoncé que l’UE préparait une série de mesures à l’encontre de Minsk.
On termine ce journal à Bruxelles, où la Commission européenne a décidé d’ouvrir une enquête contre Google après, rappelez-vous, celle lancée contre Meta jeudi dernier. Elle reproche au géant du numérique d’utiliser illégalement les données des éditeurs, sans leur demander leur avis.
Oui, une problématique qui concerne très probablement votre utilisation de la plateforme de recherche en ligne. Vous l’avez remarqué, elle propose depuis peu un outil d’IA pour répondre à vos questions ou résumer les résultats obtenus lors d’une recherche. Le même outil qui intéresse justement la Commission, car il pourrait bien être entraîné sur une base de données à laquelle il n’a légalement pas accès.
Concrètement, deux choses posent problème à Bruxelles : l’utilisation, d’abord, par Google, de contenus et de vidéos sans compensation ni possibilité de refuser librement pour les créateurs de contenu en ligne. La plateforme se servirait de ces données pour entraîner ses IA, sans respect donc des droits de propriété intellectuelle.
Dans un deuxième temps, la Commission suspecte Google de s’accorder un avantage par rapport à ses concurrents qui, eux, n’ont pas accès aux vidéos YouTube par exemple pour entraîner leurs intelligences artificielles.
L’IA serait donc utilisée pour défavoriser les autres acteurs du marché ?
C’est en tout cas ce qui avait également été reproché à Meta jeudi 4 décembre. Le groupe de Mark Zuckerberg, en installant son propre service sur toutes ses plateformes, ce qui concerne tout de même Whatsapp, Instagram ou Facebook, avait été accusé de pratiques anticoncurrentielles.
Au-delà de ces enquêtes, la Commission tente, tant bien que mal, de transformer sa régulation dans le secteur : le Digital Service Act et le règlement européen AI Act notamment, sont jugés insuffisants par de nombreuses organisations d’ayants droits.
Un journal de Baptiste Maisonnave, Ulrich Huygevelde et Paul Thorineau.