Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.
Nous accueillons Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee. Nous discutons toutes les semaines de finance. Bonjour Marc, de quoi allons-nous parler aujourd’hui ?
Bonjour. De nombreux investisseurs se demandent quels indicateurs suivre afin de deviner ou anticiper l’évolution des cours de bourse. Une des techniques consiste à observer le comportement des dirigeants des grandes sociétés.
Il va falloir nous en dire un peu plus. En quoi les achats ou les ventes d’actions effectués par des dirigeants de sociétés peuvent nous aider ?
Il s’agit de s’intéresser aux positions que prennent les PDG ou Directeurs Financiers sur les actions de la société qu’ils dirigent. Par construction, ils la connaissent très bien. Donc si ils achètent des actions de leur propre société, c’est que l’entreprise va bien et qu’ils estiment que le marché sous-estime ses perspectives de croissance. Inversement, s’ils vendent les actions de l’entreprise, c’est peut-être qu’ils anticipent un ralentissement des ventes. Et qu’ils craignent une baisse du cours de bourse.
Deux questions me viennent. La première, est-ce que les dirigeants ont le droit d’acheter et de vendre les actions de l’entreprise qu’ils dirigent ?
Oui, mais ces activités d’achat ou de vente sont encadrées, afin d’éviter les soupçons de délit d’initiés. Typiquement, les plus hauts cadres de l’entreprise sont interdits de vendre ou d’acheter des titres dans les semaines précédant les grandes annonces de résultats financiers.
La seconde, comment peut-on connaître leurs ordres d’achat ou de vente ?
Cela fait partie des règles strictes auxquelles ces directeurs sont soumis. Leurs transactions sont rendues publiques. Il existe même des sites dédiés au suivi de ce type de transaction, car de nombreux investisseurs les prennent en compte dans leurs prises de décision et la sélection de leurs valeurs.
Et actuellement, les dirigeants sont-ils plutôt acheteurs (c’est-à-dire confiants) ou vendeurs (c’est-à-dire anxieux) ?
Figurez-vous qu’ils sont plutôt vendeurs actuellement. Des grands entrepreneurs, comme Jeff Bezon, fondateur d’Amazon, ou encore Mark Zuckerberg de Facebook, ont récemment vendu pour des centaines de millions de Dollars d’actions de leurs entreprises. Selon Verity LLC, une société spécialisée dans le suivi de ces transactions, les volumes de vente dépassent dix fois les volumes d’achat par les dirigeants de société au 1er trimestre de 2024. C’est un niveau record depuis le 1er trimestre de 2021.
Cela veut-il dire que ces entrepreneurs anticipent la chute du cours de bourse des entreprises qu’ils dirigent ?
C’est là où ça devient compliqué. Premièrement, il est commun que des fondateurs monétisent une partie des actions qu'ils détiennent dans leurs entreprises. Quand Mark Zuckerberg vend pour 135 millions de Dollars de Meta en février, cela peut paraître comme une somme gigantesque, mais après cette vente, il détient toujours 13,5% de Meta, ce qui fait de lui le premier actionnaire de l’entreprise.
Deuxièmement, ces ventes peuvent tout à fait s’accroître lorsque les dirigeants ou fondateurs se désengagent de la société. Jeff Bezos a vendu 50 millions d’actions d’Amazon pour 8,5 milliards de Dollars en février, mais n’oublions pas qu’il a formellement démissionné de son rôle de PDG en 2021.
Troisièmement, de nombreux dirigeants d’entreprises ont vendu moins d’actions que d’habitude en 2022 et 2023, quand la bourse se portait moins bien. Il y a donc sans doute un petit phénomène de rattrapage qui a lieu.
Je sens qu’il y a un “mais” ?
Oui vous avez raison. On ne peut s’empêcher de penser que les dirigeants profitent des niveaux records que les cours de bourse ont atteint pour cristalliser une partie de leur richesse, afin de diversifier leur patrimoine. N’oublions pas que pour des entrepreneurs fondateurs, une très grande partie de leur patrimoine est constitué des parts qu’ils détiennent dans leur société. C’est donc parfaitement légitime. Mais il s’agit d’un signal clair qu’ils n’excluent pas une correction boursière dans les mois à venir.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.