Chaque semaine, Jacob Ross chercheur au Deutsche Gesellschaft für Auswärtige Politik (DGAP), revient pour nous sur les liens qui unissent la France et l'Allemagne.
Jacob Ross, Vous avez découvert la France à travers vos études et premières expériences professionnelles. Qu'est-ce qui vous a particulièrement marqué lors de vos premiers séjours en France ?
Je suis moi-même un produit de la coopération historique entre la France et l’Allemagne : je n’ai pourtant pas de parent français. J’ai découvert la France grâce à des échanges scolaires, au cours de mes études franco-allemandes et avec mes premières expériences professionnelles, auprès d'une députée franco-allemande à l'Assemblée Nationale à Paris. J’y suis resté et j‘en ai fait mon travail. Aujourd’hui je suis expert des relations franco-allemandes.
Ce rôle d’expert en relations franco-allemandes implique de comprendre l’évolution de cette coopération. À votre avis, quels sont les principaux changements que cette relation a connus depuis le traité de l'Élysée en 1963 ?
Celles-ci ont beaucoup changé depuis que Charles de Gaulle et Konrad Adenauer ont signé le Traité de l'Élysée en 1963. On a vu combien, au cours de l'année dernière, lors des célébrations du 60e anniversaire de ce Traité, cette relation est extraordinaire.
Il semble pourtant qu’aujourd’hui, cet intérêt pour le pays voisin ait diminué. À quoi attribuez-vous ce recul d'intérêt de part et d'autre du Rhin ?
L'intérêt pour le voisin a sensiblement diminué des deux côtés du Rhin. Des instituts culturels allemands ont récemment été fermés en France, par manque d’intérêt. La langue du pays partenaire est de moins en moins apprise par les jeunes et ceux qui cherchent l'aventure à l'étranger et qui en ont les moyens partent étudier ou voyager en Asie ou aux États-Unis plutôt qu’en Allemagne ou en France.
Il reste pas mal à découvrir dans chacun des deux pays. Selon vous, quels aspects des cultures française et allemande continuent de surprendre ceux qui passent de l’un à l’autre ?
Nos deux pays ont toujours été très différents, il y a plein de choses à découvrir. Celui qui franchit pour la première fois la frontière en ouvrant les yeux et les oreilles et qui s'aventure hors des aéroports et des gares, celui qui prend un peu plus de risques que de commander un café chez Starbucks, sera surpris de voir à quel point nos pays sont différents. 60 ans d'échanges politiques, économiques et culturels étroits n'en ont pour l'essentiel rien changé.
« Warum in die Ferne schweifen, wenn das Gute liegt so nah ? » dit un proverbe allemand. Je traduis grossièrement : Pourquoi chercher loin quand les bonnes choses sont si près ? Je suis convaincu que la France et l'Allemagne ont encore beaucoup à s’offrir mutuellement. Si les nouvelles générations retrouvent un intérêt pour leur environnement proche – au-delà des questions climatiques et de consommation – nos deux pays ainsi que l’Europe y ont beaucoup à gagner. Les différences que ceux qui partent à la découverte vont rencontrer sont souvent les mêmes qui rendent la coopération politique entre nos deux pays très difficile aujourd'hui. Je peux en témoigner de mon travail au quotidien.
Mais en dehors du contexte politique et dans un monde qu’on pensait pourtant si globalisé, parfois uniformisé, elles rendent aussi la découverte du pays voisin passionnante et excitante.
Sur euradio, Jacob Ross, vous souhaitez partager ces différences culturelles avec le public. Quel type de différences allez-vous aborder en priorité ?
Je voudrais, deux fois par mois, vous présenter une grande différence entre la France et l'Allemagne pour ainsi inciter les auditeurs et auditrices à s’intéresser à nouveau à l’Allemagne, au-delà des clubs de Berlin et de l’Oktoberfest de Munich. J’aimerais ensuite expliquer, lorsque c'est opportun, comment cette différence se répercute sur les relations entre nos deux pays. L'Allemagne et la France sont si proches, et pourtant, encore, si loin. Partons ensemble à la découverte de nos deux pays voisins.
Une interview réalisée par Laurence Aubron.