L'état de l'État de droit - Elise Bernard

Huawei Gate

Huawei Gate

Elise Bernard, docteur en droit public et enseignante à Sciences-Po Aix et à l'ESSEC, décrypte chaque lundi sur Euradio les implications concrètes de l'État de droit dans notre actualité et notre quotidien. Ses analyses approfondies, publiées sur la page Europe Info Hebdo, offrent un éclairage précieux sur ce pilier fondamental de l'Union européenne.

L’état de droit c’est une justice qui s’applique aux décideurs politiques, on s’en rend bien compte chaque semaine. Et là encore, c’est le Parlement européen qui fait encore malheureusement parler de lui comme théâtre de la corruption.

En effet Laurence, quand ce ne sont pas les partis nationaux qui abusent des fonds alloués à son fonctionnement, ce sont les ingérences extérieures accompagnées de financement douteux à destination des élus et assistants parlementaires qui font parler de l’institution.

Deux ans se sont écoulés depuis le Qatar Gate, et il y a quelques jours, une opération menée par la police belge découvre que les intérêts du géant technologique chinois Huawei ont été particulièrement - et illégalement - poussés au Parlement européen.

Deux questions se posent en droit et en géopolitique : Les démarches de lobbyistes d’Huawei pour la promotion des intérêts de l’entreprise débordent-elles du cadre légal ? L’État chinois s’immisce-t-il à visage caché dans les affaires de l’Union en tirant les ficelles derrière les tentatives d’influence de l’entreprise technologique ?

C’est suffisamment le cas pour que des perquisitions soient ordonnées, semble-t-il.

Consécutivement aux 21 perquisitions ayant permis la saisie de matériel et documents, le juge d’instruction belge parle de faits de blanchiment d’argent, de faux et d’usage de faux. L’affaire mobilise au point de faire intervenir les forces portugaises et françaises, en plus des belges.

Oui, rappelons que l’Union européenne n’a pas harmonisé ses règles en matière de droit pénal, malgré une évidente nécessité.

Clairement. En attendant, l’Union envisage de se doter d'un organe chargé des questions d’éthique. Organe indépendant, il sera chargé d'établir des normes éthiques communes et d'accroître la transparence dans l'ensemble des institutions de l'UE.

Parce que pour l’instant, chaque institution dispose de son propre cadre éthique.

Il y a un an, Parlement et Commission ont voté en faveur de normes éthiques communes pour toutes les institutions de l'UE. L’objectif est de mettre en place un mécanisme permettant aux institutions de se coordonner et de procéder à des échanges de vues sur les questions d'éthique. Mais la question de l’adhésion du Conseil européen reste encore en suspens, malgré l’impulsion d’A. Costa qui doit convaincre les représentants des Etats.

Un entretien réalisé par Laurence Aubron.