Aujourd’hui en Europe

Aujourd'hui en Europe - 19 novembre 2025

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky et son commandant (à gauche) (SERVICE DE PRESSE DE LA PRÉSIDENCE UKRAINIENNE - 2023) Aujourd'hui en Europe - 19 novembre 2025
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky et son commandant (à gauche) (SERVICE DE PRESSE DE LA PRÉSIDENCE UKRAINIENNE - 2023)

Aujourd'hui en Europe est un journal consacré aux actualités européennes du jour, réalisé par la rédaction d'Euradio à Bruxelles. Avec Thomas Kox, Baptiste Maisonnave, Paul Thorineau et Ulrich Huygevelde.

Au programme : 

  • Armée europe : Alors que la Russie accuse la France d’entretenir la guerre en vendant des rafales à l’Ukraine, la Belgique achète des intercepteurs de drones à la Lettonie, la Grèce test ses nouveaux équipements et l’Allemagne se rapproche d’un service militaire obligatoire
  • Total Energie “complice de crimes de guerre au Mozambique” d’après l’European Center for Constitutional and Human Rights
  • Souveraineté numérique de l’UE : Macron et Merz proactifs lors du sommet

On ouvre ce journal en s’intéressant à l’armement européen. Divers accords et projets ont ponctué l’actualité ces derniers jours, témoignant d’une intention partagée dans l’UE de renforcer ses moyens de défense - à commencer par cette signature de Volodymyr Zelensky, lundi, d’une lettre d’intention quant à l'achat de 100 avions de chasse français.

Oui, la vente n’est encore qu’au stade de déclaration d’intention, mais le dirigeant ukrainien et son homologue français parlent déjà d’un “accord historique”. De quoi déclencher l’ire de Moscou, qui accuse Paris de ne “ne contribuer en aucun cas à la paix”, mais, je cite, “d’alimenter au contraire les sentiments militaristes et proguerre”. Une déclaration du porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, qui a ajouté lors du même briefing que ces rafales “ne changeront en rien la situation sur le front ou la dynamique du conflit”. 

Concernant la question de qui réglera la note de cette centaine d’avion de chasse, deux options se présentent à Kyiv : se servir du dispositif européen SAFE, pour Security Action for Europe, qui alloue jusqu’à 150 milliards d’euros aux pays ayant des projets d’investissement en défense, ou attendre sans certitude que se débloque le prêt de 140 milliards d’euros issus des avoirs russes gelés à Bruxelles.

Et non loin, l’Allemagne souhaite également renforcer sa défense, notamment par un retour progressif au service militaire…

Oui la coalition au pouvoir souhaite gonfler les effectifs de l’armée allemande. Après plusieurs semaines de discussions, les différents partis politiques se sont accordés le 12 novembre pour un retour progessif au service militaire, sur une base de volontariat. 

Concrètement, dès le début 2026, les jeunes de 18 ans recevront un questionnaire leur demandant s'ils souhaitent s’engager dans l’armée, puis seront convoqués pour une visite médicale et un test de sport. Les femmes peuvent bien sûr s’engager aussi, mais elles ne sont pas incluses dans ce processus, conformément à la Constitution.

Si le nombre de volontaires n’est pas suffisant, le Bundestag se garde le droit de tirer au sort parmi les personnes aptes au combat.

Ce n’est pas tout, la Belgique et la Pologne investissent toutes les deux dans de nouvelles défenses anti drones contre la Russie.

Oui les deux puissances ont régulièrement subi des survols de drones ces dernières semaines, imputés à la Russie, et forçant la fermeture de leurs aéroports ou le décollage d’avions de défense. A la recherche d’un moyen plus efficace, Bruxelles a donc conclu un accord avec la société lettone Origin Robotics, qui manufacture des intercepteurs de drones - un contrat d’une valeur de 50 millions d’euros. Ces intercepteurs, similaires à ceux que l’on trouve en Ukraine, sont de petite taille et de grande vitesse et explosent au contact des drones ennemis. 

