La Pologne attaquée en justice après la mise en place de son nouveau régime disciplinaire judiciaire ; le directeur de Frontex auditionné pour violation des droits de l'homme à l'encontre de réfugiés ; indépendance de l'Ecosse, la première ministre écossaise demande un nouveau referendum.
Cinq pays européens attaquent la Pologne en justice ! La Belgique, le Danemark, les Pays-Bas, la Finlande et la Suède se joignent à la Commission européenne. Mardi, leurs avocats se sont exprimés devant la Cour de Justice de l’Union européenne. Ils reprochent à la Pologne son nouveau régime disciplinaire pour les juges. Pouvez-vous nous expliquer de quoi il en retourne ?
La Commission a lancé plusieurs procédures en infraction au droit européen à l’encontre de la Pologne. L’une d’elles concerne ce fameux régime disciplinaire. Voté en 2015, il permet à l’exécutif de sanctionner les juges sur base du contenu de leurs décisions. Les juges peuvent voir leur immunité levée, leur salaire diminué ou simplement être relevé de leur fonction. Un autre problème est que le tribunal disciplinaire en charge de ces sanctions est composé de juges nommés par le parlement. Le parlement aujourd’hui justement gouverné par le parti conservateur au pouvoir.
Si la Pologne est condamnée, elle pourrait se voir infliger des sanctions financières, en cas de non respect de la décision. Les Etats membres sont autant responsables que la Commission pour l’application du droit européen. Ils peuvent donc participer à ce type de procédure.
La Commission dénonce depuis plusieurs années les réformes anti-démocratiques de Varsovie. Ce régime disciplinaire porte atteinte à l’indépendance du système judiciaire.
En effet ! Pour Bruxelles, il s’agit là d’une atteinte intolérable à l’état de droit et au principe de la séparation des pouvoirs. En effet, c’est un principe démocratique fondamental. Il existe trois pouvoirs, législatif, exécutif et judiciaire. Dans une démocratie saine, ces trois pouvoirs se contrebalancent les uns les autres. Le régime polonais permet donc au gouvernement d’influencer le système judiciaire.
La vice-ministre de la justice polonaise, Anna Dalkowska, a nié cette interprétation. Selon elle, cette réforme permet d’assurer que les juges ne soient pas au-dessus de la loi. Elle assure également qu’il s’agit de réformer un système judiciaire resté tel quel depuis la chute du communisme.
La Cour de Justice se prononcera d’ici la fin de l’année.
Intéressons-nous maintenant à Frontex ! Il s’agit de l’agence européenne de protection des frontières de l’UE. Mardi, son directeur, Fabrice Leggeri a été auditionné par les eurodéputés. Cette audition suit une enquête qui a révélé des violations des droits de l’homme dans la gestion des flux de réfugiés.
En effet, en octobre, une enquête réalisée par plusieurs ONG et médias européens a accusé Frontex de refouler des réfugiés. Il s’agit d’une pratique illégale selon le droit international. Il est interdit de refouler des réfugiés avant d’avoir traité leur demande d’asile. Ceci pour s’assurer de ne pas les refouler vers leur pays d’origine où ils risquent des traitements dégradants, voire la mort.
Mardi, une heure durant, Fabrice Leggeri, le directeur de Frontex, s’est défendu de ces accusations. Il a rejeté la faute sur les Etats membres, ici la Grèce en l’occurrence. Pourtant, des gardes-frontières suédois de Frontex affirment avoir été invités à ne pas consigner les violations des droits de l’homme.
Quelle a été la réaction des eurodéputés face à cette défense ?
Les réactions les plus fermes viennent des libéraux et de la gauche européenne. Plusieurs députés socialistes ont demandé sa démission. Les verts européens ont exigé la création d’une commission d’enquête.
Terminons en évoquant les velléités d’indépendance de l’Ecosse ! Lundi, la première ministre écossaise, Nicola Sturgeon a déclaré qu’elle allait demander à Londres l’organisation d’un nouveau référendum. La répartition des pouvoirs au Royaume-Uni est déjà fortement décentralisée. Néanmoins, l’indépendance de l’Ecosse est un thème récurrent.
Tout à fait ! Nicola Sturgeon demandera un nouveau référendum d’indépendance si son parti remporte les législatives écossaises en mai. Je dis bien nouveau, car les écossais ont déjà été appelés aux urnes sur cette question. Le 18 septembre 2014, ils ont répondu à la question : L’Ecosse devrait-elle être un pays indépendant ? 55,3% des écossais avaient alors choisis de rester au sein du Royaume-Uni.
Aujourd’hui, la donne a changé. Cette idée s’inscrit dans le sillage du Brexit. En 2016, l’Ecosse a majoritairement voté pour rester dans l’Union européenne.
Oui, l’idée d’un nouveau référendum a recommencé à avoir le vent en poupe juste après le Brexit. Les Ecossais n’ont pas accepté facilement le fait de devoir quitter l’UE. En 2019, aux élections législatives du Royaume-Uni, le parti national écossais a remporté une grande victoire. Le thème est revenu en force dans le débat public. La crise sanitaire a également joué un rôle. Elle a révélé des divergences concernant la gestion de la pandémie entre Edimbourg et Londres.
Selon les sondages, les Ecossais sont majoritairement en faveur de l’indépendance. Néanmoins, Boris Johnson, le premier ministre britannique est fermement opposé à tout nouveau référendum. Pour organiser un tel vote, l’Ecosse a besoin de l’accord du gouvernement britannique.
Victor D’Anethan – Thomas Kox
crédits photo: S. Hermann & F. Richter