Toutes les deux semaines sur euradio, retrouvez la chronique Fréquence Europe de Radio Judaïca et l’Europe Direct Strasbourg, présentée par Olivier Singer.
Le Parlement européen a adopté le 16 février une résolution portée par la députée européenne française Karima Delli sur le développement d’une stratégie européenne pour le vélo.
Pourquoi le Parlement européen souhaite-t-il que l’Union européenne change de braquet pour le développement du vélo ?
Alors que l’UE s’est engagée dans une course contre la montre pour diminuer d’ici 2030 de 55 % ses émissions de gaz à effet de serre pour arriver à la neutralité carbone en 2050, le secteur des transports est le seul à ne pas avoir réduit ses émissions depuis les années 90. En France, cette activité contribue encore à près de 30 % des gaz à effet de serre.
Et jusqu’à présent, les mesures prises ont très souvent porté sur l’automobile notamment avec l’interdiction des ventes des voitures thermiques d’ici 2035 ou sur les véhicules lourds comme les camions et les autocars qui devront respecter de nouvelles normes environnementales plus fortes. Par ailleurs, les député·es européen·es considèrent que le vélo a un rôle essentiel à jouer pour atteindre les objectifs que s’est fixés l’Union en matière de climat. Ils souhaitent ainsi que le vélo soit reconnu comme un mode de transport à part entière et non plus seulement comme un sport ou un loisir.
Avec cette résolution, adoptée le 16 février, les député·es demandent à la Commission européenne de proposer une véritable stratégie pour le vélo en Europe d’ici 2030.
Quel est l’objectif attendu par cette résolution ?
Le seul véritable objectif chiffré dans cette résolution du Parlement européen est que la Commission européenne adopte un plan pour le développement du vélo qui permet de doubler le nombre de kilomètres parcourus à vélo en Europe d’ici 2030.
Pour vous donner une idée du challenge que cela représente, en 1982, 82 % des élèves européen·nes (écolier·ères, collégien·nes, lycéen·nes) se rendaient en classe à pied ou à bicyclette. Aujourd’hui, ils·elles ne sont plus que 14 %. Aussi, l’utilisation du vélo est très différente selon les pays voire les villes elles-mêmes. À Copenhague, 35 % des habitant·es se déplacent quotidiennement à vélo. À Strasbourg, ville la plus cyclable de France, ce chiffre n’est que de 16 % et seulement 8 % des Européen·nes utilisent un vélo tous les jours et ce chiffre est de 4 % pour les Français·es.
Pourtant, le vélo a bien des avantages, il améliore la santé de ceux·celle qui le pratiquent, car c’est un transport actif, il réduit les embouteillages et la pollution sonore, il améliore la qualité de l’air, c’est un mode de transport relativement abordable et il favorise une économie durable, puisqu’il est facilement réparable et recyclable.
Mais alors qu’est-ce qui freine son développement ?
Les freins sont connus, c’est d’abord son image, celle d’une pratique plutôt réservée à un public masculin, jeune et en bonne santé. Se pose ensuite la question du vol et de la sécurité. En France, un rapport publié par l’observatoire national interministériel de la sécurité routière constate une hausse de 30 % des décès de cycliste en 2022 par rapport à 2019 et une hausse de 13 % des accidents graves.
Et que prévoit cette résolution du Parlement européen pour développer le vélo ?
Pour doubler le nombre de kilomètres parcourus à vélo d’ici 2030, les député·es européen·nes souhaitent l’amélioration des infrastructures notamment avec la construction de voies cyclables séparées, une meilleure interconnexion entre les modes de transports (notamment les places de vélos dans les trains) faciliter les déplacements entre les banlieues et les centres-villes et l’accroissement des systèmes de location en libre-service. Afin de lutter contre le vol, ce texte envisage la construction de parkings à vélos sûrs et sécurisés, mais aussi le développement du nombre de stations de recharge pour le vélo à assistance électrique.
Le développement du vélo est aussi une opportunité économique et d’emploi. Selon cette résolution, l’écosystème du vélo compte plus de 1000 PME et génère environ 1 million d’emplois. Le Parlement estime que ce nombre pourrait doubler d’ici 2030.
Suite à la pandémie et à la crise énergétique, le développement du vélo s’est déjà accéléré. Puisqu’en 2021, déjà, on notait une hausse significative des ventes avec un total de 22 millions de vélos, soit une augmentation de 10 % en 3 ans.
Comme pour la voiture, l’Union européenne veut aussi soutenir la production des vélos et des composants fabriqués en Europe « le made in Europe » avec une stratégie industrielle et des programmes de financement, une baisse de la TVA à la vente et pour les réparations. Cette stratégie pourrait ainsi permettre de créer 1 million d’emploi supplémentaire.
Afin de lancer cette stratégie, le Parlement européen demande également que l’année 2024 soit proclamée l’année européenne des déplacements à vélo.
La balle est désormais dans les mains de la Commission européenne à qui il revient maintenant de mettre en place concrètement cette stratégie.
Entretien réalisé par Cécile Dauguet.