Leur fonctionnement fait écho à l’actuel entraînement de l’OTAN en Pologne, où l’alliance teste différents moyens de défense face aux drones russes. Le plus important, appelé système Merops, est l’un des “tueurs les plus efficaces des drones Shahed de la Russie” d’après le général américain Curtis King en charge des entraînements en Pologne. La technologie serait, selon lui, “responsable pour 40% des drones abattus en Ukraine”.

On continue ce journal au Mozambique, sur la côte sud-est de l’Afrique, où le groupe Total Energies est accusé d’avoir participé à des “crimes de guerre”. L’accusation a été formulée par l’ONG allemande European Center for Constitutional and Human Rights et a été transmise au parquet national antiterroriste de Paris. 

Oui, les faits se sont déroulés à l’été 2021 : des civils ont été séquestrés et torturés par des soldats d’un groupe paramilitaire appelé “joint task force”, ou JTF, alors chargé de surveiller le site d’exploitation de gaz du groupe Total Energies au Mozambique. 

Mais pour mieux comprendre, retraçons la chronologies des faits : le site est fermé après une attaque terroriste en mars 2021, qui avait tué plus de 1200 personnes, et le groupe pétrolier le laisse sous la protection des JTF, cette unité militaire créé par et pour le fournisseur d’hydrocarbures en collaboration avec le Mozambique. Aujourd’hui, devant le Parquet antiterroriste de Paris, le groupe est accusé d’avoir “directement financé et soutenu matériellement” cette unité militaire, en connaissance des actes violents auxquels elle avait participé puisque leur collaboration s’est poursuivie pendant plus de deux ans après les faits.

Sous prétexte de protéger les infrastructures gazières, la Joint Task Force va séquestrer, torturer et tuer entre 180 et 250 hommes, de juin à septembre 2021.

Oui, des exactions barbares, qui ont été révélées par le travail d’investigation du journaliste Alex Perry, pour Politico, puis par le média le Monde et le collectif Source Material. L’accusation de l’ONG allemande tombe au plus mal pour le groupe français, qui s’apprêtait justement à relancer l’activité du site au Mozambique - le quatrième plus grand projet gazier offshore du monde représentant un investissement de 20 milliards de dollars.  

Si Total Energie affirme ne pas être au courant de ce qu’il s’est passé là bas en 2021, un de ses rapports couvrant la fameuse période d’avril à septembre précise qu’un “incident” est survenu à l’été, sans précision, et qu’il a conduit à l’exclusion et au remplacement de 200 soldats de la JTF en septembre.

Et on termine ce journal par une ambition franco-allemande : celle de remettre l’Europe au premier plan des enjeux numériques. Emmanuel Macron et son homologue Friedrich Merz étaient réunis hier à Berlin pour un sommet sur la souveraineté numérique européenne - l’occasion de pointer du doigt les faiblesses, mais aussi les ambitions des 27 sur le sujet.

Oui, et il faut dire que le premier constat du sommet n’était pas des plus rassurants : l’Europe est numériquement faible, dépendante des géants américains et ne peut presque pas produire sans les ressources chinoises. Dans les mots du président français, elle est le “vassal” des autres puissances. Un exemple : les centres de données européens, essentiels au fonctionnement de l’IA entre autres, avaient l’année dernière une capacité de 16 gigawatts, 3 fois moins que leurs équivalents américains, et plus de 2 fois moins que les chinois.

Mais le duo Macron-Merz s’est illustré par un certain enthousiasme, désignant la “préférence européenne” comme une “priorité”, souhaitant l’essor de “champions européens” ou, plus concrètement, en annonçant une enveloppe de 12 milliards d’euros en provenance du secteur privé.

Aujourd’hui, la Commission européenne doit se pencher sur un texte de simplification des règles européennes dans le domaine du numérique.

Un journal de Baptiste Maisonnave, Ulrich Huygevelde et Paul Thorineau.