Chaque semaine sur euradio, retrouvez Marc Tempelman, le cofondateur de l’application d’épargne gratuite Cashbee, qui traite les sujets et les actualités de la finance.
De quoi allons nous parler aujourd'hui ?
Je vous propose aujourd’hui de parler de la dette des États-Unis. Ou plutôt du plafond de la dette que les US se fixent et dont ils s’approchent à grand pas.
D’accord. En quoi consiste ce plafond de dette ? Car il me semble que c’est un concept très américain.
En effet, à part le Danemark, le concept d’une limite formellement imposée par les pouvoirs politiques sur le montant de la dette de l’État est une distinction américaine. Dans ce pays, le gouvernement ne peut pas s’endetter au-delà d’un plafond, fixé par le Congrès. Cette limite est aujourd’hui établie à 31 400 milliards de Dollars aujourd’hui. Or, la dette publique américaine ne cesse de croître et vient récemment de dépasser la barrière symbolique des 31 000 milliards de Dollars. Et les spécialistes estiment que la limite sera atteinte dans les semaines à venir.
Je vois bien le problème en théorie, mais ne suffirait-il pas de tout simplement augmenter cette limite ?
Oui, sur papier. Mais pour cela il faut l’accord du Congrès et celui-ci est majoritairement constitué de Républicains. Une bonne partie d’entre eux, sous l’influence d’un certain Donald Trump, exigent d’associer toute révision du plafond de la dette avec d’importantes coupes dans le budget de l’État. Les Démocrates, et notamment le Président Biden, ne sont pas du même avis. Sans issue pour l’instant, nous nous rapprochons donc d’un scénario de “shutdown”.
“Shutdown” qui signifie “fermeture” en français. Dans la pratique, il se passerait quoi ?
Depuis 1977, les États-Unis ont connu 19 “shutdown”, c’est-à-dire des instances où, faute d’accord sur le plafond de la dette, le gouvernement américain s’est retrouvé en incapacité de payer son administration. Les fonctionnaires non essentiels sont alors mis au chômage, les agences fédérales se retrouvent paralysées, les musées ferment, tout comme les services fiscaux. Typiquement, les shutdowns ne durent que quelques jours, car cette situation désastreuse stimule les opposants politiques à trouver un compromis très rapidement.
Par ailleurs, j’imagine que cela coûte très cher ?
Oui, cela coûte en effet des milliards à l’économie américaine. Mais une situation de shutdown coûte certainement beaucoup moins qu’un défaut souverain, qui constitue - en théorie - la seconde conséquence d’un blocage sur le plafond de la dette. En effet, si aucune solution n’est trouvée, les États-Unis se retrouveraient à ne plus pouvoir honorer les paiements des intérêts et le remboursement de leur dette nationale.
Je comprends qu’il s’agit d’un scénario aujourd’hui perçu comme peu probable, mais s’il se produisait, que devrions nous craindre ?
Ce serait une catastrophe économique dont l’onde de choc se propagerait bien au-delà des frontières des USA. Car un défaut souverain des États-Unis ferait chuter la confiance des investisseurs dans le système financier le plus important de la planète. Les taux d’intérêt en dollars bondirait (car les prêteurs feraient moins confiance à l’État américain). Les banques américaines souffriraient et l’économie américaine, qui est un des engins de la croissance mondiale, se retrouverait en récession. Dans un tel scénario, une forte correction sur l’ensemble des places financières serait probable.
Peut-on éviter ce scénario catastrophe ?
Pour finir sur une note positive, je souligne que les États-Unis y sont parvenus à 19 reprises dans le passé.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.