À propos d’Elise Bernard : Docteur en droit public, enseignante à Sciences-Po Aix et à l'ESSEC, décrypte chaque semaine les traductions concrètes, dans notre actualité et notre quotidien, de ce grand principe fondamental européen qu’est l’État de droit. Ses analyses sont publiées sur la page Europe Info Hebdo.
L'État de droit c’est fondamental pour les États désireux de rejoindre l’Union européenne, mais comment accompagner les candidatures de ces États ?
Tout à fait, c’est une condition indispensable d’adhésion à l’Union, le respect de l’État de droit, cela figure clairement dans les traités d’ailleurs. En pratique, dans un premier temps, c’est l’adhésion au Conseil de l’Europe qui permet un 1er accompagnement vers l’établissement de l’État de droit.
Adhérer au Conseil de l’Europe c’est un peu comme l’antichambre de l’adhésion à l’UE alors.
Le Conseil de l’Europe a été créé avant la CEE, il n’a pas été prévu pour cela mais, dans les faits, on peut le comprendre ainsi. Tous les États membres du Conseil de l’Europe n’ont pas vocation à rejoindre l’Union, mais les États ont d’abord été membres du Conseil de l’Europe, soumis à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, avant de rejoindre l’Union.
Donc après plusieurs années à devoir se conformer à cette justice, un État peut s’estimer prêt à rejoindre l’Union européenne.
Exactement, c’est pour cela que, au-delà des circonstances actuelles très spécifiques, les demandes de candidature à l’UE de l’Ukraine, de la Moldavie et de la Géorgie n’ont pas vraiment étonné.
On avait déjà vu ensemble les programmes qui permettent cet accompagnement des États vers une vision exigeante de l’État de droit.
Tout à fait, et là, fin février, on est allés encore un peu plus loin. La Secrétaire générale du Conseil de l’Europe Marija Pejčinović Burić et le Commissaire européen à la politique de voisinage et à l'élargissement Olivér Várhelyi ont deux nouveaux programmes de coopération entre l'Union et le Conseil de l'Europe.
Le 1er concerne les Balkans occidentaux et la Turquie et il a pour objectif de contribuer à la réalisation des priorités du processus d'élargissement de l'UE et encourager les réformes nationales dans les domaines de l'État de droit, de la démocratie et des droits de l'Homme. Tous les États concernés sont candidats ou potentiellement candidats à l’UE. Le 2e se concentre sur la bonne gouvernance dans la région du Partenariat oriental.
Les États du partenariat oriental, ce sont les ex Républiques soviétiques ?
Oui mais pas toutes, cela dépend des États. Pour la Biélorussie, le programme s’adresse pour l’instant à la société civile organisée, pas au régime de Loukachenko. Pour l’Arménie et l’Azerbaïdjan, à voir, difficile à dire si cela aura un effet.
Oui c’est plutôt avec la Moldavie, l’Ukraine et la Géorgie que cela peut avoir un impact.
Tout à fait, les déclarations avancent clairement une amélioration des perspectives européennes pour ces trois États qui avaient déposé leur candidature à l’UE en juin 2022. L’Ukraine et la Moldavie, candidates, doivent continuer leurs réformes pour voir s’ouvrir les négociations d’adhésion. Elles ont besoin d’être accompagnées au regard des circonstances de crise qu’elles subissent. La Géorgie, elle envisage de retenter d’obtenir son statut de candidat. À voir aussi, parce que nous avons d’un côté une population euro enthousiaste et un parti majoritaire qui semble vouloir se rapprocher de Moscou.
Entretien réalisé par Laurence Aubron.