Qu'il s'agisse des tractations pour la composition des listes, du droit de vote à 16 ans adopté dans certains pays de l'Union européenne (UE) pour cette élection, ou du nombre d'eurodéputés dont disposera chaque pays, cette chronique vous permettra de suivre de toute les semaine sur euradio l'évolution de la campagne des élections européennes de 2024 au gré de son actualité.
Matthieu Maillard, vous nous parlez aujourd’hui de l’eurobaromètre qui est paru dans le Figaro il y a deux semaines, qui concernait la confiance des Français•ses dans l’UE, à quelques mois des élections, quel est l’état d’esprit du pays ?
Et bien il faut reconnaître que ce dernier eurobaromètre n’incite pas à l’optimisme. En effet, 55 % des Français•es interrogé•es au printemps dernier se sont montré•es méfiant•es à l’égard de l’UE, contre 34 % qui ont affiché leur confiance et 11 % qui n’ont pas donné leur avis. On aurait pu penser qu’avec le plan de relance européen à la suite de la crise du covid, puis la guerre en Ukraine, le sentiment pro-européen allait croître, mais il n’en est rien.
Pourtant historiquement les Français•es ont plutôt été favorables à l’UE ?
Oui, du début des années 1950 aux années 1980, L’Hexagone était même l’un des États les plus europhiles. Entre 52 % et 68 % des Français•ses dans les années 1970 estimaient que « l'appartenance de la France à l'Union européenne était une bonne chose », d’après un eurobaromètre de l’époque. En 1987, cette confiance a même atteint les 74 % au moment de l’entrée en vigueur de l’Acte unique européen et, lorsque Jacques Delors était président de la Commission et avait ouvert la voie à la monnaie unique.
Mais alors que s’est-il passé pour que cette confiance dégringole ?
Dès le début des années 90, la méfiance commença peu à peu à se faire sentir chez les Français•ses. Lors du référendum de 1992 sur le traité de Maastricht, 51 % des personnes interrogées y étaient favorables, contre 49 %, ce qui montrait déjà les prémices d’un pays divisé. Ce sentiment n’a ensuite fait que croître. Les Français•ses n’ayant pas confiance en l’Europe ont fini par devenir majoritaires dès 2004, et ce, alors que l’UE s’élargissait vers les pays d’Europe centrale et orientale. En 2005, lors du référendum sur le traité constitutionnel européen, près de 55 % des électeurs•rices ont refusé cette étape politique pour la construction européenne. Il faut noter qu’à l’époque, hormis la France et les Pays-Bas, tous les pays s’étaient exprimés favorablement, ce qui montre l’isolement de la France sur le sujet.
Globalement de 2004 à 2010, la majorité varie entre méfiance et confiance, avant que la méfiance ne s’installe durablement. Depuis 2010, les Français•ses sont entre 55 % et 70 % à se méfier de l’UE, tandis que la confiance ne cesse de baisser.
Les Français•ses veulent-ils pour autant un frexit ?
Non absolument pas. Si beaucoup de partis politiques, et particulièrement les extrêmes, ne cessent de critiquer l’Europe, ils ne veulent pas en sortir ce qui peut sembler un peu paradoxal. Si la France insoumise comme le Rassemblement national ont appelé en 2019 à réviser les traités européens, ils n’ont pas exprimé contrairement à des positions passées, leur souhait de quitter définitivement l’Union européenne. En 2022, au moment de la présidence française du conseil de l’UE près de deux français sur trois souhaitaient tout de même que la France reste dans l’UE. Ce sujet ne devrait donc pas forcément être au cœur de la campagne, en revanche le degré d’appartenance à l’UE sera lui prépondérant.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.
Sources :