Tous les mardis, euradio vous présente Quoi de neuf à Bruxelles, la chronique présentée par les étudiants bordelais de l’association Perspective Europe.
Aujourd’hui, nous faisons le point sur les faits marquants de l’actualité bruxelloise. On commence avec les discussions sur l’entrée de la Bulgarie et de la Roumanie dans l’espace Schengen.
En effet, malgré leur statut d'État membre, les deux pays ne font pas partie de cet espace de libre circulation des personnes créé en 1985. Mardi dernier, les eurodéputé·es ont adopté une résolution qui appelle le Conseil de l’Union européenne à leur permettre d’adhérer à l’espace Schengen.
Pourquoi ils n’en font toujours pas partie ?
Et bien, tout comme l’entrée dans l’UE, l’adhésion à l’espace Schengen est conditionnée au respect de différents critères, dans le but de garantir la sécurité à l’intérieur de la zone. En particulier, il faut s’assurer que l'État concerné est en capacité de contrôler les frontières extérieures de l’espace et ça c’est un enjeu important étant donné la localisation des 2 pays surtout dans un contexte de flux migratoires importants.
Ce n’est donc pas le cas de la Roumanie et de la Bulgarie ?
En réalité, c’est un petit peu plus compliqué. Dès 2010, la Commission européenne et le Parlement ont estimé que les deux pays étaient aptes à accéder à Schengen mais des États comme la France et les Pays-Bas s’y sont opposés à plusieurs reprises. Comme l’adhésion d’un nouvel État demande un vote à l’unanimité, cet accès a été rejeté systématiquement (il y avait tj un État qui s’opposait). Le Parlement néerlandais a par exemple affirmé que cette adhésion poserait un risque sécuritaire et a pointé les problèmes de corruption qui minent le fonctionnement de la démocratie.
Comme toujours, la question de l’unanimité semble ralentir les processus. Penchons-nous maintenant sur un autre texte de loi européen qui fait parler de lui : le règlement REACH, qui fait l’objet d’un plan de révision pour l’interdiction des substances nocives pour la santé et l’environnement.
Oui, c’est un autre événement qui a particulièrement fait parler de la Commission cette semaine et qui touche le Pacte vert de la Commission. La révision du règlement REACH, véritable pilier de la stratégie, a été reportée à la fin de l’année 2023. Le texte, qui est assez révolutionnaire et surtout qui est le fruit d’efforts considérables du groupe social démocrate et des écologistes, risque de ne pas aboutir étant donné les changements politiques à venir d’ici 2024.
Et pourquoi ce report ?
Et bien plusieurs eurodéputés ont déjà dénoncé l’action des lobbies des industries chimiques qui défendent les intérêts de groupes comme Bayer , qui est le plus connu d’entre eux. Pour eux, évidemment, la révision du règlement dont on parle, c’est l’interdiction de substances qu’ils fabriquent et commercialisent, ça va totalement à l’encontre de leurs intérêts et de leur capacité à faire des profits.
Est-ce que les lobbies sont les seuls acteurs de ce report ?
Non, et c’est sans doute pour ça que leur opposition a été fructueuse : ils ont été soutenus par le Parti populaire européen et Thierry Breton, commissaire au marché intérieur et à l’industrie. Ces derniers ont argumenté en faveur d’un report puisque, selon eux, la révision met en péril la stabilité des industries touchées par l’augmentation des prix de l’énergie, elle-même liée à la crise ukrainienne.
Restons dans ce champ et abordons le problème énergétique qui secoue l’Europe en ce moment.
En effet, la Commission vient de publier une feuille de route proposant une ébauche des mesures à prendre pour faire face à l’augmentation des prix de l’énergie. C’est le produit de nombreuses et âpres discussions entre les chef·fes d’État des 27.
De quelle nature est ce paquet de mesures ?
On a d’une part une stratégie qui vise à appuyer les achats communs de gaz à l’échelle de l’Union avec un objectif à hauteur de 15% des stocks pour l’hiver 2023. D’autre part, les Vingt-Sept ont plaidé pour une “accélération des négociations” avec des pays producteurs considérés comme “fiables”; on pense aux États-Unis ou à la Norvège. Enfin, la Commission cherche à développer un mécanisme temporaire européen, qui permettrait de plafonner le prix du gaz à l’échelle de l’Union.
Maintenant que les EM disposent de cette feuille de route, quelle est l’étape suivante ?
Et bien à présent il faut que les ministres de l'énergie des EM se l’approprient, qu’ils déterminent à quel point ils pourront mettre en œuvre les mesures définies. Ce n’est qu’une feuille de route et pas encore un texte législatif contraignant et on s’attend encore à des négociations et des rejets notamment de la part du gouvernement allemand.
D’ailleurs, pourquoi le gouvernement allemand semble-t-il faire cavalier seul parmi les 27 ?
Déjà, le chancelier Scholz avait été accusé d’égoïsme après avoir annoncé, fin septembre, un plan de soutien à 200 milliards d’euros pour l’économie allemande, non concerté avec ses partenaires. Il faut aussi savoir que la feuille de route contient plusieurs concessions accordées au pays dont la position vis-à-vis de la Russie est plus complaisante que celle, par exemple, de la France.
Chronique réalisée par Laurence Aubron.