Chaque semaine sur euradio, Perspective Europe, l'association du master "Affaires européennes" de Sciences Po Bordeaux, revient sur l'actualité bruxelloise et européenne.
Bonjour Nils, quoi de neuf en Europe ?
Un dossier diplomatique de grande envergure refait surface : Donald Trump, fraîchement réélu, relance son intérêt controversé pour le Groenland. Cette fois, les menaces sont explicites et lourdes de conséquences. Vous vous souvenez sans doute de sa proposition d’acheter le Groenland en 2019, qui avait déjà provoqué un tollé. Aujourd’hui, cette ambition s’accompagne d’une stratégie encore plus offensive.
Reprenons les faits. Que s’est-il passé récemment ?
Mercredi dernier, Donald Trump a eu un entretien téléphonique de 45 minutes avec la Première ministre danoise, Mette Frederiksen. L’échange portait principalement sur le Groenland. Trump a clairement menacé d’imposer des droits de douane ciblés sur certains produits danois si le Danemark refusait de céder le contrôle du Groenland aux États-Unis. Ce type de pression, très agressif, est sans précédent dans les relations transatlantiques récentes.
Une attitude qui frise l’intimidation … Comment le Danemark a-t-il réagi ?
La Première ministre Frederiksen a réagi avec fermeté, en consultant immédiatement les autorités groenlandaises et en convoquant une réunion d’urgence avec des représentants du monde des affaires. Elle a déclaré lors d’une conférence de presse que la situation était « grave » et a mis en garde contre ces tentatives de pression économique. L’atmosphère à Copenhague est aujourd’hui particulièrement tendue.
Mais le Danemark n’est pas isolé, n’est-ce pas ?
Non, en effet. L’Union européenne est un soutien essentiel dans cette crise. Depuis 2023, l’UE dispose d’un Instrument de lutte contre la coercition économique, qui permet d’imposer des contre-mesures rapides et fermes contre des pays pratiquant ce type de pression. Un porte-parole de la Commission européenne a confirmé que Bruxelles était prête à agir pour protéger l’intégrité de ses membres. La réponse pourrait donc être proportionnée, mais elle risque aussi d’exacerber les tensions avec Washington.
Mais pourquoi Trump s’obstine-t-il à vouloir le Groenland ?
Derrière cette insistance se cache une vision stratégique bien définie. Le Groenland est riche en ressources naturelles : pétrole, gaz, minerais rares. Sa position géographique en Arctique en fait également un lieu stratégique clé, particulièrement dans le contexte des rivalités grandissantes entre les États-Unis, la Russie et la Chine. Trump semble considérer que le contrôle de ce territoire renforcerait significativement la position géopolitique des États-Unis.
Et les Groenlandais dans tout ça ?
Ils opposent une résistance très claire. Les autorités groenlandaises ont réaffirmé que leur territoire n’était pas à vendre. Cette crise semble même renforcer leur détermination à obtenir plus d’autonomie vis-à-vis du Danemark et à préserver leur souveraineté. Cependant, cette posture risque d’être mise à rude épreuve face à la pression américaine.
Un entretien réalisé par Laurence Aubron.
