Une chronique de Christine Le Brun, Experte Smart Cities & Places chez Onepoint, où nous parlerons de villes, d’outils et de technologies numériques, de données, mais aussi des citoyens et de ceux qui font les villes.
Bonjour Christine, pour faire suite à la chronique de la semaine dernière, vous allez continuer à nous parler de la place du citoyen dans la ville intelligente et vous allez nous parler des plateformes de démocratie participative. Est-ce que vous pouvez commencer par nous décrire ce qui se cache derrière ce nom que je trouve peut-être un peu… ronflant ?
Oui, ce n’est pas faux, il y a un côté un peu ampoulé. Parfois on les désigne aussi comme plateformes de participation citoyenne, ce qui est un peu plus imagé. En réalité le concept est assez simple. Il s’agit de sites internet que les villes utilisent pour proposer aux citoyens de participer à divers processus de consultation, et donc de peser dans les décisions qui sont prises.
Et comment ça se passe concrètement, qu’est-ce qu’on y trouve ?
On trouve 2 grandes catégories d’outils sur ces plateformes. La première concerne la consultation de manière générale. La seconde vise à proposer des idées.
La consultation consiste à recueillir l’avis de la population sur divers sujets. Par exemple les aménagements, les besoins en transports en commun, ou encore les horaires d’ouverture des services publics. Des questions précises sont posées en lien avec le sujet et le public répond, par exemple en mode « pour, contre, ou avis mitigé ». Cela permet à la municipalité de prendre en compte les avis des utilisateurs finaux et d’ajuster ses projets.
Cela peut aussi prendre la forme d’un vrai vote, par exemple pour donner la possibilité de choisir entre plusieurs versions d’un même projet d’aménagement, comme une aire de jeux pour enfants par exemple. C’est même possible pour des projets plus structurants comme de savoir ce qu’on fait d’une zone qui est rendue aux piétons, là où auparavant il y avait du trafic automobile.
Et pour la deuxième catégorie, les propositions ?
Alors ici, on va plus loin, en offrant la possibilité aux citoyens de proposer eux-mêmes leurs idées pour améliorer leur cadre de vie. Au niveau des outils possibles, il y a l’appel à projets, la simple boite à idées, mais la plus connue est le budget participatif. Cela existe maintenant dans beaucoup de villes, et même, à l’échelle de certaines régions ou départements. Le principe c’est que la collectivité sanctuarise un budget, mettons 100 000 euros, qui seront dédiés à la réalisation de projets proposés par les citoyens. Le processus comprend 5 étapes. Premièrement, n’importe quel citoyen peut proposer un projet, par exemple créer un Repair café, où l’on pourra déposer ses objets en panne et les faire réparer plutôt que de les jeter et d’en acheter d’autres. Dans un deuxième temps, la ville analyse la faisabilité des projets, puis le public est invité à voter pour un ou plusieurs projets. Ensuite, on passe à l’annonce des lauréats et à la mise en place d’un calendrier de réalisation qui pourra également être suivi sur la plateforme. Il y a même maintenant des budgets participatifs thématiques, par exemple en faveur de l’environnement ou du handicap. Personnellement je trouve que c’est vraiment un dispositif très intéressant, avec en plus un aspect pédagogique intéressant pour les plus jeunes (et les moins jeunes aussi d’ailleurs), à qui l’on peut faire toucher du doigt la complexité des choix dans l’aménagement d’une ville.
Finalement qu’est-ce que les collectivités attendent de ces plateformes ?
L’objectif transversal derrière la mise en place de ces plateformes est de se rapprocher des citoyens et d’innover dans la manière d’administrer la ville en les impliquant à différentes étapes. L’idée est aussi qu’ils puissent exprimer leurs idées et contribuer à dessiner leur cadre de vie telle qu’ils le désirent vraiment. Pour la ville, cela permet de mieux percevoir les besoins de leurs administrés, d’incorporer ces retours terrains dans la planification, et donc de favoriser l’adhésion aux politiques qui sont mises en œuvre.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.